L'annonce officielle de la candidature de Bouteflika pour un quatrième mandat a suscité la consternation et l'indignation parmi le milieu des acteurs politiques se situant en dehors du camp présidentiel. Ils ont été nombreux à se relayer la semaine dernière pour fustiger cette candidature qualifiée par certains d'entre eux de «coup de force» qui ferme la porte à une transition pacifique vers le changement du système en vigueur qu'aurait pu représenter une élection présidentielle sans un candidat adoubé par les clans de ce système. Leur frustration s'est exprimée d'autant plus violemment qu'ils ont caressé l'illusion que les cercles du pouvoir s'opposant à cette candidature allaient finir par la faire avorter. Ils se rendent compte qu'ils se sont pathétiquement trompés sur la nature du conflit qui a surgi entre les clans du pouvoir qu'ils ont pensé en divergence sur le principe même d'un quatrième mandat pour un président malade et en incapacité d'assumer sa charge présidentielle. Une erreur dont le constat n'a pas provoqué en eux la prise de conscience qu'il leur faut arrêter de croire que la solution à l'aggravation de la crise politique que ne manquera pas de provoquer le maintien au pouvoir de Bouteflika va venir de l'intérieur du système. S'ils persistent dans cette naïve croyance, c'est par l'impuissance dont ils se savent frappés à rendre impossible le scénario du quatrième mandat. Une impuissance qui s'est étalée dans leur tentative de constituer un front anti-quatrième mandat soudé par leur engagement sur une alternative à la «continuité» dont ses partisans affublent ce mandat qui s'annonce surréaliste et attentatoire à l'intelligence des Algériens et au prestige international de leur pays. De fait, les citoyens constatent qu'à part fustiger et s'indigner contre un scénario qui va consacrer le maintien du statu quo dont l'Algérie paye les conséquences sous la forme de son immobilisme mortifère à tous égards, ces opposants ne parviennent même pas à s'exprimer d'une même voix. Tout en étant d'accord qu'il mène le pays dans une impasse grosse de dangereuses dérives pour sa stabilité et son unité nationale, ils s'en tiennent néanmoins à s'y confronter en ordre dispersé et surtout en préconisant des stratégies «d'opposition» contradictoires. Quand d'aucuns prônent pour ce faire le boycott absolu de l'élection présidentielle dont il sera vain d'attendre qu'elle sera ouverte du moment que le candidat du pouvoir en est le président sortant lui-même, d'autres en appellent au contraire à la participation partisane et citoyenne massive qu'ils pensent susceptible de mettre en échec la tentative de fraude destinée à favoriser ce candidat. Il en est enfin qui, en réaction à l'inéluctabilité d'une élection présidentielle totalement et par avance verrouillée par le pouvoir, ont tout simplement opté pour basculer dans son camp ou s'en laver les mains au prétexte qu'ils se situent au-dessus du «jeu politicien» qu'elle suscite. L'Algérie est certes malade du système qu'elle subit depuis cinquante années, elle l'est aussi de sa classe politique dont les acteurs sont en majorité des nains aptes à animer la scène politique de temps à autre et à maintenir ainsi la fiction qu'ils contribuent à une opposition réelle au pouvoir en place.