Deux ans et demi après son ouverture, l'incubateur du Cyberparc de Sidi Abdallah, situé dans la localité de Rahmania à l'ouest d'Alger, assume pleinement son rôle d'accompagnateur de porteurs de projet et de pépinière de startups. Retour, en plein été, dans l'œuf où se dessine en partie et en silence l'avenir des TIC en Algérie. En cette période de vacances d'été, les locaux se sont vidés. L'hémicycle en forme d'œuf n'abrite plus que quelques porteurs de projet motivés et travailleurs invétérés de startup. Répartis sur les 20.000 m2 du bâtiment, ils œuvrent à leur entreprise, future ou déjà existante. «En 2012, nous avons reçu 100 dossiers de porteurs de projets dans le domaine des TIC. Nous en avons retenu 33 dont 18 sont arrivés à la seconde étape qui est la phase d'incubation. L'aile des startups, quant à elle, accueille actuellement 12 entreprises créées il y a moins de cinq ans», explique notre guide et directeur de l'incubateur Karim Cheikh. Dans le silence de cette chaude fin de matinée de juillet, des voix jaillissent de l'une des salles réservées à l'accompagnement des porteurs de projet. Mohamed Rafik Chala, coach en management, y délivre ses enseignements à des étudiants en phase d'incubation. «Le processus d'incubation se déroule sur 30 mois. Les trois premiers mois sont ceux de la pré-incubation qui permettent aux porteurs de projet de se frotter au monde des affaires. A la suite de cette période, une commission d'évaluation externe juge si le projet est viable. Dans le cas échéant, il passe en phase d'incubation qui peut durer de 3 à 12 mois. Enfin, la troisième étape est celle de la post-incubation dont le passage est à nouveau soumis à une commission d'évaluation», décrit le formateur, lui-même chef d'entreprise. Startups en construction Parmi les 18 projets actuellement en phase d'incubation se trouvent, entre autres, l'idée de la création d'un espace social pour les entreprises ou d'une plateforme d'e-commande. Cette dernière est portée par Yacine Yadouz, diplômé en licence sciences commerciales au sein de l'Université des sciences économiques et de gestion de Dely Brahim. A 25 ans, il a déjà fondé «Numidia IT Business» qui conçoit, développe et assure la maintenance des applications et sites Internet pour des sociétés. Il a intégré l'incubateur de Sidi Abdallah en janvier 2012, après avoir participé à l'édition 2011 de «Startup week-end» et remporté la quatrième place avec son équipe pour un projet de vente de publicité sur le web. S'il accède à la post-incubation, Yacine aura l'obligation de créer son entreprise dans un délai d'un à trois mois. A partir de là, il bénéficiera d'un contrat de location gratuit pendant un an. «Après la fin des 30 mois du processus d'incubation, l'idéal est de réussir à intégrer la partie startup pour continuer de recevoir un accompagnement», conclut Mohamed Rafik Chala. L'aile consacrée aux startups est aussi silencieuse, seul l'îlot de la société de paiement en ligne epay.dz est en activité. Adlane Benabdallah en est le responsable juridique. «Nous nous sommes installés au sein de l'incubateur en septembre 2011, soit six mois après le lancement de notre plateforme», explique-t-il. Première entreprise en Algérie à s'être spécialisée dans le paiement en ligne, epay.dz, fondée par Mohamed Hamza, comptait 10.500 clients en mai 2012 et a comptabilisé en un an 180.000 visiteurs. Sa place au sein de l'incubateur d'Alger lui offre l'avantage de bénéficier pendant deux ans de conseils, des installations existantes tels que l'Internet et la cafétéria et surtout d'un loyer de 5000 dinars par mois. Et la progression semble au rendez-vous. La société négocie actuellement la mise en place du paiement des factures par Internet avec les grandes entreprises publiques du pays comme Sonelgaz, Seaal ou encore Algérie Télécom. Continuer le développement d'incubateurs régionaux Depuis la grande terrasse de la cafétéria, on peut voir les autres éléments du cyberparc : l'immeuble multi-locataire où sont installées 37 entreprises dont IBM, Algérie Télécom ou encore la Société de service en ingénierie et informatique local (SSII), ainsi que la tour en construction du futur Centre d'études et des recherches des TIC (CERTIC). «Les terrains alentour seront bientôt investis par de nouvelles entreprises», commente le directeur de l'incubateur Karim Cheikh. Ainsi se construit ce que l'Algérie souhaite voir devenir un véritable hub physique et virtuel des activités des technologies de l'information et de la communication. Mais l'ambition de l'Agence nationale de promotion et de développement des parcs technologiques (ANPT) ne s'arrête pas aux frontières d'Alger. Plusieurs cyberparcs régionaux ont été lancés : à Ouargla, le technoparc a ouvert ses portes en avril dernier, à la rentrée sociale celui d'Annaba débutera son activité et dans la banlieue d'Oran, une étude de terrain a été lancée à Bir El Djir pour l'édification d'un parc technologique. Tous ces parcs régionaux seront reliés au cyberparc de Sidi Abdallah et travailleront au renforcement des pôles industriels basés dans ces régions. Outre le développement des incubateurs sur le territoire national, le ministère de la Poste et des technologies de l'information et de la communication, en lien avec le ministère de l'Enseignement supérieur, souhaite accompagner le développement des incubateurs au niveau des universités. «L'ANPT a établi plusieurs partenariats avec des établissements comme l'Ecole nationale polytechnique, l'Ecole supérieure d'informatique, HEC, l'université de Béjaïa, l'université de Mostaganem, etc. pour soutenir l'innovation. Ces accords prennent place dans le cadre de partenariats avec des pays ayant une expérience dans l'incubation tels que les Etats-Unis et la Malaisie», explique Mohamed Lakroum, directeur marketing au sein de l'ANPT. Enfin, dans le but de renforcer la coopération entre les différents acteurs du monde des TIC, en premier lieu les jeunes diplômés, le cyberparc de Sidi Abdallah accueillera prochainement dans ses locaux un bureau de l'Agence nationale de soutien à l'emploi des jeunes (ANSEJ), selon le directeur de l'incubateur d'Alger. «Cette proximité devrait permettre de faciliter les démarches administratives et ainsi d'augmenter l'efficacité du dispositif» a-t-il souligné. De bonnes intentions sur le papier qu'il conviendra de vérifier sur le terrain.