Après le chef de file du FLN qui découvrait il y a peu que l'argent et la corruption «ont pourri» la sphère politico-partisane, c'est au tour d'un ténor du RND, Miloud Chorfi, de nous faire le même constat. La prise de conscience du mal par les deux hommes est bien tardive. Ils donnent l'impression de ne s'être rendu compte de cette gangrène dont est atteinte la classe politique qu'à l'occasion des tractations et marchandages qui ont terni le climat des sénatoriales, dont le scrutin se déroulera mercredi. Ce qui est proprement incroyable, s'agissant de deux «vieux briscards» du milieu politico-partisan, qui plus est, au fait des arcanes et pratiques de celui-ci par les postes d'observation qu'ils y occupent. Contrairement à Belkhadem, Miloud Chorfi ne s'est pas contenté de déplorer et stigmatiser l'état de fait qui caractérise le microcosme politique. Il a suggéré d'agir contre cette situation en proposant que s'engage «une réflexion en vue de mettre en place un mécanisme législatif pour lutter contre ce nouveau genre de corruption qui prend de l'ampleur et créer un front national composé de toutes les formations politiques pour barrer la route à ces aventuriers». L'idée n'est pas mauvaise. Mais nous croyons nous souvenir qu'elle n'est pas nouvelle. Cela fait un bail qu'il est question d'un projet de révision des lois électorales et sur les partis en vue de moraliser l'espace et la pratique de la politique. Louiza Hanoune et le PT en ont encore récemment revendiqué la mise en oeuvre suite aux démêlés qu'ils ont eus avec le président de l'Assemblée nationale autour de la question des salaires de leurs députés. Mais nous n'avons pas entendu le FLN ou le RND en faire la demande. C'est qu'il est une forme de corruption qui a arrangé leurs affaires, celle qui provoque la transhumance à leur avantage d'élus d'autres chapelles partisanes. C'est un secret de Polichinelle que la pratique du «débauchage» d'élus d'autres formations est une stratégie cyniquement appliquée tant par l'ex-parti unique que par le RND. Il n'y a aucune explication à fondement doctrinal pour les désertions d'élus qui se produisent cycliquement et souvent au profit de ces deux partis. Elles sont la conséquence d'une corruption qui n'est pas d'ordre financier uniquement. La promesse d'une candidature à l'élection pour telle ou telle échéance électorale en est souvent la cause. Quand un parti accepte de recourir à cette révoltante pratique et s'ouvre par conséquent à des personnages sans conviction et sans foi, capables de passer d'une formation à une autre uniquement pour assouvir leur ambition personnelle, il est mal venu de tempêter contre la corruption et le pourrissement de la classe politique. Il est vrai qu'il y a nécessité et urgence d'une législation en vue de freiner la corruption qui gangrène notre corps politique. Mais c'est aux partis eux-mêmes d'abord à faire barrage à cette corruption. Et cela en nettoyant devant leur portes d'abord et en refusant que n'importe qui, parce qu'il a de l'argent ou est un rallié opportuniste, rejoigne ses rangs et prétende à l'éligibilité sous son étiquette. La réticence de certaines formations à combattre les déviances qui ont cours dans l'exercice de l'engagement partisan est symptomatiquement de la tolérance compréhensive que celles-ci rencontrent en leur sein.