Après le remaniement gouvernemental opéré par le chef de l'Etat et rendu public vendredi soir, rien dans les changements et les mouvements auxquels il a donné lieu à la tête de certains départements ministériels n'a contredit, à notre point de vue, le fond de notre commentaire paru jeudi sur le sujet, à savoir qu'une opération de ce genre n'impactera nullement sur le contestable mode de gouvernance en vigueur dans le pays. Nous persistons donc et signons sur la même opinion, d'autant que le remaniement qui vient d'avoir lieu laisse en l'état le socle fondamental de l'équipe gouvernementale que coordonne Ahmed Ouyahia. En maintenant en poste la plupart des ministres de cette équipe, Bouteflika a clairement exposé sa volonté de continuer à faire confiance à celle-ci, même si son action ne s'est pas traduite pas un bilan des plus reluisant. Il en a quelque peu remodelé les contours en excluant des figures ayant eu le tort de se retrouver éclaboussées par de retentissants scandales, tel le ministre de l'Energie Chakib Khalil, ou d'avoir trop mal géré des dossiers dont ils ont eu la charge, tels les ministres du Commerce, de l'Information et des Télécom ou le secrétaire d'Etat à la Communication. A cela près donc, le chef de l'Etat a jugé que l'équipe Ouyahia n'a pas démérité, quoi qu'en pense contrairement l'opinion publique. Si, par conséquent, le remaniement a fait évènement, ce n'est pas parce qu'il serait annonciateur de changement ou d'innovation dans la vision et l'action gouvernementale. Mais seulement parce que Bouteflika aura surpris son monde en enlevant Zerhouni du ministère de l'Intérieur pour lui offrir le poste de vice-Premier ministre. Une nouveauté dont il est fait lecture qu'elle a été décidée avec le calcul d'enlever à Ouyahia le peu d'autorité ou de pouvoir qu'il conserve à la primature. Ce décryptage a du sens si l'on tient compte du fait que les rapports entre Bouteflika et Ouyahia ne sont pas basés sur la confiance. Il est en effet manifeste que leur compagnonnage, même s'il dure, n'a rien à voir avec ce sentiment mais avec celui du réalisme politique assumé par eux. Le rôle de Zerhouni, qui d'ailleurs a été le sien même en tant que ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur, va être de «coller» au plus près du Premier ministère, dont Bouteflika voit à tort ou à raison qu'il serait le centre possible d'agglomération de toutes les oppositions susceptibles de vouloir contrecarrer son plan ayant trait, le moment venu, à sa succession. Tout cela est évidemment non dit et la promotion de Zerhouni est officiellement présentée comme ayant été décidée pour «alléger» le Premier ministre d'un certain nombre de dossiers et lui permettre ainsi de se consacrer à la coordination et au suivi de la mise en œuvre de l'ambitieux plan de développement 2010-2019. Sauf que les Algériens savent bien en réalité que même pour ce volet, Ouyahia est pratiquement tenu à la marge, du moment que le Président s'adresse pour l'essentiel, quand il a des orientations à faire ou des instructions à donner, directement aux ministres concernés.