Qui présidera aux destinées de la «Suisse latino-américaine», la République orientale de l´Uruguay ? Après plusieurs semaines de campagne électorale bien mouvementée mais très correcte, un premeir tour vécu dans le calme le 25 octobre mais sans departager les candidats en présence, l´Uruguay se prépare à vivre le 29 novembre un deuxième tour définitif. Il opposera le candidat du «Front élargi» (gauche) Jose «Pepe» Mujica, et celui du Parti libéral (centre-droit) Luis Alberto Lacalle, tous deux considérés comme des poids lourds de la politique uruguayenne. Les résultats concordants de tous les instituts de sondage ne laissent aucun doute sur le choix de la majorité des électeurs. Avec une différence de 8 % des intentions de vote. L´ex-guerillero Jose «Pepe» Mujica devrait battre le postulant du parti libéral et se consacrer comme Président élu au soir du 29 novembre. Jose Mujica sera accompagné d´un vice-président, Danilo Astori, qui fut le ministre de l´Economie du gouvernement sortant du Dr. Tabaré Vasquez plébiscité par la majorité de ses compatriotes alors qu´il fut le premier chef d´Etat socialiste d´un pays où les partis traditionnels «blanco» et «colorado» avaient de tout temps accaparé le pouvoir à tour de rôle. Astori a permis au premier gouvernement de gauche de l´histoire uruguayenne d´élaborer une politique économique crédible qui fut très apréciée alors que le pays est démuni de toutes ressources naturelles. C´est ainsi qu´il dépend totalement des importations d´hydrocarbures. Les ressources agro-alimentaires et forestières, ainsi que les activités du secteur tertiaire, tel que l´imposant système bancaire à la mode suisse, permettent à l´Uruguay de faire vivre une population de 3,4 millions d´individus. Après cinq années de gestion, le Dr. Tabare Vasquez laisse un pays qui croît mieux à son destin, coincé territorialement et économiquement entre deux puissances sud-américaines - le Brésil et l´Argentine. La continuité de la politique à gauche a déjà été consacrée le 25 octobre par l´élection d´une majorité du Front élargi à la Chambre des députés (50 élus sur 99) et au Sénat (17 sénateurs sur 30). C´est dire si Mujica est élu, comme tout semble l´indiquer, il disposera d´un appui législatif appréciable qui facilitera la gouvernabilité du pays. Alors que les deux candidats présidentiels semblent très opposés dans leur style de vie, leurs convictions socio-économiques ne projettent pas de divergences notables dans leurs objectifs. Tous deux prroposent des visions similaires sur l´avenir d´un pays qui, malgré la tourmente de la dictature des années 70 et 80, reste pacifiste et insensible aux grands boulversements. Ceci explique la sérénité des analystes locaux et des instituts de sondage qui parient sur la continuité de la gestion du «Frente amplio». Comme il n´a cessé de le répéter au cours de la campagne électorale, Mujica promet cette continuité garantie notamment par la présence de Danilo Astori, un homme dont l´expérience économique remonte à ses antécédents nord-américains. Sur le plan extérieur, Mujica affiche ses sympathies pour le Président brésilien Luiz «lula» da Silva. « Mon modèle est Lula et non Chavez», a-t-il déclaré, prenant ainsi ses distances du Président vénézuelien qui ne compte pas que des amis dans le microcosme sud-américain. En pleine campagne Mujica s´était rendu à Brasilia pour renconter Lula afin de mieux ancrer son image dans le paysage politique régional et atténuer ainsi ses antécédents d´extrême-gauchiste. Le 23 novembre, le Front élargi exposa à l´opinion publique son plan économique, convaincu de sa prochaine consacration électorale. Il fallait rassurer les mileux d´affaires sur les intentions de leur nouveau leader qui, sans renier les promesses faites aux secteurs les plus démunis de la société, s´engage à poursuivre la politique éclairée de Tabare Vasquez en respectant les équilibres macro-économiques existants et la propriété privée avec des encouragements aux investisseurs. Supervisée par Astori, la future équipe économique comprendra un homme de confiance de Mujica. Il s´agit de Pedro Buonomo, résidant actuellement au Mexique et proche du Mouvement de participation populaire (MPP) que dirige Mujica. En outre, un social-démocrate, Fernando Lorenzo, qui avait assisté Astori par le passé, fera partie de l´équipe économique. Par un heureux hasard, Buonomo et Lorenzo avaient tissé des liens d´amitié dans les années 70 en militant dans le syndicalisme universitaire... Un troisième homme fort de l´équipe économique serait Mario Bergara, l´actuel président de la banque centrale. Le défi de ces hommes est de poursuivre une croissance qui fut en moyenne de 7 % par an sous la présidence du Dr. Vasquez.