Les déboires financiers de la Grèce ne cessent d'alimenter l'actualité, tandis que les inquiétudes à propos de l'avenir de la monnaie unique européenne-mise à mal par ces déboires-ne disparaissent pas. Il y a quelques jours, George Soros, l'homme qui avait fait vaciller la livre sterling au début des années 1990, a même prédit dans les colonnes du Financial Times que la crise grecque n'est pas la dernière épreuve que l'euro aura à affronter et que d'autres se profilent à l'horizon. Particularités grecques En attendant, la crise a permis de mettre en exergue certaines particularités grecques. On a ainsi beaucoup parlé de la comptabilité créative que les gouvernements grecs successifs ont utilisée au cours des dix à quinze dernières années. Une comptabilité très imaginative qui a permis, entre autre, à la Grèce de remplir de manière artificielle les critères exigés pour adhérer à la zone euro et qui, par la suite, lui a permis de cacher l'ampleur de sa dette et de son déficit public. De même, ces artifices braquent les projecteurs sur le comportement pour le moins ambigu de la banque d'affaires Goldman Sachs qui a aidé le gouvernement grec à «arranger» ses comptes et qui, dans le même temps, a spéculé contre l'euro. De quoi prouver une nouvelle fois la règle qui veut que, quoi qu'il arrive, les banques d'affaires s'arrangent toujours pour tirer leur épingle du jeu… Mais l'ampleur de sa dette a aussi poussé les commentateurs à se pencher sur l'importance des dépenses militaires de la Grèce. Il est vrai que les chiffres sont impressionnants. Ces dépenses ont atteint 6 milliards d'euros en 2009 et progressent chaque année de 6,6%. Rapportées au Produit intérieur brut (PIB), elles atteignent une part de 2,8% contre une moyenne européenne de 1,7%. Parmi les pays de l'Union européenne, la Grèce est ainsi le pays qui dépense le plus d'argent par rapport à la richesse qu'il crée et le deuxième de l'Otan derrière les Etats-Unis. Cela se retrouve aussi dans les effectifs de la Défense qui représentent 2,9% de la population active grecque (1,1% en moyenne pour les pays de l'Otan). La rivalité régionale avec la Turquie explique ces dépenses et pourquoi la Grèce, comme son rival turc, fait partie du top cinq en matière de dépenses militaires avec les Etats-Unis, l'Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis. Mais le plus étonnant dans l'affaire, c'est que nombre de pays qui reprochent à la Grèce son laxisme budgétaire sont aussi ses fournisseurs de matériel militaire. C'est le cas de la France, dont la Grèce est le troisième client pour le matériel militaire, qui ambitionne toujours de vendre des avions de chasse de type Rafale aux forces aériennes grecques. Retour à la raison ? Cette crise budgétaire pourrait donc obliger les autorités grecques à faire preuve de raison et à diminuer leurs dépenses militaires. A moins que cela ne se traduise par un maintien du budget de la Défense au détriment d'autres dépenses, notamment sociales. A ce titre, les pays membres de la zone euro, qui sont aussi les fournisseurs de la Grèce, ne sont peut-être pas les meilleurs interlocuteurs de la Grèce, contrairement au Fonds monétaire international (FMI), qui serait certainement le mieux placé pour demander à Athènes de tailler dans ses dépenses militaires.