Une correspondance adressée par le Premier ministre à Karim Djoudi, le ministre des Finances, propose aussi de réduire la consommation des ménages et de dresser des barrières non tarifaires à l'importation. Le ministre des finances, Karim Djoudi devait rendre une copie sur la grande question de l'heure au Premier ministre à la date butoir du 30 aout 2013. Objet : faire des propositions pour réduire les importations et les transferts. «Cette réflexion devra aboutir à des recommandations et mesures concrètes et urgentes à mettre en œuvre en vue de réduire le niveau des importations et transferts vers l'étranger», est-il précisé dans la directive signée par Abdelmalek Sellal, dont Maghreb Emergent a obtenu une copie. Mais dans ce courrier daté du 9 juillet dernier, le Premier ministre ne s'est pas contenté d'appeler aux contributions des acteurs du secteur des finances. Il y va de ses propres propositions. En tête, survient une invitation à restaurer l'ancienne autorisation d'importation symbolique des années du défunt président Chadli Bendjedid : «Intervenir en amont, en désignant une autorité chargée de délivrer des accords ou des refus d'importation aux entreprises, en fonction d'objectifs économiques nationaux». EMOI DANS LE MICROCOSME PATRONAL Cette proposition a provoqué un émoi certain dans les milieux patronaux, dans le ventre mou de l'été. Des réactions aussi auprès du palais du gouvernement. «Elle n'est ni abandonnée, ni encensée», selon le commentaire d'un chef d'entreprise membre du FCE (Forum des chefs d'entreprise). Interpellé la semaine dernière par la presse à son sujet, en marge de l'ouverture de la session parlementaire, Karim Djoudi a botté en touche évoquant la nécessité de maitriser l'équilibre de la balance des paiements sans reconnaitre l'existent d'un projet de mesures en particulier, encore moins l'existence d'une directive du premier ministre à ce propos. DES «IDEES» DE MESURES AUX RELENTS DE PANIQUE L'annulation du projet de loi de finances complémentaire (LFC) pour 2013 à cause de l'incapacité présidentielle, a différé les prises de décisions. De nombreuses sources proches du secteur des finances affirment cependant qu'un document est en préparation, qui reprendra «tout ou partie des pistes proposées par Abdelmalek Sellal et d'autres pistes». Le Premier ministre cite, dans son courrier, d'autres mesures à étudier pour prévenir la dégradation en cours de la balance des paiements : «renforcer le dispositif de contrôle des produits importés, à travers la mise en place de barrières non tarifaires » ou encore «freiner la consommation des ménages, notamment en encourageant l'épargne et le placement immobilier». C'est une note statistique de la Banque d'Algérie qui a déclenché la réaction pour le moins paniquée du premier ministre. Sa correspondance évoque une hausse de 13,7% des transferts vers l'étranger au terme des cinq (05) premiers mois de l'année 2013 par rapport aux cinq (05)premiers mois de 2012. Cette tendance est consolidée par l'augmentation des importations en 2013, avec 49 milliards de dollars de facture prévus, contre 46 milliards de dollars en 2012. LE CREDOC EN LIGNE DE MIRE Dans son courrier au ministre des Finances, Abdelmalek Sellal s'attaque longuement à l'efficacité du Credoc : «Il n'a pas permis une régulation optimale des opérations de commerce». Il a surtout enrichi les fournisseurs de l'Algérie et leurs banques correspondantes en raison des frais en tout genre inhérents au traitement des dossiers de transfert». La généralisation du Credoc a, selon le constat du premier ministre, «permis de renforcer les banques privées qui financent plus de la moitié du commerce extérieur» tout en impactant le pouvoir d'achat des citoyens «du fait du renchérissement des prix» à l'importation. Le premier ministre porte une estocade à l'obligation pour les importateurs et revendeurs en l'état de recourir obligatoirement à la lettre de crédit (crédit documentaire ou Credoc). Cette mesure a été introduite par Ahmed Ouyahia dans la LFC de 2009. Abdelmalek Sellal n'ose pas proposer de la supprimer. Il demande seulement que le Credoc soit «mieux encadré au seul profit de l'économie nationale».