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Assassinat du patron d'une usine de chewing-gum à Oran : Peine capitale requise contre quatre accusés
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 24 - 11 - 2015

Moment fort de l'audience : l'entrée en scène du gardien du dépôt où eut le crime. Appelé à témoigner, Kh. Mohamed traîne la jambe pour gagner la barre. Lardé de coups de poignard ce jour du 29 décembre 2013, poings et pieds ligotés avec un cache-nez et muselé au ruban adhésif, ce « miraculé » est le pivot autour duquel tourne toute l'affaire. Si ce n'est ce brave rescapé du drame, qui eut pour cadre l'établissement commercial de son défunt patron Lachachi Badreddine, sis rue Soufi Zoubida, ex-Boulanger, ce procès n'aurait sans doute pas lieu.
Laissé pour mort par ses bourreaux, il est l'homme que les auteurs (présumés) du double crime ne pouvaient même imaginer revoir un jour. Et pourtant, il est là aujourd'hui, debout à la barre, les regardant dans les yeux, un à un. Et il est formel : trois des quatre personnes au box des accusés sont bel et bien celles l'ayant assailli, cet inoubliable jour, à peine leur avait-il ouvert la porte du dépôt. Sa remémoration de leurs visages ne souffre d'aucune ambiguïté, soutient-il. La présidente du tribunal a beau tenter de mettre en épreuve les capacités mnémoniques du gardien, son identification de ses trois agresseurs reste catégorique. Il montre du doigt K. Kh. comme étant celui qui lui a pris le visage dans la main, lui étouffant la voix, puis lui a asséné quelques coups de couteau par-devant le corps, avant de lui mettre un bout de scotch sur la bouche. Il reconnaît le visage de H.M., celui qui l'a poignardé au cou. Et, enfin, M.B.M., celui qui lui a donné plusieurs coups de couteau par derrière, notamment au niveau des cuisses et des mollets. Seul B.A., celui supposé être le propriétaire de la Hyandaï Iris, couleur grise, et qui est resté à l'extérieur pour faire le guet, n'est pas identifié par le gardien.
Au cours du débat, les avocats de la défense « taquinent » le gardien, lui lançant un déluge de questions sur un élément-clé, à leurs yeux : pourquoi au début (au premier acte d'identification au niveau du commissariat central de la police), le gardien « victime-témoin » n'a reconnu que K.Kh., alors que pour les deux autres mis en cause, la mémoire ne lui est revenue que lors de l'information judiciaire par-devant le juge d'instruction, soit quatre mois plus tard ? Il était toujours sous le choc, ses fonctions cognitives et ses capacités mnémoniques se sont rétablies progressivement, ont donné pour réponse ses avocats de partie civile. Une réponse qui n'a pas convaincu leurs vis-à-vis de la défense, qui ont fait feu de tout code pour battre en brèche cette « anomalie », selon eux, et partant démolir tout le bien-fondé de la déposition du gardien, qui représente le socle même de l'accusation. Les résultats négatifs des tests ADN ?
Alors que la défense a mis cette « non-preuve » au compte de l'innocence des accusés, les parties civiles, elles, ont souligné par la voix de maître Fahim Hadj Hbib que « l'analyse des profils génétiques est le seul acte qui n'était pas à la hauteur des bonnes et intelligentes investigations menées par la police judiciaire, en ce sens que le choix des échantillons prélevés sur la scène du crime n'était pas judicieux, outre les délais longs qu'ont pris les examens, ce qui était de nature à altérer les conditions optimales des tests labo ». Son collègue du même collectif de partie civile, Me Kahouadji Ezzine, lui, a une explication qui va plutôt à la charge des prévenus : « que les enquêteurs n'aient trouvé la moindre empreinte des mis en cause, cela prouve tout simplement qu'ils sont de vrais pros. N'oublions pas que l'un d'eux, K. Kh., pour ne citer que ce cas, a passé en prison la moitié de sa vie, 14 ans, pour entre autres: assassinat et vol à main armée ».
La genèse de l'affaire remonte au 29 décembre 2013. Ce jour-là, à 13h, la police reçoit un coup de fil l'informant sur un crime ayant lieu dans un local commercial spécialisé en chewing-gum (la marque Kwi-Kwi fabriquée par le même opérateur à Tlemcen) sis rue Soufi Zoubida, ex-Boulanger. Dans son bureau au 1er étage, le patron Lachachi Badreddine est allongé par terre gisant dans une mare de sang, tête sur un porte-documents en carton. Le petit coffre-fort est ouvert, l'argent qui s'y trouvait (dont le montant s'est avéré de l'ordre de 30 millions de cts) n'existe plus. Pas le grand coffre-fort, situé dans une autre pièce, qui est lui bien fermé, avec plusieurs milliards de cts dedans. A priori, les assaillants n'ont pas eu le temps d'y accéder, selon les enquêteurs, en raison de la mort de la victime et de la peur panique qui s'était emparée d'eux au moment de l'arrivée imprévue d'un ami de la victime. A l'entrée, au rez-de-chaussée du local, le gardien, que les agresseurs auraient laissé pour mort après lui avoir asséné plusieurs coups de couteau puis ligoté par un cache-nez et muselé au ruban adhésif, est évacué aux UMC. Il survivra miraculeusement. Conclusion de l'examen d'autopsie sur le corps de la victime (plein de traces de coups d'armes tranchantes et autres violences) établi par les médecins légistes : mort sur le coup provoquée par une profonde plaie à l'artère fémorale. Selon le dossier d'accusation, c'est le gardien, auquel trois des quatre mis en cause vêtus de salopettes bleues s'étaient présentés ce jour-là comme étant des agents de Sonelgaz, qui, à partir d'un portrait-robot puis d'un album-photos, a pu reconnaître «avec exactitude» un des auteurs, K. Kh., un multirécidiviste.
La représentante du ministère public a requis la peine capitale contre les accusés tous ensemble. Après délibération, le tribunal a décidé d'un complément d'information et a demandé à ce que des tests ADN sur une chaîne en or retrouvée sur la scène du crime soient effectués au niveau du laboratoire scientifique de la police à Alger. Ces tests seront ensuite comparés avec les prélèvements ADN effectués sur les accusés.


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