NABNI (notre Algérie bâtie sur de nouvelles idées), qui a consacré de nombreuses rencontres depuis 2011 dédiées exclusivement à l'économie, s'intéresse aujourd'hui au monde de la culture et des langues. «Algérie rêvée» est en fait, selon NABNI, une réflexion sur des questions sociétales dans une démarche prospective à l'horizon 2030. En effet, dans le cadre de ces cycles de conférences initiées depuis trois années, le collectif de NABNI a organisé avant-hier soir au cercle Frantz Fanon de Riadh El Feth à Alger, une rencontre dédiée au problème linguistique en Algérie. Quelle langue parleront les Algériens en 2030 ? telle est l'interrogation soumise à un panel d'enseignants universitaires, de chercheurs et d'auteurs par NABNI qui a voulu par cette rencontre susciter le débat autour d'un sujet qui fâche le pouvoir politique du fait de son «idéologie» qu'il a tenté, sans succès, d'appliquer dans une Algérie plurilingue. Pour y débattre, les professeurs Khaoula Taleb-Ibrahimi, Abderrezak Dourari, Abdelhamid Bourayou, ainsi que le cinéaste et producteur de cinéma, Mounès Khammar, ont été conviés à apporter leur contribution. Pour la professeur Khaoula Taleb-Ibrahimi, enseignante à l'université Alger II, avant de se projeter en 2030 il faudrait d'abord s'interroger sur la langue parlée des Algériens en 2015. L'Algérie est incontestablement plurilingue, en dépit de toutes les tentatives du pouvoir d'étouffer dans l'œuf certaines langues, affirme Mme Taleb-Ibrahimi qui souligne que si l'on veut rêver un jour il faudrait respecter les Algériens dans leur diversité. La défaillance de l'Etat est manifeste dans sa politique linguistique, de l'avis de notre enseignante qui rappelle à cet effet le problème de la langue tamazight qui n'a été reconnue en tant que langue que sous la pression de la rue alors que des millions d'Algériens parlent cette langue en Algérie. Le «déficit politique et démocratique» a fait que tamazight n'a pas eu la place qui lui sied au nom de «l'idéologisation de la société», estime encore notre conférencière, qui rappelle que les Algériens sont pourtant ouverts à toutes les langues, y compris le russe, le chinois et le turc. L'échec de l'école algérienne est un autre facteur déterminant qui a fait que la langue tamazight était délaissée ce qui a créé le problème d'identité nationale qui dure depuis des décades dans notre pays. La réhabilitation de notre patrimoine langagier est un impératif, note par ailleurs Mme Taleb-Ibrahimi qui a tenu à souligner également «l'engouement» des Algériens à s'ouvrir à d'autres langues que personne ne soupçonnait il y a seulement quelques années.