Dans la wilaya de Tlemcen, au cours de la campagne 2010/2011, la production de pomme de terre a atteint près de 2 millions de quintaux, sous l'effet conjugué de surfaces et de rendements en hausse, notamment dans les zones de Maghnia, Hennaya, Remchi, et Bensekrane, qui renferment des potentialités humaines, hydriques, édaphiques et climatiques énormes, et où la culture de la pomme de terre se concentre. Depuis le début de la campagne 2011/2012, les prix de la pomme de terre amorcent une forte remontée, que de nombreux spécialistes, professionnels et consommateurs n'arrivent pas à justifier et le prix de ce produit de large consommation a atteint 120 et 130 DA/kg. Au rayon des légumes, ce qui irrite les consommateurs est le fait qu'ils ont trouvé anormal que le tubercule s'écoule à ce prix très élevé et en plus dans une wilaya classée productrice, alors que dans d'autres wilayas il est cédé à des prix raisonnables. Plusieurs questions fondamentales persistent encore et toujours à Tlemcen. Pourquoi le ministère de l'Agriculture n'a pas actionné ses relais pour tenter de minimiser l'ampleur de cette hausse et rassurer pour les mois à venir ? Selon un fonctionnaire de la direction du Commerce, certains intervenants dans le circuit commercial, profitent de la situation pour augmenter les prix ou distribuer en petites quantités ce tubercule pour faire plus de bénéfices. « Ces légumes sont vendus dans certaines zones de production à un prix abordable par les agriculteurs. Arrivés sur les étalages des marchés, cet aliment primordiaux n'est plus à la portée des consommateurs à revenu moyen, alors qu'il n'est pas toléré d'augmenter les prix de façon illicite en faisant fi de la réglementation en vigueur. D'ailleurs, les opérations de contrôle ont relevé plusieurs infractions auprès des commerçants », commentera ce cadre. Celles-ci ajoutera-t-il, ne concernent pas uniquement la hausse illicite des prix, mais aussi le défaut d'affichage des prix et la non-présentation des factures d'achat, pour des raisons diverses. Et ce sont les consommateurs qui paient le prix fort pour pouvoir s'approvisionner en ce produit de base de l'alimentation du citoyen. Par ailleurs, un cadre de la direction de l'Agriculture a balayé d'un revers de main la rumeur selon laquelle d'importantes quantités de pommes de terre mises au frigo (chambres froides) ont été avariées. Hadj Kaddour, un ancien producteur de Hennaya, estime qu'à l'origine de cette situation, il y a la conjugaison de plusieurs facteurs : la pénurie et la cherté des semences qui se répercutent à terme sur la production et donc sur les prix. Alors qu'il se négocie habituellement entre 3.500 et 5.000 DA, le quintal de semences se situe entre 7.000 à 11.000 DA et atteint même chez des coopératives 12.000 à 14.000 DA du côté des intermédiaires. En outre, les producteurs se heurtent à un problème de taille, ces dernières années, le mildiou a fait des ravages. L'administration n'a pas aidé les fellahs touchés, pourtant des agents avaient visité les champs ravagés, mais jusqu'à présent, les fellahs n'ont jamais rien touché », dira-t-il, ajoutant que la forte demande sur le marché a contribué à accentuer la pénurie. Il préconise dans ce cadre, aux agriculteurs de « faire de ce produit, un produit phare du développement local, en instaurant un cahier des charges de production bien contrôlée et en maîtrisant la qualité. Les producteurs doivent se fédérer et constituer un syndicat de producteurs de pommes de terre. Pour une plus grande transparence chaque agriculteur sera identifié sur l'emballage, estampillé au logo de la pomme de terre de sa région». Un autre fellah de Maghnia expliquera que lorsque le prix de la pomme de terre flambe, ce sont rarement les fellahs qui en tirent profit, mais ceux qui stockent, c'est-à-dire les heureux propriétaires des chambres froides. Car les fellahs vendent leur production aussitôt après la récolte et parfois sous terre avant même la récolte. «C'est la seule solution pour nous, car nous sommes contraints de vendre cash pour rembourser les dettes et entamer la nouvelle campagne agricole», dira-t-il. Pendant que les barons de la pomme de terre continuent à tenir en otage la population. La ménagère continuera à payer la pomme de terre très chère ! Mais une simple question taraude les esprits des citoyens : où vont les milliards injectés par l'Etat pour le soutien de l'Agriculture ?