Au total, plus de 100 médicaments indisponibles. Les pilules de contraception, les corticoïdes, les antalgiques, les pommades anti-inflammatoires ont disparu des officines. La grande perturbation dans la disponibilité du médicament n'est pas près de s'estomper. Datant de plusieurs mois, le déficit s'étend à presque l'ensemble de la nomenclature des médicaments. Insidieusement, «la pénurie est devenue chronique, donc de plus en plus inquiétante», a soutenu hier, le président du Syndicat national des pharmaciens d'officines (Snapo), Messaoud Belambri. «Le pays passe à une phase supérieure grave dans l'indisponibilité de plus d'une centaine de médicaments au niveau des pharmacies», indiquent de nombreux spécialistes du secteur. «Cette pénurie pourra prendre des allures très dangereuses si les pouvoirs publics ne daignent pas intervenir à temps», a déploré hier, Messaoud Belambri. Pour y remédier il faut faire un diagnostic approfondi du secteur qui subit des manques d'approvisionnement continuels depuis plusieurs mois. «Il ne s'agit pas de débloquer une enveloppe financière ou de signer les programmes d'importation», indique-t-il. Le ministre de la Santé Djamel Ould Abbès a affirmé à plusieurs reprises que les médicaments manquants sont désormais disponibles et que l'Algérie dispose d'un stock de médicaments de six mois. Le ministre s'est également engagé à assurer les médicaments manquants avant le mois du Ramadhan. Le 19 juillet dernier, le ministère de la Santé a déclaré qu'une enveloppe de 10 milliards de dinars est prévue pour importer tous les médicaments manquants. Les pharmaciens et les opérateurs du secteur s'accordent à dire qu'«une décision plutôt beaucoup plus importante s'impose d'elle-même». «La spéculation prédomine largement le marché du médicament. En plus du diktat des lobbies, de la mafia et d' exclusivités. nous subissons comme pour n'importe quel produit banal, des rétentions des stocks et des ventes concomitantes», a estimé notre interlocuteur. «La réforme du marché doit être prescrite en urgence», a souligné ce syndicaliste. L'ouverture brutale du marché a conduit à «une désorganisation caractérisée de la filière du médicament», souligne-t-il. L'Etat doit absolument retrouver son rôle de régulateur. Le suivi, le contrôle rigoureux, la constitution de stocks de sécurité et la réorientation de la production nationale sur des produits essentiels, se font de plus en plus sentir. «Aujourd'hui, même si on quintuple l'enveloppe d'importation (soit de 1 à 5 milliards de dollars par an) on ne s'en sortira jamais et les médicaments continuent de manquer dans les pharmacies», regrette M.Belambri. «Si les malades chroniques, les cancéreux demeurent particulièrement menacés par cette pénurie, il, en demeure pas moins que presque la totalité des malades sont touchés par ce manque», soulignent de nombreux pharmaciens. A titre d'exemple, selon notre interlocuteur, «actuellement, sur une dizaine de marques de pilules de contraception commercialisées auparavant, une seul est disponible au compte-gouttes». Idem pour les corticoïdes, antalgiques, pommades anti-inflammatoires, etc. Par ailleurs, «l'anarchie est telle que plusieurs produits apparaissent et disparaissent chaque semaine», conclut-il. Cela d'une part, de l'autre, les opérateurs se plaignent quant à eux des difficultés posées par le Credoc instauré en 2009 comme unique moyen de paiement des importations, y compris celle de médicaments. «Si le gouvernement n'opère pas incessamment des mesures d'assouplissement au credoc, incessamment», entendre dans la loi de finances complémentaire 2010, «la situation risque de dégénérer davantage», a souligné le président de l'Union nationale des opérateurs en pharmacie (Unop), Amar Ziad. Outre les effets du Credoc, il y a une espèce de non- responsabilité pharmaceutique prévalant dans le secteur. Des autorisations d'importation pour un seul médicament sont accordées à plusieurs opérateurs à la fois. «Sous d'autres cieux, le fournisseur et l'opérateur sont responsables de la disponibilité du médicament pour lequel ils ont l'autorisation d'importation. Chez nous, la multiplication des opérateurs sur le/ ou les mêmes produits crée une situation où personne n'est responsable sur quoi que ce soit», a précisé le président de l'Unop.