L'Egypte souffre d'une perte de sagesse. La perte d'une partie de foot y est pour beaucoup. Elle ne pouvait supporter la défaite. Elle pleure son destin. Elle gémit sur un passé qui se perd. Lentement. Le feuilleton égyptien est en passe de finir, enfin ses épisodes. La violence des écrans s'est estompée doucereusement dans un message de bonne fête. Son président, comme ses commentateurs, ses artistes, ses vallées sont très vieux. A l'instar d'ailleurs de leur histoire. La vieillesse, qui n'est pas une honte, est hélas une pathologie qui vous amène droitement vers l'incapacité juridique quant à l'exercice d'un acte de gestion. Que vont-ils faire maintenant ? Nous attaquer à coups d'avions et de commandos ? Ou bombarder les tunnels qui séparent encore les deux peuples pour venir nous arracher de force ce fameux ticket d'accès en Afrique du Sud ? Ils ne feront rien du tout. Trop occupés par le marasme quotidien qui envenime la cité, les quelques pontes médiatiques évoluant autour du noyau central du régime moubarak, vont, dans quelques jours, se terrer et se confondre dans la fausse grandeur d'une nation, parrain du monde arabe. Ils vont tout faire pour faire taire ce scénario, loin des mises en scène habituelles de leurs brillants scénaristes. Ils vont se caser dans l'unité de l'islam et du chant de l'arabité, entonnés depuis longtemps et qui ont permis à ce pays de s'autoproclamer Oum eddounia. Mais, messieurs du Caire, d'où tenez-vous cette virtuelle prédominance tutélaire sur tous ceux qui partagent la langue du Coran ? Défiez-vous l'Iran, l'Inde, le Pakistan, l'Indonésie ? Il fut un temps où ce pays ait eu à avoir un statut privilégié de leader. C'était à l'époque de Misr et non de Masser. Cela serait dû à plusieurs facteurs. Notamment celui de la quasi-stabilité politique. C'est justement cette pseudo stabilité qui aurait permis à l'Egypte de jouer un rôle essentiel de conciliateur dans la détermination résolutive des crises régionales. Alliée du sionisme, l'Egypte est contestée dans ce volet par tous ses pairs. C'est grâce à cette promiscuité avec l'ennemi éternel que Moubarak croit avoir main basse sur le dossier cardinal du monde arabe, qu'est l'affaire palestinienne. Toutefois, depuis quelques années, l'on assiste à la dégénérescence de la diplomatie égyptienne au profit d'autres potentialités. Notamment celle de l'Arabie saoudite, de la Syrie ou du Qatar, de surcroît lors de la guerre contre Gaza. L'exemple le plus typique de cette faiblesse diplomatique reste l'échec de réconciliation entre les frères des Hamas/Fateh. L'Egypte a carrément affichée, sans le dire son impuissance. En outre, la permanente recrudescence de la violence dans les territoires palestiniens lui pose un incontestable embarras sécuritaire, avec un possible réveil de la subversion terroriste sur son territoire. Là, à défaut d'initiatives locales ou régionales, le match contre l'Algérie était vu par les laboratoires des moukhabarat comme une occasion inouïe de ressouder les rangs et, par conséquent, faire comprendre aux autres citoyens que l'Egypte est objet à une humiliation et qu'elle doit relever ce défi d'offense. Ainsi, la fibre nationale générale est mise en situation de défense contre un ennemi potentiel. L'Algérie qui n'aurait pas dû battre Chahata et consorts. La voie à toutes les dérives verbales est ainsi grandement ouverte, à l'appel du poulain de Moubarak, pour vilipender, sans honte ni retenue, le chakik d'hier. L'on aurait entendu tout. Mais le calme olympien des autorités algériennes, tout secteur officiel confondu, a encore excité l'ire de ceux qui voulait l'escalade. Le silence stratégique et calculé algérien a enfoncé davantage le synopsis égyptien conçu et réalisé par le régime des enfants de Suzanne dans un isolement total. Le