Les praticiens de la Santé (médecins généralistes, pharmaciens, chirurgiens-dentistes) et spécialistes observent, depuis hier, une grève illimitée à laquelle ont appelé leurs syndicats respectifs, le SNPSP et le SNPSSP. Contacté hier, Lyes Merabet, président du syndicat des praticiens de la Santé publique a affirmé que «l'appel du syndicat a été largement suivi pour cette grève», indiquant que «le taux de suivi est important et se situe au-delà de ce qu'on a espéré». Cette grève, pour rappel, a été l'initiative des praticiens qui ont déposé leur préavis de grève illimitée le 8 mai dernier et qui a été précédé d'une réunion de conciliation, le mardi 11 mai, avec le ministère de tutelle, mais qui n'a abouti à aucun résultat palpable. Autrement dit, le SNPSP et le ministère ne se sont pas entendus pour éviter la grève. Les praticiens publics insistent sur deux points importants, à savoir : la promulgation de leur statut particulier tel qu'il a été élaboré et amendé lors des travaux de la commission mixte (ministère de la Santé et SNPSP). Le deuxième point est relatif au régime indemnitaire. A noter également que le ministère avait pour argument, la déclaration du ministre sur les augmentations avoisinant les 80%. Là encore, le SNPSP a exigé une copie de ces augmentations que le ministère leur a refusée, sous prétexte de sa publication dans le Journal officiel. La réaction du SNPSP n'a pas tardé, puisque vendredi dernier, lors d'un point de presse, Lyes Merabet a décortiqué les augmentations en concluant «qu'il ne s'agit absolument pas de véritables revalorisations». Selon lui, «il s'agit d'augmentations variant entre 25 et 48%». Et de déplorer que « ces augmentations sont plutôt le résultat d'un gonflement hypothétique de primes». A ce propos, le ministre de la Santé avait saisi l'occasion pour montrer tout l'optimisme découlant des augmentations, en déclarant que «les salaires des praticiens ont été suffisamment augmentés et que le fait d'aller à la grève ne se justifie pas». Pire encore, les praticiens de la Santé voient en la déclaration du ministre de la Santé, à la veille de l'entame de la grève, «une sorte de lynchage contre les praticiens de la Santé publique». Pour ce qui est du syndicat des spécialistes, le Dr Yousefi a déclaré que «la grève a été suivie avec un taux d'environ 65%, avec un taux record à l'ouest du pays de 80%». Toutefois, les syndicalistes de la Santé publique en grève ont fustigé les propos du ministre sur la grève. En effet, Djamel Ould Abbès a traité les protestataires de «rouler pour des intérêts occultes». Une grave accusation, selon Lyes Merabet, qui précise à l'occasion que «le syndicat des médecins est une structure indépendante et ne défend que la corporation des médecins». Contrairement à l'affirmation du ministre, Lyes Merabet, estime que la tutelle «laisse les choses pourrir au lieu de chercher une issue satisfaisante et d'appeler au dialogue constructif en arrêtant de brandir les menaces à l'encontre des praticiens». Même son de cloche chez les spécialistes de la Santé publique dont le président Mohamed Yousefi qualifie les propos du ministre «d'insultants». Les revendications, poursuit-il, des spécialistes pour lesquels ils se sont mis en grève ont été «carrément mises de côté» pour ne parler que «de grève illégale» selon la formule du ministre. En attendant, les principaux points des revendications du SNPSSP n'ont pas été réglés. Il s'agit de la promulgation de leur statut amendé, le régime indemnitaire, la mise en conformité de la prime d'intéressement en fonction du grade, l'organisation du concours pour l'accès au titre d'hospitalo-principal, l'application des mesures incitatives pour les zones enclavées (accès au logement) et l'abrogation du service civil). A Oran, la grève initiée, à partir d'hier, par le SNPSP et le SNPSSP n'a eu aucun impact et le taux de suivi a été presque nul. Une virée dans les structures et établissements sanitaires nous a permis de constater que l'activité médicale se déroulait normalement et tous les praticiens approchés estiment que cet appel à la protestation n'a pas découlé de la base et, de ce fait, l'adhésion à une grève jugée de «trop» par plusieurs concernés est suicidaire et son impact ne sera supporté que par les malades. D'ailleurs, soutient une praticienne, «contrairement au passé où l'information était distillée jusqu'aux adhérents de base, cette fois plusieurs confrères et consœurs n'ont eu vent de cette action qu'à travers la presse ou les forums de discussions». Sur les leitmotivs de cette grève, ils estiment que même si jusqu'à présent les dernières dispositions du nouveau régime indemnitaire restent encore mal cernées par les personnels concernés, il n'en demeure pas moins qu'à priori, des acquis non négligeables apparaissent et il faudra attendre les prochaines fiches de paie pour mieux apprécier. Aussi, ils estiment que l'action syndicale ne peut être efficiente que si elle s'inscrit dans la durée et, donc, le «tout ou rien» prôné par certains syndicats ne peut mener la corporation que dans l'impasse.