Le Maroc crie au loup et accuse le SG de l'ONU de complaisance lors de sa dernière visite dans la région pour relancer le dossier du Sahara occidental. Des mots forts comme «dérapages» ou «faits accomplis» pour dénoncer l'attitude de Ban Ki-moon qui a eu le courage d'amorcer cette tournée même si c'est au crépuscule de son mandat. Reste qu'aucune avancée notable n'a été enregistrée puisque Rabat écarte toute idée d'indépendance, militant en faveur d'une large autonomie du territoire sous sa propre souveraineté. Le Maroc qui est en train de perdre la guerre diplomatique contre le Polisario a pourtant trouvé des alliés de choix dans la péninsule arabique. En décembre dernier, la Cour de justice de l'Union européenne avait annulé l'accord commercial portant sur les produits agricoles, signé en 2012 entre Rabat et Bruxelles, tranchant ainsi en faveur du Front Polisario, qui estimait que l'application de cet accord au territoire contesté du Sahara occidental violait le droit international et les engagements de l'Europe. La visite de Ban Ki-moon au Sahara occidental entérinait cette défaite jusqu'à ce que le royaume wahabite ne décide de cautionner la cause marocaine. Faut-il s'en étonner ? Non, puisque l'Arabie saoudite, fidèle à ses principes, ne pouvait qu'appuyer la «marocanité» du Sahara, elle qui a déjà à son actif un riche palmarès de scalps arabes. Allié précieux d'Israël, tueur d'enfants au Yémen, exportateur et financier du terrorisme islamiste dans les pays arabes, capitale du féodalisme, l'Arabie saoudite n'en finit plus de dynamiter le monde arabe dans une guerre pathétique contre l'Iran. Prenant le plaisir à aller à contre-courant des causes justes, son ambassadeur à Rabat a tendu la perche aux Marocains en leur promettant d'investir prochainement dans les principales villes du Sahara. Dans les bagages saoudiens, les capitaux en provenance du Koweït, du Qatar et des Emirats. Alors que l'Europe priorise la justice internationale à ses intérêts commerciaux, que la communauté internationale essaye de régler un dossier inscrit depuis 1966 sur la liste des territoires non autonomes, et donc éligible à l'indépendance selon les résolutions onusiennes, Ryad impose sa logique des pétrodollars et renvoie l'ascenseur au régime marocain qui l'a soutenu dans sa folie yéménite. Mohamed VI a mis à la disposition de la coalition menée par l'Arabie saoudite 1 500 soldats pour aller combattre au sol contre le Yémen. Outre les dividendes économiques, Rabat espère engranger l'appui diplomatique des monarchies du Golfe dans sa guerre contre l'indépendance du Sahara occidental. Dans tout cela, l'Algérie se contente d'attendre, encaissant sans répondre les provocations saoudiennes jusque sous ses fenêtres. Alors, jusqu'à quand ce silence?