L'ONU a autorisé jeudi les Palestiniens à faire flotter leur drapeau au siège de l'institution internationale à New York, une nouvelle étape dans l'intense campagne diplomatique qu'ils mènent pour faire reconnaître leur Etat. Une résolution en ce sens a été adoptée par 119 voix pour, huit contre et 45 abstentions sur les 193 pays membres de l'ONU. Les Etats-Unis et Israël ont voté contre, de même que le Canada et l'Australie. La France a voté pour, ainsi que la Russie et la Chine. Le Royaume-Uni et l'Allemagne se sont abstenus. A Paris où il se trouvait jeudi, le Premier ministre palestinien Rami Hamdallah a vu dans ce vote «un pas sur le chemin menant la Palestine au statut de membre à part entière des Nations unies». Le 29 novembre 2012, la Palestine était devenue un «Etat observateur non membre» de l'ONU, lors d'un vote historique à l'Assemblée générale. Fort de ce nouveau statut, l'Etat de Palestine a intégré des agences de l'ONU et a rejoint la Cour pénale internationale. Mais n'est pas encore devenu membre à part entière des Nations unies bien qu'il soit reconnu par plus de 130 pays. La résolution demande que les drapeaux des Etats non membres de l'ONU ayant statut d'observateur soient «hissés au siège et dans les bureaux des Nations unies après ceux des pays membres». Seuls les Palestiniens et le Vatican ont ce statut. L'ONU a désormais 20 jours pour se préparer à déployer le drapeau palestinien à son fronton. Les Palestiniens espèrent que le drapeau rouge, noir, blanc et vert sera hissé à l'occasion de la venue à New York fin septembre de leur président, Mahmoud Abbas. Celui-ci doit participer à la session annuelle de l'Assemblée générale et à un sommet sur le développement durable. Il doit prononcer un discours devant l'Assemblée le 30 septembre. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est lui aussi attendu à New York fin septembre pour l'Assemblée générale. L'ambassadeur israélien Ron Prosor a accusé une nouvelle fois jeudi les Palestiniens de «prendre en otages» les Nations unies et a fustigé «un geste symbolique vide de sens». «Cette Assemblée voterait pour déclarer que la terre est plate si les Palestiniens le lui proposaient», a-t-il raillé. «Le seul moyen (pour les Palestiniens) d'avoir un Etat est par des négociations directes» avec Israël. L'ambassadrice américaine Samantha Power a affirmé elle aussi que «hisser le drapeau palestinien ne remplace pas des négociations (entre Israéliens et Palestiniens) et ne rapprochera pas les deux parties de la paix». LES EUROPEENS DIVISES Les Européens sont finalement allés au vote en ordre dispersé après d'intenses efforts pour trouver une position commune. La France s'est prononcée en faveur de la résolution, de même que la Suède, l'Italie ou l'Espagne. Mais l'Allemagne s'est abstenue tout comme le Royaume-Uni, l'Autriche, la Finlande, les Pays-Bas ou Chypre. Beaucoup de ces pays ont fait valoir la tradition bien établie selon laquelle seuls les pays membres à part entière de l'ONU pouvaient jusqu'à présent faire flotter leurs drapeaux. L'ambassadeur français François Delattre a estimé que «ce drapeau est un symbole fort, une lueur d'espoir» pour les Palestiniens au moment où le processus de paix est en panne et où Israël «poursuit une colonisation illégale» en Cisjordanie. L'autre bénéficiaire de la résolution sera le Saint-Siège. Il s'est démarqué de l'initiative palestinienne mais sans s'y opposer. Son représentant à l'ONU, Mgr Bernardito C. Auza, avait précisé avant le vote à des journalistes que le Vatican n'avait «pas l'intention de hisser son drapeau avant la (prochaine) visite du pape» François à l'ONU, mais qu'il n'excluait pas de le faire ensuite. Le Vatican a reconnu de facto l'Etat palestinien. Le pape François doit s'adresser à l'Assemblée générale le 25 septembre. Les deux drapeaux pourront aussi être hissés au fronton des autres bâtiments officiels de l'ONU, à Genève ou à Vienne. A New York, les étendards des pays membres s'alignent tout autour du périmètre de l'ONU et il est prévu des emplacements supplémentaires pour en accueillir de nouveaux.