Le ministre de la Justice, garde des Sceaux est sorti de son silence, jeudi dernier, appelant les avocats d'Alger au dialogue. S'exprimant en marge de la séance plénière du Conseil de la Nation consacrée aux questions orales, au lendemain de la démonstration de force des robes noires qui ont marché à Alger, Tayeb Belaïz invite les contestataires à faire preuve de retenue en privilégiant le dialogue et la concertation. Il les appellera à éviter de recourir à d'autres moyens de contestation, faisant sans doute allusion à la marche de mercredi dernier, en affirmant qu'il était un « homme de dialogue ». Pourtant, les déclarations du ministre qui a tenté d'isoler le mouvement de contestation en lui conférant un cachet purement local, « il existe 15 barreaux au niveau national et la contestation se situe seulement au niveau du barreau d'Alger » sont à l'opposé des certitudes du bâtonnier d'Alger qui estime, pour sa part, que le rejet du projet de loi organique portant organisation de la profession d'avocat est national. Dans une déclaration antérieure à la presse, Me Sellini avait affirmé que la majorité des bâtonnats de l'Union nationale des barreaux d'Algérie « soutiennent le bâtonnat d'Alger dans sa position et demandent le retrait du projet », une annonce qu'il a réitérée au « Quotidien d'Oran ». Le président du bâtonnat d'Alger avait, en outre, menacé de battre le rappel de toutes les robes noires en Algérie pour durcir le mouvement de contestation. Tayeb Belaïz, insistant sur la souveraineté du Parlement dans ses décisions, a affirmé que le projet de loi contesté avait été soumis à l'APN, rappelant au passage que la commission des affaires juridiques et administratives et des libertés de l'Assemblée populaire nationale avait reçu le 9 juin dernier 15 bâtonniers. A propos d'un éventuel report dudit projet à la session d'automne, information officieuse relayée par le bâtonnat d'Alger, le ministre ne dira rien. En déclarant que « le Parlement est la meilleure tribune du dialogue serein qui traduit la volonté populaire », le ministre de tutelle botte en touche, histoire de dire que le dossier n'est plus entre ses mains. Mercredi 22 juin, les avocats d'Alger ont observé une journée de protestation paralysant les cours et tribunaux de la capitale après l'appel du conseil du barreau d'Alger mandaté par l'assemblée générale du bâtonnat d'Alger pour élaborer un rapport sur les démarches à effectuer pour contrecarrer l'adoption du nouveau statut de l'avocat, qualifié de « rétrograde » par les premiers intéressés. Pour le bâtonnat d'Alger, le projet est en contradiction avec les dispositions de la Constitution qui garantissent le droit à la défense. Le projet de loi organique portant organisation de la profession d'avocat avait été élaboré pour 10 ans, selon le ministre de la Justice. Une commission composée d'avocats notamment des bâtonniers et des magistrats avait été constituée à cet effet au niveau de la Cour suprême, sous la présidence d'un président de chambre au sein de cette instance. Cette commission avait travaillé pendant 4 ans pour l'élaboration de ce projet, a encore rappelé M. Belaïz. Pour le moment, et après la marche de mercredi dernier, d'autres actions seront probablement menées pour confronter la position du bâtonnat d'Alger, accusé de faire cavalier seul, et il n'est pas exclu d'assister à un « renfort » contestataire de quoi légitimer davantage le mouvement. Me Sellini avait déclaré que 8 bâtonnats étaient prêts à rejoindre la contestation. Alger compte quelque 5.385 avocats sur environ 30.000 avocats dans tout le pays.