Une nouvelle hécatombe est redoutée, la « pire jamais vue en Méditerranée », après le naufrage, dans la nuit de samedi à dimanche, d'un chalutier de migrants, au large de la Libye. Après la tragique disparition de 450 migrants, la semaine dernière, dans les mêmes circonstances, on redoutait, hier, 700 morts. Un bateau, avec à son bord 700 personnes, a chaviré à environ 70 miles (130 km) des côtes libyennes, selon le témoignage des 28 rescapés secourus par un navire marchand portugais, indiquent des agences de presse, citant la porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), Carlotta Sami. Selon la même source, il s'agirait de la «pire hécatombe, jamais vue en Méditerranée», si ces chiffres étaient confirmés. Les garde-côtes italiens ont récupéré 24 cadavres. S'ils ne s'avancent pas sur le chiffre de 700 personnes à bord du chalutier naufragé, ils assurent que ce dernier, de 20 mètres de long, «est en capacité de transporter plusieurs centaines de personnes». Après avoir reçu un appel au secours, dans la nuit de samedi à dimanche, les garde-côtes italiens ont demandé à un cargo portugais de se dérouter. A leur arrivée sur les lieux, à environ 120 miles (220 km) au sud de l'île italienne de Lampedusa, l'équipage a vu le chalutier chavirer. Selon les garde-côtes, c'est probablement quand les centaines de migrants à bord se sont précipités, tous, du même côté à l'arrivée du cargo portugais que le drame est survenu. 17 navires des marines italienne et maltaise, notamment, participaient, hier, à une importante opération de secours. ENTRE 500 A 1.000 MIGRANTS RECUPERES CHAQUE JOUR Depuis la chute du régime Kadhafi, la Libye est livrée aux milices et au chaos. Conséquence, le nombre de migrants, embarquant depuis les côtes libyennes, connaît une hausse sensible. Ainsi, entre 500 et parfois 1.000 personnes sont récupérées, chaque jour, par les garde-côtes italiens ou des navires marchands. Plus de 11.000 ont, ainsi, été récupérées en une seule semaine. Depuis le début de l'année, plus de 900 migrants ont péri entre la Libye et l'Italie. Un décompte macabre qui ne prend pas en compte cette nouvelle tragédie. Des organisations internationales et humanitaires sont montées au créneau, ces derniers temps, dénonçant l'incurie des autorités européennes. «Il faut une opération Mare nostrum' européenne», a demandé la porte-parole du HCR. L'opération italienne Mare nostrum' de sauvetage des migrants a été remplacée cette année par l'opération Triton', une opération de surveillance des frontières beaucoup plus modeste. En 2014, au moins 3.300 migrants ont trouvé la mort en Méditerranée. REUNION D'URGENCE DE L'UE Réagissant au drame, l'Union européenne a annoncé la tenue prochaine d'une réunion des ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères, pour prendre des mesures. «Des vies humaines sont en jeu, et l'Union européenne, dans son ensemble, a l'obligation morale et humanitaire d'agir», a indiqué la Commission. En attendant, la nouvelle stratégie sur l'immigration, qui doit être adoptée mi-mai, des «mesures immédiates sont nécessaires. (...) Tant que les pays d'origine et les pays de transit ne prendront pas des mesures pour éviter ces traversées désespérées, des gens continueront à mettre leur vie en péril. Une grande partie de notre approche est de travailler avec les pays tiers», a insisté l'exécutif européen. Pour sa part, la chef de la diplomatie de l'UE, l'Italienne Federica Mogherini, a décidé de mettre cette question à l'agenda de la réunion des ministres des Affaires étrangères, aujourd'hui, à Luxembourg. «Je vais présenter une série de propositions concernant la Libye, une des principales routes du trafic illégal de migrants». Au menu des ministres des 28, l'assistance que pourrait fournir l'UE à un gouvernement d'Unité nationale en Libye, actuellement en pourparlers. TOUS LES REGARDS SE TOURNENT VERS LA LIBYE «Nous avons, trop souvent, dit plus jamais ça. Il est, désormais, temps pour l'Union européenne de prendre le problème à bras le corps, sans plus attendre», a estimé Mme Mogherini qui souligne que les Européens doivent «continuer à travailler sur les causes profondes de l'immigration et particulièrement sur l'instabilité dans la région, de l'Irak à la Libye». Jeudi dernier, le Premier ministre italien, Matteo Renzi, et le président américain, Barack Obama, admettaient que la crise tragique de l'immigration clandestine, en Méditerranée, ne pourra être résolue, sans stabilisation de la situation en Libye. Et de préciser que «quelques frappes» ne suffiraient pas à rétablir la situation. «La seule solution, aujourd'hui, est la paix en Libye et la stabilité des institutions», avait déclaré le Premier ministre italien, lors d'une conférence de presse à la Maison-Blanche avec le président américain. Soulignant que 91% des migrants qui arrivent en Italie, depuis l'Afrique, passent par la Libye, «exactement, comme il y a trois ans, lorsque les gens venaient de Tunisie en l'absence de stabilité dans ce pays», M. Renzi a insisté sur la nécessité d'une véritable coordination internationale.