Pour des raisons d'éthique et de déontologie et par respect à mon rang magistral (maître de conférences classe A, enseignante en licence, en magistère et directrice de travaux de recherches à l'université de Blida), je me limiterai, dans ce texte, à rétablir certaines vérités scientifiques et à apporter quelques mises au point et mises à jour au sujet des données rapportées par Madame le Professeur Zellal dans son écrit intitulé «À propos de la publication intitulée «l'aphasie de l'enfant», OPU 2008 », daté du 27/12/2010. Les éreintements dont j'ai fait l'objet sont saugrenus et ne marquent que le manque de discernement de son auteur et surtout sa hargne éprouvée envers toute personne choisissant de prendre son essor sans chaperon. Chaque travail de recherche est sujet à des controverses qui, grâce à elles naissent les théories et se développent les connaissances. C'est pourquoi il aurait été plus judicieux de commenter et de critiquer mon œuvre dans une revue spécialisée reconnue comme le suggère notre statut d'enseignant-chercheur. Hélas, vu les circonstances, je me réserve le droit de répondre dans Le Quotidien où l'auteur a étalé son «savoir» qui, toutefois, demeure théorique et banal. Par aphasie de l'enfant, on désigne un trouble du langage qui survient au cours de l'acquisition de cette fonction, à la suite d'une lésion cérébrale focale. Ce syndrome soulève de nombreuses difficultés que j'ai abordées dans mon ouvrage publié en 2008 par l'OPU (organisme sérieux et reconnu, n'éditant que des œuvres préalablement évaluées et expertisées). Ce livre, premier ouvrage algérien ayant traité de l'aphasie de l'enfant et second dans la littérature francophone, est une contribution au développement de l'aphasiologie infantile, notamment de l'aphasiologie algérienne puisque mon étude a été consacrée à l'enfant aphasique algérien. Mon approche neuropsychologique cognitive modulaire de ce syndrome a non seulement permis une meilleure compréhension de la sémiologie aphasique chez l'enfant algérien âgé de 5 à 13 ans, mais aussi une description de quelques signes cliniques jusque-là non répertoriés dans la littérature. Mais le point ayant fait l'objet de nombreuses diatribes dans le texte de Mme Le Professeur Zellal concerne l'évaluation de ce syndrome. La littérature nous renseigne que dans le passé, on utilisait des tests et des batteries de tests destinés à l'adulte pour évaluer l'aphasie de l'enfant, ce qui rendait les résultats difficilement interprétables. Aujourd'hui, plusieurs tests et batteries de tests ont été développés aux USA et en Europe. Cependant, le problème persiste encore dans notre pays puisque nous ne disposons quasiment pas de mesures étalonnées, répondant aux normes psychométriques d'un bon test (fidélité, sensibilité et validité). Face à cette situation de malaise', des psychologues orthophonistes improvisaient des épreuves et d'autres recouraient à des tests pour adultes entre autres l'examen de l'aphasie de Ducarne ou celui de Zellal adapté en langue arabe. Toutefois, la passation de l'un ou de l'autre à l'enfant soulève une multitude de contraintes méthodologiques. L'administration de l'examen de Ducarne -tel qu'il a été conçu- ne peut être justifiée vu les différences socioculturelles entre les milieux algérien et français. Par ailleurs, il est difficile d'évaluer un enfant à l'aide d'un instrument destiné à l'adulte (erreurs d'interprétation d'où de diagnostic déjà soulignées dans la littérature), car s'adresser à un enfant implique obligatoirement la prise en compte d'un aspect évolutif, d'une dynamique de progression et de transformation. Par ailleurs, la passation du test adapté en langue arabe par Mme Le Professeur Zellal à un enfant aphasique test non-étalonné à l'enfant algérien - aboutirait à des résultats relatifs puisque d'une part, il est destiné à l'adulte (différences intellectuelles entre l'enfant et l'adulte) et d'autre part aucun score de référence préalablement établis n'est mis à la disposition de l'examinateur. Si l'auteur de cette adaptation a effectivement procédé à un étalonnage comme elle le souligne dans son papier-, ne pas le mentionner constitue une erreur méthodologique car le chercheur se doit d'être précis et rigoureux dans sa démarche notamment lorsqu'il s'agit d'un travail universitaire. Elle est donc tenue de faire une description exhaustive de sa méthodologie