C'est à un jeu bien dangereux qu'est actuellement en train de jouer l'Egypte vis-à-vis de l'Algérie. Ce qui n'était au départ qu'un simple match de football, aussi important soit-il, entaché par une agression caractérisée contre les joueurs algériens à leur arrivée au Caire, est en train de prendre des proportions alarmantes. C'est vraiment préoccupant qu'un pays comme l'Egypte en arrive à fabuler sur des événements nés, comme tant de psychodrames, pourtant sur les bords du Nil. Après les événements condamnables du Caire, et la victoire des Verts à Khartoum, il semble que les autorités égyptiennes, au plus haut niveau, en viennent à prendre pour crédibles des informations diffusées à «giorno» par des chaînes satellitaires, qui ne font pas mystère de leur haine viscérale envers l'Algérie. Ce grand pays qu'est l'Egypte pour certains pays arabes, en est-il réduit à fantasmer après une défaite dans le domaine du sport, qu'il veut absolument politiser, sur le dos d'un pays qui garde, devant ces dépassements médiatiques dangereux et intolérables, tout son calme. Assurément, le ton est monté d'un cran du côté du Caire, au lendemain d'un véritable siège de la mission diplomatique algérienne dans ce pays. Fallait-il, dès lors, dans cette hystérie ambiante, ce délire politico-médiatique qui s'est emparé d'un pays qui n'a pas levé le petit doigt au plus fort de l'agression israélienne l'année dernière contre la population palestinienne désarmée à Ghaza, encore en rajouter ? C'est pourtant ce qu'a fait hier le président égyptien Hosni Moubarak, qui a cru bon de dire que son pays «ferait preuve de fermeté envers ceux qui portent atteinte à ses ressortissants», en des termes à peine voilés visant l'Algérie. Cette escalade dans le verbe et le dérapage dans les propos ne sont pas pour calmer les esprits, ni replacer les choses dans leur véritable contexte. A moins que le président égyptien ne soit lui aussi aveuglé par cette colère, qui balaie tout un pays après un simple match de football perdu, car il devait y avoir un vaincu et un vainqueur. L'Algérie a gagné ce match, car il était écrit qu'elle le remporterait. Point final. Maintenant, les propos de Hosni Moubarak devant le parlement égyptien samedi sonnent comme un rappel des troupes, un appel solennel à la mobilisation. Contre qui ? Des propos en fait qui confirment que sur les bords du Nil, c'est l'hystérie généralisée qui s'est emparée des Egyptiens, et même de leurs responsables. Le fils aîné du président égyptien, Alaa Moubarak, est allé même jusqu'à qualifier vendredi les supporteurs algériens de «mercenaires», et taxer de «terroristes» les incidents de Khartoum, que seul les Egyptiens ont vu. Tous les journalistes, tous les observateurs et l'ensemble des autorités soudanaises n'ont rien vu de grave se passer à Khartoum, avant, pendant et après le match contre l'Algérie. Seuls les Egyptiens restent accrochés désespérément à leurs fantasmes, une manière comme une autre pour les Egyptiens, y compris le président Moubarak, de justifier leur cuisante défaite, et, surtout, de trouver un coupable désigné pour cette débâcle monumentale d'une équipe vieillissante. Le fait est que le président égyptien, à travers la machine médiatique cairote, a trouvé dans cette défaite, que les Egyptiens digèrent mal car mauvais perdants, une belle opportunité politique pour placer définitivement son fils «Gamal» comme son digne successeur. Qui osera, dans cette hystérie collective, s'opposer au clan Moubarak ?