Dans un pays en pleine crise politique et où la présidence et l'institution judiciaire sont dans un bras de fer permanent depuis des mois, le mandat d'arrêt lancé contre un humoriste pour avoir prétendument insulté l'islam et le président Mohamed Morsi met le pouvoir égyptien dans une situation grotesque. Les Frères musulmans font face à une contestation qui ne faiblit pas. Ils n'ont toujours pas compris que leur passage en force sur la Constitution a créé un climat de défiance qu'ils doivent impérativement résoudre pour éviter la dérive du pays. Les médias leur sont en bonne partie hostiles, c'est vrai, mais cela ne justifie pas d'essayer de les museler par une multiplication de poursuites judiciaires engagées par le parquet qui, là encore plus qu'ailleurs, suit le gouvernement. Les FM au pouvoir, à défaut de se remettre en cause, n'arrivent toujours pas à trouver la bonne méthode pour trouver une issue à la crise. La guérilla entre les institutions ne fait qu'accentuer, au niveau de l'Etat, la situation de désordre et de violences qui règnent dans la rue. La cour d'appel du Caire a infligé récemment une nouvelle rebuffade au président Morsi en annulant sa décision de limoger l'ancien procureur Abdelmaguid Mahmoud et en ordonnant qu'il retourne à son poste. L'actuel procureur en poste, Talaat Abdallah, crédité d'être proche des Frères musulmans, a décidé de ne pas obtempérer en faisant appel. L'Egypte se retrouve de fait avec deux procureurs, l'un limogé par Morsi et l'autre désigné par lui, traduisant de manière assez cocasse l'état de confusion actuel. La longue guérilla au sein de l'Etat ne baisse pas d'intensité et elle est constamment relancée par des actions et des réactions. Certes, il n'est pas faux de dire que la tendance générale des juges égyptiens est plutôt celle de l'ancien régime mais les erreurs, souvent très grossières, commises par le président Morsi et ses collaborateurs les ont placés dans le «beau rôle» de contre-pouvoir d'une institution qui freine l'instauration d'un autoritarisme frériste. C'est qu'il est difficile, non plus, de ne pas voir que le «nouveau pouvoir» se drape trop facilement dans les habitudes et les réflexes autoritaires de «l'ancien régime». Les guillemets s'imposent dans les deux cas. Il y a bien des élites islamistes frèristes «nouvelles» qui cherchent à s'installer mais elles ne cherchent pas, ou ne cherchent plus, à démanteler «l'ancien régime». Elles veulent l'habiter et s'y installer. Et le bilan de cette gestion chaotique et peu intelligente de la transition est catastrophique. DES LIBERAUX ET DES MILITANTS DE GAUCHE MOBILISES DE MANIERE CONSTANTE, DES JUGES, SOUVENT TRES IMPLIQUES DANS LES PRATIQUES PEU RECOMMANDABLES DE L'ERE MOUBARAK, QUI SE RETROUVENT DANS LA POSTURE DE DEFENSEURS DES LIBERTES CONTRE LES PULSIONS AUTORITAIRES DES «FRERES». ET, L'ARMEE, VRAIE INCARNATION DU REGIME EGYPTIEN AVEC SES GRANDS INTERETS DANS LE DOMAINE ECONOMIQUE, SE RETROUVE AUREOLEE DU STATUT DE «RECOURS» ACCEPTE MEME POUR CEUX QUI LA POURFENDAIENT QUAND ELLE GERAIT DIRECTEMENT LE PAYS. FACE A UN TEL BILAN, IL NE MANQUAIT PLUS AU POUVOIR EGYPTIEN QU'A S'ATTAQUER A UN HUMORISTE LES FRERES FONT FACE A BEAUCOUP D'EGYPTIENS EN COLERE. ILS VIENNENT DE SE METTRE A DOS TOUS CEUX QUI RIENT - A DEFAUT DE PLEURER - EN REGARDANT L'EMISSION SATIRIQUE «AL-BERNAMEG» DE BASSEM YOUSSEF. ILS VIENNENT DE MONTRER, SUR UN MODE RISIBLE, QU'EUX N'ONT PAS DE BERNAMEG, DE PROGRAMME.