Les Algériens affirment que la criminalité a pris des proportions inhabituelles. Chacun essaie de comprendre ce changement, et c'est tout naturellement que les sociologues se sont penchés sur le phénomène de la criminalité en Algérie, particulièrement. C'est donc pour rechercher les raisons de l'augmentation de la criminalité dans une société toujours conservatrice que la Faculté des lettres et des sciences sociales de l'université Saad Dahlab a organisé un Séminaire international les 1er et 2 décembre courant, ayant pour thème : «La criminalité et la société» auquel ont assisté des sociologues de Syrie, de Jordanie et de plusieurs universités algériennes. Ainsi, nous apprenons que la criminalité prend son essence de la nature même du système social en vigueur dans le pays et que «le crime est un comportement naturel d'un individu normal dans une société exemplaire, et la société où il n'y a pas de criminalité est une société au comportement dictatorial» comme l'ont qualifié certains chercheurs étrangers, alors que certains affirment que «la criminalité est une blessure dans le corps social», et comme pour toute blessure, il convient de rechercher un traitement curatif adéquat. En Algérie, comme d'ailleurs partout, la criminalité n'est pas nouvelle mais c'est le nombre de crimes divers qui sont commis un peu partout à travers le territoire national qui le sont. En outre, le manque de statistiques fiables et mises à jour régulièrement ne permet pas d'avoir un aperçu réel sur ce thème et la plupart des intervenants se sont désolés de ce manque. Pourtant, même incomplètes, les statistiques retrouvées çà et là donnent la chair de poule : plus d'un million d'enfants travaillent dans des conditions inhumaines un peu partout, dans beaucoup de secteurs comme la manufacture, le plastique, les restaurants, les cafés, dans les marchés de gros de fruits et légumes et dans diverses usines. Nous avons aussi en Algérie plus de 76.000 SDF, 28 centres d'accueil pour enfants illégitimes, 10 suicides ou tentatives de suicide par jour durant les 7 premiers mois de l'année 2007, près de 80 000 avortements par an, 109 nouveau-nés ont été abandonnés durant les derniers mois de la même année, certains d'entre eux retrouvés dans des sacs en plastique avec les ordures. En outre, et seulement pour les années 2001 et 2002, 2.041 femmes ont été violées dont 1.604 avaient moins de 18 ans, ceci sans parler des plus de 7.000 qui ont été enlevées et violées par les terroristes durant les années de braise. Et, bien sûr, les autres crimes sont à l'avenant et leurs nombres ne fait qu'accroître, comme les meurtres qui représentent 17,94 % du total des affaires traitées par les différents services de la sécurité, les vols 12,42 %, les viols 12,40 % et la corruption 11,26 %. Le trafic de drogue et sa commercialisation, les détournements de deniers publics, l'adultère, l'abus de confiance et bien d'autres crimes qui étaient presque inconnus chez nous sont devenus monnaie courante. Les femmes aussi commencent à être mêlées aux différents crimes et elles sont de plus en plus nombreuses à se retrouver accusées. D'ailleurs, en une année seulement, 645 d'entre elles ont commis des meurtres soit avec du poison, soit en utilisant des couteaux ou même des haches. Pour les différents spécialistes en sociologie, les causes de cette montée en flèche des crimes en Algérie sont à lier directement avec la mondialisation qui a induit «un changement social violent en face duquel le citoyen algérien se trouve totalement démuni». Certains affirment que les années de terrorisme qu'a vécues l'Algérie à son corps défendant ont permis l'émergence d'une permissivité qui a été mise à profit par les différentes catégories de délinquants pour, d'un côté, s'enrichir de façon rapide mais illicite et, de l'autre, donner libre cours aux pulsions malsaines qui se trouvent enfouies au plus profond de l'âme de beaucoup de personnes. Bien sûr, les différentes études présentées n'omettent pas de signaler la déperdition scolaire de milliers d'adolescents qui quittent brusquement l'école et se retrouvent dans la rue, un avenir noir et bouché devant eux. Il y a aussi la pauvreté qui touche le tiers de la population algérienne, dont plus de 100.000 sont proches de la famine, alors qu'à Alger seulement, nous trouvons plus de 13.000 mendiants dont la majorité sont des personnes âgées. Pour faire face à cette montée du crime en Algérie, beaucoup préconisent la création de cellules d'écoute en direction des personnes en danger moral, la prise en charge efficiente des cas de tentative de suicide en installant un comité de suivi. D'autres, estiment les études faites dans ce sens, sont insuffisantes et qu'il convient de les multiplier en facilitant la recherche de l'information juste pour tous. L'école, la famille, la justice sociale, l'égalité des chances ont été mises en exergue comme pouvant influer positivement sur le comportement social de chaque individu, alors que le côté préventif dans l'éducation de chacun a été particulièrement cité dans plusieurs interventions.