Etre autiste, en Algérie, est encore un combat inégal contre une maladie qui reste méconnue, mais aussi et surtout contre toute une société et ses préjugés. L'arrivée d'un enfant autiste perturbe toute la vie familiale. Il faut s'organiser autrement pour accueillir cet enfant au comportement différent. D'ailleurs, parfois les proches ne le comprennent pas toujours et sont plus distants avec les familles concernées. Les parents vont aussi devoir se battre pour trouver un lieu d'accueil. L'enfant autiste peut aller à l'école, mais les parents doivent se mobiliser pour qu'il soit scolarisé comme les autres. La prise en charge thérapeutique est, quant à elle, loin d'être totalement efficiente, les centres spécialisés étant inexistants à ce jour, sans compter le manque de personnels spécialisés. Pour les enfants malades et leurs parents, le traitement reste un véritable parcours du combattant. Du côté des pédopsychiatres, on souligne tout d'abord que cette maladie, très méconnue du grand public, n'est pas incurable, comme beaucoup le croient. Toutefois, un engagement franc de la part des pouvoirs publics, appelés à mettre les moyens matériels et humains, reste indispensable pour assurer une prise en charge efficace. Une attention toute particulière au diagnostic précoce de la maladie est aussi fortement recommandée. A l'heure actuelle, et selon les estimations des spécialistes, il y aurait, en Algérie, près d'un million de personnes souffrant d'un handicap mental dont environ 4 %, soit près de 40.000 enfants, adolescents et adultes compris, qui sont autistes. Un chiffre à prendre avec beaucoup de précaution, selon Melle Melikoche, vice-présidente de l'association des autistes d'Oran (AAO), car, précise-t-elle, ce chiffre ne traduit pas de recensement réel effectué sur le terrain par les autorités compétentes. Selon la militante, qui est orthophoniste de profession, actuellement, il y a seulement trois centres à travers le territoire national pour la prise en charge des malades. Et encore, il ne s'agit pas de centres spécialisés, dédiés exclusivement à l'autisme, mais plutôt de services de pédopsychiatrie. Le plus important de ces centres est celui géré par le professeur Ould Taleb à Kouba. Il y en a un autre à Chéraga et un troisième à Blida. Ceci dit, précise Melle Milikoche, deux projets de centres spécialisés sont programmés, par le ministère de la Solidarité, dont un à Tlemcen, qui devra ouvrir ses portes aux malades en septembre prochain et un autre à Alger. Mais actuellement, les malades qui fréquentent les services de pédopsychiatrie de Kouba, Blida et Cheraga, parcourent parfois, des milliers de kilomètres pour une simple consultation chez un pédopsychiatre. Et souvent, lorsque l'on diagnostique la maladie chez l'enfant, on ne lui trouve pas de place au niveau de ces trois centres qui sont complètement saturés. Si l'on considère qu'une prise en charge d'un autiste nécessite entre trois et six ans, on peut facilement imaginer toute la difficulté que rencontrent les malades et leurs parents à soigner leurs enfants. C'est dans ce contexte, qu'évoluent actuellement les associations de malades dont l'apport reste plus que salutaire pour le soutien psychologique des familles. Expliquer et informer les parents sont deux maîtres mots, adoptés par ses associations, notamment l'AAO, qui envisage, pour le 1er juin prochain, à l'occasion de la journée de l'enfance, d'organiser des portes ouvertes pour sensibiliser les professionnels de la santé et l'opinion publique sur l'importance de la prise en charge précoce des enfants autistes avec comme objectif, l'intégration sociale de ces enfants, notamment à l'école. A Oran, la première classe pilote d'enfants autistes en Algérie vient d'être créée par une école privée, ce qui reste, selon la vice-présidente de l'AAO, un pas très encourageant pour l'avenir. Pour rappel, l'autisme désigne un ou des troubles envahissants du développement (TED) affectant la personne dans trois domaines principaux (la «triade autistique» de Lorna Wing) : les anomalies de la communication orale et/ou non verbale, les anomalies des interactions sociales, et les centres d'intérêts restreints.