Vingt personnes composant l'une des ramifications présumées d'un réseau international de trafic de véhicules volés en Europe et introduits en Algérie, comparaissaient devant le tribunal criminel d'Oran. En raison de son caractère de «crime organisé», le dossier avait été instruit par le Pôle pénal spécialisé d'Oran. Il s'agit en fait du dernier maillon de la chaîne : falsification de papiers et revente sur le marché local. Pas moins de 266 voitures, haut de gamme pour la plupart, (et donc autant de vraies-fausses cartes grises), provenant de l'autre rive de la Méditerranée, via Marseille notamment, par vol simple, car-jacking (vol du véhicule moteur tournant), home-jacking (vol avec une copie de clés) ou détournement de location de voitures, ont été recensées par la section de recherche du groupement de la gendarmerie nationale de la wilaya d'Oran, dans le cadre de ses investigations sur cette filière de trafic. Le réseau avait, subsidiairement, un autre mode d'emploi : il achetait des voitures à bas prix à des propriétaires complices, qui déclaraient le vol pour percevoir la prime d'assurance. Ces véhicules étaient par la suite retapés, expédiés en Algérie à l'aide de passeurs grassement payés, remaquillés et ré-immatriculés avec la complicité de fonctionnaires de daïra puis revendus moyennant de vrais-faux documents. Le démantèlement de ce groupe remonte au mois de mai 2009. Agissant sur la base d'informations fiables faisant état d'un réseau de trafic de véhicules volés dans l'axe Oran/Relizane/Nâama, les services de SR de la gendarmerie nationale d'Oran ont pu remonter à la source principale du trafic : la daïra d'Es Sénia (Oran). 437 dossiers basiques seront passés au peigne fin. Résultat : 266 dossiers correspondant à des voitures de luxe (Mercedes, BMW, Volkswagen Touareg ) s'avéreront faux. Sept fonctionnaires de cette daïra ont été inculpés pour complicité et placés sous contrôle judiciaire. Quelques jours plus tard, quatre autres employés au service circulation des véhicules de la wilaya de Nâama, rejoindront leurs collègues d'Oran sur la liste des mis en cause. Les seconds rôles facilement cueillis, il fallait maintenant s'occuper des acteurs principaux. Le réseau sera infiltré. La filature, les interceptions téléphoniques, l'agent infiltré autant de techniques d'enquêtes qui ont permis aux gendarmes d'identifier un grand nombre des membres du réseau (une vingtaine), à leur tête un certain B.L., 48 ans, originaire de Msila, le supposé cerveau de la bande, connu sous le sobriquet «Le Rouget». C'est dans son domicile où se nichait l'atelier de contrefaçon : les enquêteurs y ont saisi un arsenal de matériels informatiques, toutes sortes de faux documents et spécimens (état civil, cartes grises, actes de vente de voitures, certificats de conformité des services des Mines, attestations de contrôle technique, vignettes automobiles, documents d'assurance véhicule, permis de conduire, plaques minéralogiques, bons d'essence, registres de commerce, passeports ainsi que divers sceaux et cachets contrefaits). Poursuivant ses investigations, le juge d'instruction a auditionné plusieurs dizaines de personnes impliquées -soit sciemment soit à leur insu- dans des transactions commerciales liées à ces voitures issues de la contrebande. Bien que la plupart d'entre eux aient acheté par acte de vente établi en bonne et due forme, ces individus ont frôlé le délit du «recel» non sans voir toutefois leurs véhicules acquis au prix fort (entre 180 et 400 millions» dans l'espoir de les récupérer. Le représentant du ministère public a requis la réclusion à perpétuité contre alias Rouget et deux ans contre le reste des accusés présents au box. A l'issue des délibérations, le principal accusé B.L a été condamné à 8 ans de détention. 17 autres mis en cause ont écopé entre 18 mois, 2 ans et 3 ans de prison, tandis que 2 autres ont été acquittés. A noter que la plupart des fonctionnaires de daïra avaient été mis hors de cause, au cours de la procédure à la faveur d'un non-lieu définitif, précise-t-on.