Malgré les assurances du ministère de la Santé sur la disponibilité des médicaments, les pharmaciens, eux, continuent à crier à la pénurie qui a atteint, selon leurs déclarations, même les produits les plus courants. A Oran, les gérants d'officines ont signé une pétition dénonçant le manque inquiétant de ces produits et les répercussions d'une telle situation sur la santé des malades. Ils demandent au ministère de mener des enquêtes à travers toutes les wilayas pour identifier l'origine de cette rupture et les enjeux du marché des médicaments. «Nous n'arrivons plus à satisfaire les ordonnances des clients et essentiellement ceux atteints de maladies chroniques comme le diabète et l'asthme. Nous ne comprenons pas que le ministre réfute l'existence de toute pénurie, alors que sur le terrain nous endurons le calvaire avec tous les clients qui se rendent à la pharmacie et retournent bredouilles, alors que la maladie n'attend pas», a lancé avec amertume une pharmacienne à Oran. Sa collègue, activant dans la même wilaya, parle pour sa part de «situation catastrophique que nous n'arrivons plus à gérer. Le plus simple des médicaments est en rupture dans les officines tels que Modestamine et Doliprane. La situation est de plus en plus grave pour les diabétiques et les asthmatiques qui souffrent énormément de cette pénurie qui touche et les produits princeps et les génériques. Si le ministère parle d'enquêtes menées sur le marché, elles doivent couvrir toutes les wilayas et ne pas se limiter à Alger uniquement. En dehors de la capitale, les officines sont confrontées directement à cette crise et endurent, tout comme les malades, les conséquences». Le plus dramatique, raconte une des pharmaciennes, est de voir certains malades mourir car au moment d'une crise, le médicament qu'il devait prendre n'était pas disponible. «C'est le cas, dira notre interlocutrice, d'une femme enceinte et hypertendue qui a fait un pic de tension et son mari a dû faire le tour de la ville et supplier pour avoir le médicament Aldomet 250 mg. Hélas, il n'a pas pu s'en procurer. Le bébé est mort et la maman est dans un état comateux». Cet incident a été la goutte qui a fait déborder le vase pour les pharmaciens d'Oran et qui les a poussés à signer cette pétition pour tirer la sonnette d'alarme sur cette dure réalité qu'ils sont obligés d'affronter. Mais sur les raisons de cette pénurie, les avis divergent parfois et les facteurs déclencheurs mutent le plus souvent. Si du côté de certains opérateurs des produits pharmaceutiques, c'est la nouvelle réglementation concernant l'importation et notamment le crédit documentaire qui a accentué la pénurie, pour les pharmaciens, l'enjeu se situe dans la distribution et le diktat de certains grossistes. «Ces grossistes créent la pénurie pour faire pression ensuite sur le pharmacien et leur imposer des produits en stock depuis des mois et dont la date de péremption approche. Pour cette raison, nous ne pouvons pas dire actuellement qu'il y a manque de médicaments, puisqu'il y a eu des importations de médicaments qui sont rentrés mais qui restent stockés chez les grossistes. Ils ne sont écoulés qu'au moment opportun». Quant au président du SNAPO, M. Belambri, contacté hier, il parle, pour sa part, d'une amélioration de la situation, ces jours-ci, avec l'arrivée sur le marché d'un bon nombre de produits qui étaient en rupture. Le SNAPO demande au ministère de faire des enquêtes sur la mauvaise gestion des stocks. Interrogé si cette crise va durer dans le temps, le président du SNAPO se montre optimiste, arguant que plusieurs réunions ont été tenues sur cette question avec le ministère de la Santé pour débloquer la situation qui connaîtra une nette amélioration avec la révision attendue des cahiers des charges.