Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, vient de lever le voile, ce jeudi, sur les affaires de corruption qui ont défrayé la chronique judiciaire nationale ces dernières années. Il a ainsi indiqué que les affaires de corruption en suspens étaient «prêtes» à être jugées lors des sessions du tribunal criminel, faisant référence aux dossiers de Sonatrach 1, de l'autoroute Est-Ouest et de Khalifa. Les dates n'étant pas encore fixées, on évoque la fin du premier trimestre 2015. Dans une déclaration à la presse en marge d'une séance plénière à l'Assemblée nationale (APN), M. Louh a précisé que les pourvois en cassation introduits par certaines parties impliquées dans ces affaires auprès de la Cour suprême ont été rejetés. Il soulignera également que les juridictions compétentes «prennent actuellement les dispositions nécessaires pour inscrire ces affaires au rôle des sessions criminelles». Cette déclaration vient mettre fin à une longue période de silence des pouvoirs publics concernant le traitement judiciaire de ces affaires de corruption, ce qui a laissé planer le doute sur la volonté politique de présenter les parties impliquées devant la justice. La sortie de M. Louh vient confirmer la décision prise en octobre par la Cour suprême qui a statué sur les affaires dites de Sonatrach 1 et celle de l'autoroute Est-Ouest et conforté l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation près la cour d'Alger. En effet, les pourvois en cassation introduits par toutes les parties concernées dans ces deux dossiers ont été rejetés. Ainsi, dans l'affaire Sonatrach, les dix-huit mis en cause et les quatre sociétés impliquées ont vu la chambre d'accusation valider l'acte d'accusation retenu en février 2013. La défense ayant contesté l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation, d'où le pourvoi en cassation introduit devant la Cour suprême. En effet, cette dernière avait infirmé les conclusions du juge d'instruction relatives à la qualification des faits reprochés à certains accusés. Concernant les quatre sociétés, la chambre d'accusation a retenu deux chefs d'inculpation contre trois sociétés, à savoir Saipem, Contel Algérie et Funkwerk poursuivies en tant que personnes morales et inculpées pour «corruption, augmentation injustifiée des prix en vue de bénéficier d'indus avantages». A propos de ce dossier, l'ancien ministre de la Justice, Mohamed Charfi, avait déclaré que l'affaire «Sonatrach 1» a mis en lumière «un véritable réseau international de corruption dont les ramifications s'étendent à tous les continents» dont le but «est d'absorber la substance de la Sonatrach à travers des mécanismes financiers complexes visant à couvrir les crimes commis». Quant au dossier de l'autoroute Est-Ouest, les pourvois en cassation introduits par les différentes parties font suite au verdict de la chambre d'accusation près la cour d'Alger de novembre 2011 qui a contraint aussi bien la défense que l'accusation à se pourvoir devant la Cour suprême. Ainsi, outre le renvoi du dossier devant le tribunal criminel, la chambre d'accusation a signifié une fin de non-recevoir aux demandes formulées par la défense, concernant la levée du contrôle judiciaire et la liberté provisoire pour les mis en cause. Elle avait également inculpé cinq sociétés étrangères, dont deux suisses, une portugaise, une italienne et une canadienne, de «trafic d'influence et corruption». Les mêmes chefs d'inculpation ont été retenus également contre la société japonaise Cojaal et la société chinoise Citic-CRCC. En absence de l'inculpation d'«association de malfaiteurs», ces sociétés seront jugées en correctionnelle. Quant au troisième procès attendu relatif au procès Khalifa, il doit lui aussi être programmé lors de la première session pénale de 2015. La Cour suprême a rejeté, en mars dernier, l'ensemble des recours introduits par Abdelmoumène Khalifa en décembre 2013. L'ex-golden boy a, en fait, introduit deux recours. L'un relatif à la peine à laquelle il a été condamné et le second concerne le contenu de l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation. La seule procédure à suivre était de faire opposition au verdict dès lors qu'il a été prononcé en son absence. Une action introduite d'office puisque Khalifa est rentré au pays et, de fait, la condamnation devient caduque. Il aura ainsi droit à un procès public, comme tous les autres prévenus dans l'affaire de la Caisse principale de Khalifa Bank. Ces derniers devront comparaître avec leur ex-patron en leur qualité de témoins, hormis le caissier principal et l'ex-directeur de l'agence Khalifa des abattoirs municipaux de Ruisseau, décédés entre-temps. Ces trois affaires programmées, reste à savoir maintenant si elles vont donner lieu à des révélations et des inculpations de hauts dignitaires du régime.