Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, au centre de toutes les critiques de l'opposition, était hier devant le Conseil de la Nation pour la présentation de la loi de finances (LF) 2016. Attaqué sur le fond et la forme et particulièrement sur les articles 66 et 71 de la LF 2016, le ministre précisera, dans son intervention devant les sénateurs, que «les entreprises stratégiques comme Sonatrach, Sonelgaz, Algérie Télécom et autres», sont exclues du champ d'action de l'article 66, expliquant qu'elles «sont régies par des lois spécifiques empêchant toute ouverture de leur capital». Se voulant rassurant, le premier argentier du pays soulignera les bienfaits de ce texte, affirmant qu'il vise «la pérennité de certaines entreprises en les dotant de ressources financières dont elles ont besoin tout en conservant 34% du capital sous la propriété de l'Etat». Un argumentaire qui a fait réagir la Commission des affaires économiques et financières du Conseil de la Nation dont le rapport préliminaire a interrogé le ministre sur les raisons du gouvernement de ne pas exclure explicitement les entreprises stratégiques, notamment celles activant dans l'énergie et la Défense nationale, du champ d'application de cette disposition. Un «oubli» qui avait fait réagir l'opposition lors du passage en «force» de la LF 2016 à l'APN. En outre, cette commission a mis un bémol à la possibilité d'acquisition de la totalité des actions d'une entreprise publique au bout de cinq ans de privatisation partielle, tel que prévu par le texte de loi. Rappelons que l'article 66 stipule, entre autres, que «l'actionnaire national résident peut détenir ces actions sur une période de cinq ans. Après une expertise juridique sur le respect des engagements souscrits, il est possible de soumettre au Conseil des participations de l'Etat (CPE) l'option de l'achat du reliquat des actions». En cas d'approbation par le CPE, la concession se fait selon le prix convenu dans la charte des partenaires ou celui fixé par le CPE, précise le même article. Pour M. Benkhalfa, la disqualification d'actionnaires étrangers et le droit de regard du CPE, qui est présidé par le Premier ministre et composé d'une dizaine de ministres, sont un gage de garantie du texte. Le Sénat, en reprochant au gouvernement le peu de détails nominatifs de l'article 66, rejoint les propos de Ouyahia qui avait regretté l'absence d'explication du gouvernement sur la LF 2016 et les articles incriminés. Le Sénat qui devra voter sur cette LF a été saisi par les députés frondeurs, dont les membres des groupes parlementaires du PT, de l'AAV, d'El Adala, d'El Binaa et des indépendants et une vingtaine de députés du FLN et de TAJ, à travers une lettre de sensibilisation. Rappelons que dans la contre-offensive de l'opposition, plusieurs démarches sont projetées dont la saisine du président de la République, adresser une requête au Conseil constitutionnel en n'excluant pas les actions sur le terrain à travers des rencontres avec les citoyens. Adopté le 30 novembre dernier par l'APN, la LF 2016 est basée sur un prix de référence du baril du pétrole à 37 dollars et un taux de change de 98 DA pour 1 dollar. Le texte table sur une croissance hors-hydrocarbures de 4,6%, une inflation contenue à 4%, un solde global du Trésor déficitaire de 2 452 mds DA et des réserves du Fonds de régulation des recettes (FRR) de 1 797 mds de DA à fin 2016. Cette loi prévoit une hausse des importations à 54,7 milliards de dollars et un recul des exportations des hydrocarbures à 26,4 milliards de dollars. Sur le plan budgétaire, il est prévu des dépenses budgétaires de 7 984,1 milliards DA dont 4 807,3 milliards de dépenses de fonctionnement et 3 176,8 milliards de dépenses d'équipement, soit une baisse de 9% par rapport à 2015. Quant aux recettes budgétaires, elles sont estimées à 4 747,43 milliards DA. Il propose, en particulier, l'augmentation de la vignette automobile et de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur le gasoil ainsi que sur la consommation du gaz naturel et de l'électricité, lorsqu'elle dépasse un certain seuil.