régime pénétré de tous ces éléments susceptibles de provoquer une déstabilisation, voire compromettre tout le projet initié voilà des temps, tendant à faire assurer la succession du pouvoir à l'un des fils du président, s'empresse faute de temps et par fatalité, à trouver nulle part une aubaine de renflouer sa popularité. Le match contre l'Algérie s'avère être grandement porteur. Aujourd'hui, le problème de la succession de Moubarak se pose avec plus d'acuité et de sérieux d'autant que le Raïs ; arrivant en fin de règne après 28 ans de pouvoir a dernièrement eu des ennuis graves de santé, et c'est ça l'aléa de la fatalité. Ils veulent aller vite et bien, pensent-ils. En revanche, la résistance avec laquelle l'opposition politique attend alertement cette ultime décision de promouvoir à travers le PND, parti au pouvoir et présidé par Gamel continue à s'exprimer dans une atmosphère pleine d'intimidation, d'emprisonnement et de menaces. A voir la mouvance islamique ou la protestation Kifaya, le régime tremble et tressaute. Croyant investir le champ politique par son fait d'investir les stades de foot, il croit réussir la production cinématographique d'un film encore inédit. Dans le faux conflit récent, cette opposition a su garder, pour de nombreux partisans, une certaine proximité et s'est figée dans un attentisme averti. Elle ne pouvait faire autrement. Le lynchage médiatique fait que nulle autre voix, que celle ovationnant l'insulte et l'invective à l'égard du pays frère d'hier, n'ait droit d'antenne. Des soldats de la tchatche sont ainsi mobilisés sur les podiums de TV. Ainsi, la probabilité de la transmission de pouvoirs s'accoutre donc d'une particularité exceptionnelle tant les pétitions sont nombreuses. Y a-t-il vraiment une forte «chance» que Gamal soit vraiment le légataire politique de son père ? Est-il possible que tout le montage médiatique satellitaire fera déterrer aux millions d'Egyptiens leur accord sur ce transfert familial ? Enfin, sur un autre registre, que pouvons-nous dire ? ... c'est vrai qu»ils nous ont insultés, touchés dans nos propres sentiments. Ils ont écorché tout ce qui existait en nous comme fierté d'appartenance à la Nation arabe. Ils nous ont traités de tous les noms. C'est ça justement la fausse suprématie égyptienne. Oum eddounia. Alors, commençons d'abord par nous interroger. Qui a pu le long des temps octroyer ce titre à ce pays ? Pour quelles raisons les Egyptiens se croient-ils les parrains des autres pays arabes ? Les maîtres et les représentants de ce monde ? Bref, les causes sont multiples. Mais l'essentiel c'est que, nous, Algériens, entre autres, leur avons aussi permis ce statut. Déjà au plan du parler de la langue arabe. Ils nous traitent de faux arabes, d'ignares en termes de langage, de francophones pervertis, de gens sans bon parler. Ils s'anoblissent d'avoir eu un temps à nous avoir appris l'arabe et soudainement ils nous admonestent de ne pas savoir en faire usage. Peuvent-ils avoir ainsi raison ? Oui, car nous y développons un grand complexe. Si nous comportons en notre sein d'éminents orateurs et exégètes de la langue arabe nous évitons dans l'officiel ou l'officieux, surtout sur les plateaux de télévision ou de radio, pour la plupart d'user ou d'utiliser notre « langue ». L'algérien. Avec tout ce qu'il comporte comme dialectale. Kabyle, chaoui, targui, mozabite etc... Ce parler de tous les jours. Dans la rue, à la maison, entre nous. Je crois que nous nous comprenons ainsi, non ? Certes, nous ne maîtrisons pas tous la langue arabe, châtiée et fosha. A l'exception, quand bien même de nombreux brillants en la matière, mais, bon de Dieu, rien ne nous empêche d'utiliser nos signes verbaux, nos expressions orales, nos phrases usuelles, enfin notre patrimoine lexical. Et ce, à