L'Algérie a verrouillé ses frontières. Après la sécurisation du nord du Mali, et du Niger, elle est actuellement en mode surveillance intensif sur ses frontières avec la Libye et la Tunisie, deux couloirs géants pouvant faciliter l'intrusion aussi bien d'armes de guerre, de drogue que des groupes armés. Une situation que gère l'Algérie en fait depuis plus d'une année, avec l'émergence de groupes armés en Tunisie et le trafic d'armes de guerre en provenance de la Libye post-Kadhafi. Et c'est, une fois n'est pas coutume, le chef de la diplomatie algérienne, Mourad Medelci, qui a été chargé de rassurer autant les partenaires économiques de l'Algérie que les pays amis que tout est déployé pour maîtriser la situation face au danger des groupes armés et djihadistes qui longent les frontières algériennes, du nord au sud. Sur ce point, il a indiqué,lundi, dans une intervention à la télévision algérienne que l'Algérie fera face à ses responsabilités pour protéger ses frontières. «Il faut être vigilant ; nous faisons face à nos responsabilités pour protéger notre pays tout en coopérant dans ce cadre avec les pays du voisinage», affirme t-il. Il poursuit: 'Nous travaillons avec les Libyens, les Maliens, les Tunisiens, les Nigériens et les Mauritaniens, mais aussi avec les pays du champ et du Sahel». Pour lui, il faut 'intégrer cet espace à sécuriser dans un environnement beaucoup plus large, englobant l'ensemble des pays sahélo-sahéliens». L'Algérie est déjà liée avec les pays du champ (Niger, Mali et Mauritanie) par des accords de défense militaire dans le cadre du Cémoc, le Comité d'état-major conjoint. Ce comité travaille surtout à sécuriser les frontières des pays membres et à l'échange d'informations sur les mouvements des groupes armés, notamment ceux d'Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi). Le ministre algérien précise ainsi que l'objectif de l'Algérie pour les pays du champ et les pays de l'espace sahélien consiste à travailler sur le renseignement et soutenir chacun des pays dans les dispositions qu'il prend pour assurer ses propres frontières. Il a également expliqué que, sur ce point précis, le président Bouteflika accorde une 'grande importance'' à cette question et reçoit à chaque fois le chef d'état-major de l'Armée populaire nationale, Gaïd Salah, pour faire le point régulièrement sur ces questions de sécurité des frontières. Les préoccupations sont d'autant plus sérieuses que la menace terroriste, après ce qui s'est passé en janvier dernier à In Amenas, est toujours là ; les instigateurs de l'agression de Tiguentourine étant encore en activité et restent potentiellement nuisibles. Et, sur ce point, Medelci considère que le concept du «terroriste jihadiste» a changé dans la mesure où les pays font face désormais à un «nouveau terrorisme», relevant que les pays du voisinage, du champ et de la région du Sahel y feront face «sans la volonté d'exclure qui que ce soit». Le 12 janvier dernier, quelques jours seulement avant l'attaque de Tiguentourine (16 janvier), lors de la réunion tripartite de Ghadamès (Algérie, Libye et Tunisie), le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, avait affirmé le principe de la paix et la sécurité dans la région, gage du développement socioéconomique des trois pays. Il a surtout souligné que 'la sécurité dans les trois pays et principalement dans les zones frontalières est «un impératif». Devant ses homologues, Hamadi Jebali pour la Tunisie et Ali Zeidane pour la Libye, il a rappelé la nécessité du « recouvrement de la sécurité dans les pays de la région quel qu'en soit le prix », avant de préconiser une meilleure « coordination » entre tous les pays du Maghreb et du Sahel, rappelant la « détermination de l'Algérie à protéger ses frontières» contre les dangers qui menacent la région, « en étroite coordination avec les pays voisins ». C'est un peu dans cette logique que M. Medelci rappelle que « ce qui doit nous réunir, c'est la raison, l'intelligence commune et la volonté de donner une réponse aux attentes des populations (de la région) ». Sans en faire expressément mention, il a rappelé les dispositions du Cémoc, en soulignant que l'Algérie a pour vocation de mettre ses services chargés de la sécurité en synergie et en intelligence commune avec les autres pays, dans le respect de ses principes, rappelant les dispositions « opérationnelles avec les pays voisins qui sont en train de gagner en intensité et en efficacité ». « Nous ne pouvons pas dire que nous avons atteint l'optimum, mais nous devons encore travailler pour faire en sorte que la violence terroriste recule », estime M. Medelci. Les déclarations de M. Medelci viennent au moment où l'Algérie a intensifié la surveillance de ses frontières et cadenassé les zones de transit potentiel des groupes armés, en creusant d'immenses fossés et dressant une muraille de containers remplis de sable pour rendre les frontières de l'extrême Sud moins poreuses et plus faciles à surveiller.