Deux mois avec sursis et un an d'inéligibilité ont été requis, jeudi à Paris, contre le chef de l'extrême droite française Jean-Marie Le Pen pour provocation à la haine pour avoir diffusé des affiches de campagne jugées offensantes à l'encontre des musulmans et de la population algérienne. Le procureur a également demandé au tribunal correctionnel de Paris de condamner le président du Front national (FN) à une amende de 20.000 euros. Le jugement a été mis en délibéré le 2 décembre. L'affiche litigieuse avait été diffusée en février 2010, lors de la campagne des élections régionales, par le mouvement de jeunesse du FN, en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, puis sur plusieurs sites internet. Titrée «Non à l'islamisme», elle représentait une femme intégralement voilée à côté d'une carte de France, recouverte du drapeau algérien, sur laquelle se dressaient sept minarets en forme de missiles. A l'audience, l'avocat de Jean-Marie Le Pen, absent à son procès, Me Wallerand de Saint-Just s'est saisi des récentes menaces du chef d'Al-Qaïda, Oussama ben Laden, contre la France. «Nous sommes aujourd'hui menacés par l'islamisme (...) Est-ce que vous allez dire, dans votre jugement, qu'on ne peut plus montrer d'opposition à l'islamisme? Faites très attention...», a mis en garde l'avocat, en s'adressant au tribunal. Durant sa longue plaidoirie, le défenseur du FN n'a cessé d'affirmer que l'affiche litigieuse disait «Non à l'islamisme» et pas à l'islam. «C'est un procès d'intention à M. Le Pen!», s'est-il indigné, en se faisant le chantre de la religion musulmane: «Vouloir nous faire dire dans votre jugement que l'islamisme c'est la même chose que l'islam, c'est un scandale!» De son côté, l'un des avocats de l'association SOS Racisme, Me Antonin Lévy, a indiqué qu'il était trop facile de dire qu'on ne vise pas les musulmans parce qu'on y a inscrit «islamisme». Jean-Marie Le Pen, 82 ans, a en grande partie bâti sa carrière politique sur un discours populiste et anti-immigrés qui lui avait permis, en 2002, d'atteindre le second tour de l'élection présidentielle. Le 12 mars dernier, Le Pen a été condamné à retirer les affiches de sa campagne des régionales. Dans son ordonnance, le juge marseillais a estimé que «cette affiche est non seulement de nature à provoquer un sentiment de rejet et d'animosité à l'encontre d'un groupe de personnes dont sont visées les pratiques religieuses, les femmes et la nationalité, mais en outre s'adresse essentiellement à la jeunesse, de nature plus influençable». «Cette affiche provocatrice est constitutive d'un trouble manifestement illicite», poursuivait l'ordonnance qui a condamné le FN et M. Le Pen «à faire procéder à son retrait de tous les supports sur lesquels elle a été placée, de quelque nature qu'ils soient dans un délai de 24 heures (...) puis sous astreinte de 500 euros par jour de retard». La diffusion de cette affiche avait suscité des «protestations» de l'Algérie.