et de rapporter toutes les étapes y compris l'étalonnage même si elle juge que «l'étalonnage d'un test n'a pas besoin d'être rapporté dans un travail universitaire, du fait qu'il s'agit d'un travail de routine qui ne sollicite pas d'effort de réflexion scientifique». Or, scientifiquement parlant, l'étalonnage constitue une étape indispensable dans l'élaboration et/ou dans l'adaptation d'un test. C'est pourquoi des précautions méthodologiques sont nécessaires précautions soulignées dans la littérature arabophone, francophone et anglo-saxonne et enseignées déjà en L2-. Rappelons que le test est, par définition, «un examen standardisé dans son matériel, son administration et sa cotation, il permet d'évaluer pour un sujet donné le comportement obtenu (la réponse) en la comparant statistiquement aux réponses obtenues à cette même épreuve dans une population de référence ; chez l'enfant la population de référence appartient à la même classe d'âge et peut-être même décrites en fonction d'autres critères (niveau socioculturel de la famille, cursus scolaire )». (Chevrie-Muller, 2007 -conceptrice de plusieurs tests et batteries de tests de langage destinés à l'enfant). Autrement dit, l'évaluation d'un sujet ne peut se faire sans se référer à un étalonnage si non, comment connaitre la «fourchette » dans laquelle se situent les performances à un âge donné ? Si, aujourd'hui, les psychologues algériens ne recourent pas à l'étalonnage lors des évaluations c'est pour des raisons comme l'absence de scores de référence adaptés à la population algérienne et non pas par inanité ou méconnaissance de la méthode des tests. Par ailleurs, le clinicien du langage n'est pas sans savoir que l'exploration du langage s'adresse aussi bien aux aspects formels qu'aux capacités de communication. Ne pas en tenir compte signifie, comme le souligne bien Chevrie-Muller (2007) dans «le langage de l'enfant : aspects normaux et pathologiques» paru aux éditions Masson-, une méconnaissance de la dualité «aspects formels du langage/capacité de communication». Autrement dit, l'exploration du langage repose sur une évaluation à la fois quantitative et qualitative. Sur ce point, il est clair que la lecture du chapitre de l'ouvrage en question faite par Mme Le Professeur Zellal est superficielle voire futile car, en plus de la cotation que j'ai proposée aux épreuves formelles entre autres la dénomination', une interprétation des résultats (déficits observés et fonctions préservées) est proposée et ce, dans une perspective de la neuropsychologie cognitive modulaire. A ceci s'ajoutent les principes développementaux et génétiques de la conception des mesures. En accord avec Pichot (1999), il confirme, dans son ouvrage sur les tests mentaux, que les tests vieillissent et nécessitent un réétalonnage car les variables prises en compte lors de leur construction changent au fil du temps. Il est donc clair que la révision de cours obsolètes datant des années 80 ne s'avère d'aucun intérêt scientifique. Mon expérience professionnelle, de près de 16 ans, en qualité de psychologue orthophoniste dans un établissement hospitalier spécialisé, dépasse largement le contenu des quelques cours assurés par Mme Le Professeur Zellal en SDC (1988-1989) -seul module qu'elle m'a enseigné durant mes quatre années de licence de psychologie option orthophonie. En conclusion, à la différence du dogme, la science est ouverte à la critique et les connaissances scientifiques ainsi que les méthodes sont toujours sujettes à la révision. Le scientifique se doit de respecter la liberté de pensée d'autrui et d'encourager les initiatives de ses collègues même si ces derniers furent jadis ses étudiants. Ce sont les divergences d'opinions qui constituent les sources d'opportunités et les points de force de l'orthophonie. Restons modestes et laissons nos successeurs parler de nous comme nous le faisons aujourd'hui de Broca, de Wernicke, de Déjerine, de Borel-Maisonny, de Piaget, de Van Hout, de Hadj Salah Nul n'est détenteur du savoir et comme le dit bien Victor Hugo: «le savant sait qu'il ignore». *Ex-psychologue orthophoniste praticienne -Docteur de psychologie - Université de Paris VIII- Habilitation universitaire - Université d'Alger -Responsable de formation de licence de psychologie option orthophonie (LMD) Directrice de recherches - Département de PSEO - Université Saad Dahleb Blida