La justice a rendu, hier, son verdict dans l'affaire Sonatrach Aval. Après une semaine de délibéré, le jugement a été prononcé par le tribunal de première instance d'Oran : une condamnation et cinq relaxes. En effet, sur les six cadres mis en cause dans cette affaire ayant trait à des marchés publics, seul l'ex-directeur de l'administration générale (DAG) de Sonatrach Aval, répondant aux initiales de Ch.H., a été déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés et condamné à une peine de 3 années d'emprisonnement, assortie d'une amende. Les cinq autres accusés, des membres de la commission d'évaluation des offres commerciales relatives au marché d'approvisionnement en articles bureautiques de fin d'année 2009, ont été, quant à eux, déclarés innocents et ont bénéficié de la relaxe pure et simple. Ces derniers - à l'exception de la secrétaire de la dite commission qui, elle, était placée sous contrôle judiciaire tout au long de la procédure- ont retrouvé la liberté, hier après-midi, après plusieurs mois d'incarcération. La lecture du verdict, en milieu de matinée, par la juge a été suivie instantanément d'une explosion de joie dans la salle. «Ce n'est que justice faite», observait, l'air serein, maître Ali-Chaouch Rachid, le conseil de l'un des accusés, entouré par une foule en liesse dans le grand hall jouxtant le prétoire. Une fin plutôt calme pour une affaire tumultueuse, qui a éclaté sur fond de scandales en cascade qui ont secoué le groupe Sonatrach. Au cœur du dossier, une transaction douteuse: près de trois milliards pour l'achat d'agendas, de blocs éphémérides, de stylos et autres articles de bureautique et papeterie pour la fin d'année 2009. Ce n'est néanmoins pas la manne allouée à cette fourniture qui a suscité la suspicion que la façon avec laquelle a été gérée cette opération, notamment le fait d'avoir réintégré dans la liste deux soumissionnaires dûment écartés par la commission d'évaluation des offres techniques. En effet, selon les faits consignés dans l'ordonnance de renvoi, la commission d'évaluation des offres financières a, lors de sa réunion du 13 décembre 2009, sciemment fait fi du procès-verbal dressé par la commission d'évaluation des offres techniques, présidé par le directeur des moyens généraux, lequel document faisait état de six soumissionnaires retenus après la disqualification motivée des deux opérateurs en question. Au lieu de se référer à ce PV définitif, conformément à la réglementation, la commission d'évaluation des offres commerciales s'est basée sur un autre PV rédigé par sa secrétaire et qui comprenait une liste de huit soumissionnaires. Aussi bien devant le juge d'instruction qu'au cours du procès, tous les intervenants à la barre étaient unanimes sur le fait que c'était le DAG qui avait ordonné la reconduction des deux noms radiés au prétexte que ceux-ci avait formulé, verbalement, un recours qui avait été jugé recevable dans la forme et approuvé dans le fond. Un artifice, puisque seule la commission des recours, qui, étrangement n'avait d'existence que sur papier, est habilitée à statuer sur les recours. L'un des deux soumissionnaires qui ont «ressuscité» s'est même adjugé la part belle du marché, en raflant deux des quatre lots de la fourniture. L'autre gros chapitre du dossier d'accusation, dont on n'a pourtant pas ou si peu parlé au procès, concerne le marché relatif à l'ameublement du siège d'Aval Sonatrach à Oran, conclu en août 2007, avec un opérateur français «Baltis» pour un coût de près de 67 millions de DA. Là aussi, le DAG endossait une grande part de responsabilité dans cette opération controversée, selon l'accusation. Il est à rappeler que les accusés avaient comparu devant le tribunal, le 26 juillet, pour répondre des chefs d'accusation de passation de marché en violation de la législation et la réglementation en vigueur, octroi de privilèges injustifiés à autrui et mauvais usage de fonction, articles 26 et 33 de la loi 02-06 sur la prévention et la lutte contre la corruption. Le Groupe Sonatrach, par la voie de son avocat, avait souligné qu'il n'avait déploré aucun préjudice dans cette affaire, renonçant au droit de constitution de partie civile. Le parquet avait, pour sa part, requis la peine maximale prévue par la loi contre les accusés tout en bloc, à savoir dix ans d'emprisonnement.