Au cours du point de presse qu'il a tenu samedi à Bordj Bou Arréridj en marge d'un rassemblement des militants locaux du MSP, Bouguerra Soltani a de nouveau menacé de claquer la porte de l'Alliance présidentielle. Ce «coup de sang» contre l'alliance est devenu une récurrence chez le président du MSP, sauf que cette fois, il semble bien que l'idée de la quitter le taraude sérieusement. Au motif qu'il ne peut prétendre au rôle de fédérateur de la mouvance islamiste auquel il ambitionne tout en restant dans son sein. Car c'est à ça que Bouguerra Soltani aspire pour lui et sa formation, avec l'espoir de rééditer en Algérie les performances d'Ennahda de Ghannouchi en Tunisie, du PJD de Benkirane au Maroc et des Frères musulmans en Egypte. Trois segments du courant islamiste dont le MSP est proche du point de vue doctrinal. Sauf qu'il n'est pas évident qu'il va suffire au MSP de quitter l'Alliance présidentielle pour se voir reconnaître et légitimer le leadership du courant islamiste en Algérie par les autres démembrements de celui-ci. L'étiquette de parti à la remorque du pouvoir lui colle trop en effet sur le dos pour être oubliée par ces milieux à son retrait de l'alliance. D'ailleurs, l'écho suscité par ses appels à la fédération des partis islamistes en prévision de la toute prochaine échéance électorale a dû certainement faire mesurer à Bouguerra Soltani la part d'utopie dont est teintée l'ambition qu'il nourrit pour sa formation et lui-même dans la foulée. Abdallah Djaballah, qui fourbit son «come-back» politique en aspirant à jouer le rôle auquel prétend Bouguerra Soltani, et Fatah Rebihi, secrétaire général du mouvement Nahda, n'ont pas, c'est le moins que l'on puisse dire, l'intention de laisser le MSP et son président aller au bout de leur stratégie de rassemblement à leur profit du courant islamiste. A cela s'ajoute le fait que Soltani et sa formation sont en détestation irrévocable auprès de l'ex-base du FIS dissous. C'est pourquoi, pour aussi optimiste que semble être Bouguerra Soltani sur les échéances électorales du MSP, il hésite encore à consommer la rupture avec l'Alliance présidentielle, qu'il presse d'ailleurs d'instaurer un «partenariat politique» entre ses membres. Un partenariat dont le MSP espère bénéficier sous la forme d'un pacte électoral par lequel il espère préserver ce qui peut l'être pour lui à l'occasion des prochaines élections. Si l'Algérie est réellement en passe d'être affectée par la vague verte qui submerge le Maghreb et le monde arabe, comme le prédisent nombre d'observateurs, le MSP est le moins bien placé pour prétendre rafler la mise. Pour les islamistes et le reste de l'électorat, il est comptable, au même titre que le FLN et le RND, du bilan au pouvoir, et ce n'est pas en quelques mois d'opposition, aussi incisive qu'elle s'exprimera, qu'il va surmonter le lourd handicap qu'est pour lui d'avoir été dans la «collaboration» avec le pouvoir. D'autant que durant cette période, ses représentants dans les institutions et au gouvernement n'ont guère contribué à lui forger une image plus ragoûtante que celle que renvoient le FLN et le RND. S'il y a débat en interne au sein du MSP sur la question de savoir quelle va être sa stratégie à la lumière des chamboulements que provoque «le printemps arabe» en terme de perspectives, Bouguerra Soltani est en position de faiblesse pour rallier à sa vision et ses options. Le clan Menasra est en situation d'exploiter contre lui le fait d'avoir conduit le parti à l'impasse par opportunisme et sans perspicacité politique. Autant de facteurs qui rendent «l'optimisme conquérant» dont fait montre le chef du MSP peu crédible et sonnant faux.