Une exposition de peinture de l'artiste plasticienne Adjal Rachida a lieu en ce moment à la galerie Lotus, à Miramar. Alors qu'initialement, le titre choisi pour cette exposition était : «Le monde à l'envers», l'artiste a, au dernier moment, décidé de le changer, préférant: «Le monde, selon Adjal Rachida» Tout un programme, qui donne déjà une idée sur la surprenante richesse que recèle le contenu de cette œuvre. « Le monde à lenvers», ce titre, Rachida aurait pule garder, car reflétant les contradictions du monde ici bas. Mais en le changeant, elle lui donne une touche personnelle, sa propre perception du monde, traduite par les couleurs, les formes et les idées qu'elles véhiculent. Cela dit, Rachida Adjal semble avoir changé de registre, optant pour l'expressionnisme, peut être plus à même de transmettre des idées que les oeuvres dites classiques. Le monde, puisque c'est de cela qu'il s'agit, s'élargit et les thèmes foisonnent. Un portrait est un portrait et une nature morte est en ne peut plus morte, et ne peuvent être interprétés autrement qu'en tant que tel. Mais une forme, plus des couleurs et les mouvements qu'elles suggèrent engendrent des idées, une perception du monde, une critique, voire un jugement, à la limite une opinion. Mais revenons au «monde». Tout d'abord, à peine jette-on un coup d'œil sur les toiles, que l'observateur remarque la place de haut rang que cette artiste attribue à la gente féminine. En effet, une grande partie des tableaux représente des femmes, du moins des silhouettes féminines. Mais en célébrant la femme, Rachida célèbre également l'homme. Cela dit, par ces formes, le visiteur peut voir se dessiner, de façon furtive, des images de fœtus, ou mêmes des silhouettes d'hommes. Et ce reflet, à peine apparent, n'est pas là de façon fortuite: c'est sciemment que l'artiste a réalisé ce petit jeu d'illusion, et cela dans le but de rappeler combien est important le rôle de la femme ; et que c'est toujours à partir de la femme que tout part, secondée, peut-être par l'homme. D'un autre côté, dans «le monde de Adjal Rachida», au-delà du registre de la femme, s'il y a un autre sujet qui est également mis sur un piédestal, c'est bien sûr celui du pays qu'elle vénère, à savoir l'Algérie. La terre, mère nourricière. D'ailleurs, l'artiste ne s'est pas gênée pour marier ces deux composantes, chères à son «monde», et le résultat obtenu n'en est que probant : par cette fusion, des tableaux sont nés représentant des silhouettes de femmes, avec des couleurs : blanc rouge et vert. La femme aux couleurs algériennes, en somme «Qu'on le veuille ou non, l'Algérie et la femme sont tout simplement indissociables, et l'Algérie ne peut aller nulle part sans la présence des femmes, c'est pourquoi l'idée m'est venue de faire de tels tableaux», nous explique-t-elle. Plus encore, afin de faire dans l'original, Rachida s'est amusée aussi à créer un tableau inspiré de la qualification de l'équipe nationale de football pour le mondial de cet été. Et pour réaliser cette toile, elle a ajouté, en plus des couleurs de l'emblème national, les couleurs jaune et noire, et cela afin de mettre l'accent sur le fait que l'Algérie est le seul pays à représenter, pour cette compétition, l'ensemble du monde arabe. Dans un tout autre registre, Adjal Rachida expose quelques toiles représentant la ville, selon sa propre perception. A ce propos, un jeu de contraste a été fait, où on admire, accroché à un mur, une toile représentant la ville pendant le jour ; et dans le mur parallèle, une toile à l'identique à ceci près qu'elle représente la ville pendant la nuit. Les seules couleurs utilisées pour exécuter ces tableaux sont le blanc et le noir, couleurs qui s'inversent selon le jour et la nuit Par ailleurs, l'artiste nous a avoué que deux des tableaux servant pour cette exposition ont été réalisés à peine la veille du «jour J», par une matinée d'inspiration ; elle a décidé alors de les inclure dans son exposition. Ces deux tableaux représentent des nus, thème qu'elle dit être récurrent dans son œuvre, mais elle a décidé de ne pas lui donner une grande part pour cette exposition et cela non pas par autocensure, assure-t-elle, mais seulement afin d'offrir au public d'autres facettes de son œuvre. Native de Souk El Ahras, Adjal Rachida a grandi à Oran. Après avoir fait quatre années à l'école des beaux arts d'Oran, suivies par deux années de formation de sculpture à Alger, elle s'est mise, dès l'âge de 17 ans, à exposer un peu partout ses œuvres. Elle a participé à un tas d'expositions, entre individuelles et collectives, elle a déjà exposé, notamment à Djelfa, Souk Ahras, Oran, Béjaïa, Tébessa et Alger. Comme projet d'avenir, elle compte participer le mois prochain, à l'occasion du 8 mars et du festival du poème féminin se tenant à Alger, à trois expositions dans la capitale. Par ailleurs, elle collabore également, à l'aide de ses toiles, à deux projets de livres, qui doivent paraître prochainement, l'un de Boulagnater Souad, et l'autre de Sadek Jamaoui. En somme, les thèmes de la ville, la femme, l'Algérie composent justement la perception du monde de Rachida Adjal.