L'attaque, la première contre la garde présidentielle, en Tunisie, de ce mardi, à Tunis, s'inscrit dans l'agenda criminel des groupes terroristes. S'attaquant à l'élite de la soldatesque tunisienne, les terroristes ont visé, à travers cet attentat au cœur même de la capitale, un des symboles de la République. «C'est la République qui est visée», affirme Firas Guefrech, conseiller du Président Béji Caïd Essebsi, sur les réseaux sociaux. Pour le porte-parole de la présidence, Moez Sinaoui, «cibler la Garde présidentielle c'est cibler un des symboles de l'Etat, de la République en Tunisie», et de rappeler son rôle joué lors de la révolution tunisienne, «notamment le 14 janvier». En Tunisie, et depuis la montée en puissance de l'action armée des groupes terroristes, les forces de l'ordre sont, régulièrement, ciblées par les djihadistes. Une guérilla plutôt active du côté des monts Chaambi et Semmama, à l'ouest du pays, vers la frontière algérienne où, depuis 2012, les autorités traquent la cellule Oqba Ibn Nafaa, la franchise locale d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) qui a à son actif la mort de dizaines de policiers, gendarmes et militaires. Dédié, dans un premier temps, à la sécurité du président, le rôle des unités de la Garde présidentielle a, depuis les attentats du Bardo et de Sousse, en mars et juin derniers, débordé sur le sécuritaire pour se retrouver en première ligne dans la lutte anti-terroriste, suite à une décision de la présidence qui les a mis au service de l'Armée. Certains de ces membres assurant, aussi, la protection de personnalités menacées par les groupes armés. Lors de l'attaque par des djihadistes de l'ambassade américaine, à Tunis, en 2012, ce sont des membres de la Garde présidentielle qui étaient intervenus pour évacuer les diplomates. Réagissant à l'attentat de mardi, Béji Caïd Essebsi, qui a proclamé l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire tunisien pour une durée de 30 jours et un couvre-feu dans le Grand Tunis, a déclaré solennellement que «la terreur va changer de camp, du nôtre à celui des terroristes. Comme nous l'avons déjà dit, nous sommes en guerre contre le terrorisme», paraphrasant l'ancien chef du gouvernement algérien Rédha Malek, au plus fort de l'offensive islamiste, en Algérie. Par ailleurs, cette attaque est la troisième que la Tunisie subit depuis un an. Pour Beligh Nabli, directeur de Recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et spécialiste de la Tunisie, ce dernier paye pour ses choix démocratiques. «Pour les djihadistes, elle est en voie de modélisation occidentale et défie leur islamisme rigoriste», analyse-t-il. Il met aussi, en avant, la vulnérabilité de la Tunisie à travers sa position géostratégique avec l'infiltration de milices djihadistes de Libye et la présence, dans la région de Kasserine et des monts Chaambi, de salafo-jihadistes affiliés à Aqmi'. Frapper la Garde présidentielle, c'est d'abord «une manière de défier l'Etat en lui montrant qu'il peut être frappé en son cœur», estime-t-il. M. Beligh n'épargnera pas le travail des Services de renseignements qu'il juge défaillants jusqu'à l'attentat de Sousse. «Il y a eu ensuite une prise de conscience politique. Les services de renseignement ont été renforcés, certains hauts fonctionnaires jugés défaillants ont été démis de leurs fonctions et la présence policière a été renforcée, sur certaines portions du territoire». Hier, Daech a revendiqué, dans un communiqué diffusé sur des comptes djihadistes, l'attentat. L'auteur de l'attaque est un Tunisien, identifié comme Abou Abdallah al-Tounissi' et muni d'une ceinture d'explosifs, qui s'est introduit dans le véhicule et « s'est fait exploser », selon ce texte. Douze agents de la Garde présidentielle ont été tués mardi, dans cet attentat. Quant aux conséquences directes, elles vont, certainement, impacter les investissements étrangers alors que le tourisme est déjà en chute libre.