l'instar de tous les pays arabes. Partant de ceux du Maghreb à ceux du Machrek. La langue arabe, graphiquement et linguistiquement, est une et indivisible. Est-ce que le parler marocain ou tunisien, ou libyen ressemble à la phonétique d'un moyen-oriental ? Sur les chaînes du grand Cham, il existe une autre phonétique incompréhensible pour nous Maghrébins, pourtant, c'est de l'arabe qu'il s'agit. Il y a des spécifiés partout. Alors, cessons de nous efforcer, de suer à trouver le mot qui convient, à accorder en genre et en nombre la syntaxe... Une vieille citoyenne algérienne ne comprendra pas de quoi ça retourne «bitaket ettaarif», mais saura qu'est-ce qu'une «cartantiti». Pour elle, «essiyara» n'est pas «tomabile». Il n'y a qu'à voir comment sont menés les débats sur médi 1sat ou sur Nessma TV, en tunisie. Là, l'on y parle à l'aise. On ne cherche pas ses mots. On peut juste les mâcher, les choisir. Mais c'est cool. C'est nous, entre autres, qui avons ouvert le chemin de la montée en fausse puissance de cette Egypte. Par notre cautionnement inconditionnel à ce qu'initie l'Egypte comme mesures inter-arabes. Un rapprochement plus clair, des Etats-Unis, de l'Europe et de la Turquie ferait un peu réduire l'impact égyptien sur les affaires de la nation. Et plus, rien ne nous oblige à suivre le pas de Moubarak. Pourquoi, ne se comporte-t-il pas de la même manière avec Kadhafi ? Car tout simplement ce dernier tient à détruire le mythe égyptien, par son boycott répété et itératif à tout ce qui s'organise à Charm-echeikh, le Caire ou Assouan. Ou se distancie à chaque fois, pour narguer l'autre, de faire route seul. Faisons autant. Pour ce qui est de la haine, créée par les plateaux de TV et affichée différemment par de nombreux citoyens égyptiens à l'égard de l'Algérie, de ses habitants, de son histoire et de son drapeau, elle est due essentiellement à ce que distille toutes les chaînes du Caire. Soumises en plein écran au pouvoir ponctuel. Ce pouvoir a ainsi permis à son peuple de déverser la colère contenue jusqu'ici. Elle voulait depuis des lustres se faire valoir et se faire voir dans la rue. Contre Israël notamment. L'ayant empêchée à plus d'un tour, voilà que l'aubaine est possible. Allez, criez, hurlez ! Donc, l'Algérie n'est qu'une cause octroyée à la vindicte populaire. Les pauvres citoyens n'ont rien contre qui gueuler. Leurs bouches sont bouchées par les chiffonniers de moukhabarat-moubarak. Ils ne pouvaient brûler nul étendard. Celui de l'Etat hébreu étant hissé sur le fronton de son ambassade. Dans ce grand délire, l'Egyptien induit en erreur y voit derrière l'Algérie, l'Etat sioniste. Il prend, le pauvre, son fantasme par défaut de cible, pour une vérité. Il a besoin de faire ça. Toutes les insanités et les basses insultes proférées face à un peuple de braves gens, silencieux jusqu'à présent, font dire aux autres : voici l'image du pays des grands professeurs, des avocats, des prix Nobel et des illustres artistes. Voici, leur manière d'expression. La folie a gagné toutes les têtes. La raison s'est abruptement enfuie de la cité des pharaons. La divagation est devenue totalement égyptienne. Ils sont frappés par leurs propres anathèmes. C'est la malédiction de leurs saints qui leur cause ce tort non attendu. En fait, le pays du grand Nil avec ses complexes soubresauts internes et externes commence à connaître les affres de la décrépitude. Le syndrome de la vieillesse frappe déjà aux portes du palais présidentiel. Heureusement pour la postérité que l'Egypte des pharaons, de Djamel Abdenasser et de Nagib Mahfoudh n'est pas celle des moubarak, de nile-sport, de dream et de brahim elhidjazi... Ces gens là ne sont que les fils indignes de leurs ancêtres. Ils sont la mauvaise progéniture des CD, des vidéo-clips et des k barrés.