Une possible percée du courant islamiste à l'occasion des prochaines élections législatives ne semble pas poser problème à Ouyahia en tant que patron du RND, parti dont l'allergie à ceux qui se réclament de cette mouvance est assumée sans ambages ni précautions sémantiques. De même, elle ne l'inquiète pas en sa qualité de Premier ministre. C'est en tout cas ce dont il a cherché à convaincre sous sa double casquette au cours de son intervention d'ouverture des travaux de la 5e session ordinaire du conseil national du RND. En tant que chef de parti, il a affirmé que le RND participera à ces élections «sans aucun sentiment d'exclusion ni d'hostilité pour quiconque ou envers aucune formation politique légitime» et qu'il respectera «les résultats quels qu'ils soient». En tant que Premier ministre, il a catégoriquement évacué que les résultats puissent déboucher sur la remise en cause du système républicain, ainsi que disent le redouter ceux qui sont alarmés par la perspective d'une arrivée au pouvoir par les urnes des islamistes. Pour Ouyahia, cette perspective est tout simplement impossible parce que le système constitutionnel en Algérie est «sécurisé». La première des sécurités étant que le peuple algérien «a tranché, à travers son plébiscite à la Charte pour la paix et la réconciliation, la question du retour à l'activité politique des responsables de la tragédie nationale», et qui sont les tenants de la remise en cause du système républicain. La seconde étant que la loi électorale, «en exigeant la majorité absolue sur les questions fondamentales, n'a laissé à aucun le monopole dans ce cadre en adoptant le mode de la proportionnelle dans les élections des assemblées élues». Ahmed Ouyahia ne s'est pas laissé aller à conjecturer sur ce que seront les résultats des prochaines élections législatives, comme l'a fait Belkhadem, son alter ego du FLN. Il a tout simplement donné à comprendre qu'ils donneront forme en Algérie à une coexistence entre les courants islamiste, nationaliste et démocratique, pour peu «qu'ils assument leurs devoirs et que la compétition politique soit autour des programmes». Ayant réitéré que la régularité et la transparence des prochaines élections seront «garanties» par les mesures prises, allant de leur supervision par la justice à la remise des procès-verbaux de dépouillement aux partis, en passant par la présence d'observateurs étrangers, Ouyahia a précisé que le RND allait y participer en ayant arrêté une stratégie basée sur quatre données qui sont : l'unité des rangs du parti, la crédibilité des candidats, l'espoir de convaincre les électeurs des propositions du RND et le respect des résultats quels qu'ils soient. Sur la première au moins, l'on peut avancer que la formation d'Ouyahia a, nous semble-t-il, fait pari tenu. Contrairement en effet au FLN, au MSP et à d'autres partis qui vont concourir à la compétition électorale, le climat organique au sein du RND se distingue par une sérénité apparente et la discipline à laquelle ses cadres et militants semblent s'être pliés. Le RND renvoie ainsi de lui l'image d'un parti conscient de l'importance des enjeux qui sont en question dans les prochaines élections législatives. Ce qui valorise du même coup celle de son chef, dont l'autorité apparaît de ce fait indiscutée et son aura a fortiori grandie, comparée à celle de son rival déclaré qu'est le premier responsable du FLN, qui, lui, voit la sienne s'éteindre, étouffée par le vent de contestation qui souffle contre lui dans les rangs de son parti. Sauf que l'on est seulement en période préélectorale et qu'il est donc hasardeux d'avancer que le RND est définitivement à l'abri des tempêtes que peuvent subitement provoquer les ambitions électorales déçues.