Que Bouteflika soit ou non candidat à l'élection présidentielle, Ali Benflis, son ex-chef du gouvernement et son compétiteur malheureux en 2004, sera lui au départ de la compétition. Il en a officiellement fait l'annonce hier matin. Sa décision n'a pas surpris car ébruitée préalablement par le cercle de ses proches qui sont à la manœuvre dans l'opération de promotion de sa candidature et la mise en place de la machine électorale qui va tenter de la mener à bonne fin. A un moment pourtant le doute a été de mise sur l'intention de l'ex-chef du gouvernement. L'intéressé lui-même l'a entretenu en se refusant à toute déclaration sur le sujet. Son silence et la discrétion médiatique qu'il affichait alors que le débat et les prises de position sur l'échéance de la présidentielle étaient devenus les sujets prédominants dans l'actualité politique ont conduit d'aucuns à considérer que sa détermination à «y aller» n'était pas aussi arrêtée que ce qu'en disaient ses partisans déjà descendus dans l'arène pour tisser les indispensables réseaux de sympathie. Son «attentisme» a été diversement interprété et commenté. Toujours pour ses partisans, son attitude lui était dictée par la précaution de ne pas faire dans la précipitation et ainsi éviter que ne s'émousse prématurément l'effet d'annonce de sa candidature. D'autres milieux par contre ont vu une prise de temps que Benflis s'est donnée afin de sonder ce que son éventuelle candidature suscite dans les cercles du pouvoir et dans la classe politique. Candidat, Ali Benflis est incontestablement une «grosse pointure». Il a cette stature non pas parce qu'il est le candidat d'une formation politique influente électoralement mais parce que susceptible de rallier à sa candidature les détracteurs constants de Bouteflika mais également une grande partie des déçus par ce dernier dont le nombre s'est élargi au long de ses deux derniers mandats. Cela dit, cet atout ne vaut pas «programme électoral» et donc il est attendu que Benflis décline le sien. Il ne lui suffira pas en effet de promettre de mettre fin au type de gouvernance qui a caractérisé les quatorze années de pouvoir bouteflikien. Il doit présenter un projet politique aux objectifs clairement identifiés. Selon nos sources, Ali Benflis est conscient qu'il ne doit pas être perçu comme le candidat de la «revanche». Ce pourquoi il aurait instruit ses proches et partisans de ne pas faire de Bouteflika la cible de leur campagne électorale, mais d'élever le niveau de celle-ci à hauteur de la confrontation d'idées et d'ambitions. L'entrée en lice de l'ex-chef du gouvernement ne met pas fin pour autant aux interrogations qui sont celles des observateurs aussi bien que des citoyens lambda sur ce que réserve l'échéance de la présidentielle. Et cela parce que rien ne dit pour eux que sa participation est le signal que l'élection présidentielle aura lieu dans des conditions de régularité et de transparence acceptables. Ce qui mène d'aucuns à se demander si Benflis n'est pas encore une fois victime d'une opération de subornation qui en fait l'alibi démocratique d'une compétition électorale au résultat déjà décidé. Il reste que depuis la convocation du corps électoral, la scène politique, jusque-là amorphe et ses acteurs faisant montre de flou dans les intentions, est en train de s'agiter. Bouteflika pourrait enflammer l'agitation partisane en dévoilant à brève échéance sa propre intention dont la connaissance aurait un effet libérateur sur nombre de ces acteurs politiques.