L'échec scolaire en Algérie est, incontestablement imputé à l'absence d'un projet éducatif et culturel, (réforme), capable de sous-tendre, tout en restant fidèle aux préceptes fondamentaux de la souveraineté nationale, l'islamité, l'arabité, l'amazighité, un projet de société structuré autour d'un consensus mobilisateur répondant aux : *préoccupations nationales d'abord, (se mêler au monde sans gêne et sans complexe gérer le tumulte de la modernité sans erreur et sans illusion évoluer au rythme de l'international sans inquiétude et sans trouble); *exigences mondiales ensuite, (prendre part à l'édification de l'avenir commun aux hommes où règnent la responsabilité partagée, le respect mutuel et où le bien-être individuel se mesure à l'aune de la contribution de tout un chacun à la prospérité pour tous. On peut donc prévenir l'échec scolaire pour peu que mes collègues enseignants se libèrent de cette torpeur inepte (stupide) qui les a engourdis et s'extraient de cette étrange ataraxie (cette quiétude de l'esprit) qui les a anesthésiés et s'investissent dans le débat inhérent à une école abandonnée à des profanes qui en ont fait une chasse gardée pour qu'émerge l'insolite d'une part et d'autre part pour peu que les actions réformatrices à entreprendre à cet effet soient menées dans le sens d'une meilleure prise en charge des facteurs enclenchant la réussite scolaire. Oui, mais comment ? En définissant une politique éducative et culturelle adaptée à cet effet. Qui concevra cette politique éducative et culturelle ? Au moment où l'autonomie du développement national est devenue à l'échelle planétaire un objectif incontournable, en Algérie on lui tourne le dos. La conception et l'élaboration d'une politique éducative et culturelle «valorisatrice» de la ressource humaine, exigeant une volonté intellectuelle certaine et un courage politique évident, ne peuvent plus demeurer l'apanage de personnages archaïques n'ayant en commun que la stérilité de leurs idées et donc dans leur «hotte» aucune solution nouvelle et fiable aux problèmes que connaît l'école et dont la résolution appelle à la fonctionnalité de l'engagement à prendre à cet effet et à la crédibilité et à la compétence professionnelle à investir. La participation d'esprits nouveaux comptabilisant un capital expérientiel certain, mais qualifiés, perspicaces et déterminés, à cette tâche s'impose tel un inéluctable, (on a constaté la répercussion de leur exclusion, lors de la conception du manuel scolaire). Le monopole des ambitions creuses de ceux qui sont dépourvus de courage politique, de qualification, de perspicacité et de détermination, doit être brisé. Ces architectes du renouveau, engagés pour une école prospective et convaincus de la gravité de leur mission, feront de cette politique un nouvel ordre de logique de formation qui sera le creuset des confrontations et des convergences des attentes sociales novatrices et réformatrices. Bien entendu, cette élite, parce que croyant à l'opportunité, à la nécessité et à l'utilité de cette politique, ne mettra pas hors jeu cette majorité qu'on a voulue silencieuse, les élèves eux-mêmes. Elle leur parlera juste et vrai. Comment ces esprits devront-ils débattre du choix à opérer ? De prime abord, convenons que les choix de politiques éducatives et culturelles devant faire l'objet de consensus qui soient l'expression de larges débats démocratiques, porteront non seulement sur les moyens à mettre en œuvre mais aussi sur les objectifs à réaliser et sur les finalités à atteindre. Par ailleurs, débattre des choix de politiques éducatives et culturelles, c'est ne pas perdre de vue le rôle crucial que l'école a à jouer dans la formation des individus qui auront un sens aigu de leur interdépendance et de leur destinée commune pour dynamiser un développement qui soit à la fois humain et durable. Il est donc impératif que tous ceux qui auront à réfléchir sur la conception et l'élaboration des paradigmes éducatifs et culturels, ne perdent pas de vue que l'école est un laboratoire où s'élaborent les attitudes, les aptitudes, les comportements et les réflexes qui, acquises à l'esprit, lui permettront de s'arracher aux automatismes qui ont tendance à l'envahir. Nanti de ces valeurs, il refusera d'évoluer dans la fatalité et s'investira dans la structuration des idées novatrices et réformatrices, (celles qui lui apprendront à réagir avec subtilité face au difficile et à l'imprévu et à régir sa vision des choses de la vie*), en considérant les données du passé, les impératifs du présent et les perspectives du futur. Dès lors, il saura s'agencer dans son temps en rectifiant, à chaque fois que ce sera nécessaire, sa dynamique évolutive et réhabiliter le rationnel dans ses droits pour en faire la plus héroïque de ses vertus. *Les choses de la vie : la servitude et la liberté, l'injustice et l'équité, la faiblesse et la puissance. En outre, tous ceux qui auront à réfléchir sur la conception et l'élaboration des paradigmes éducatifs et culturels, ne doivent pas perdre de vue que l'école est un espace où sera accomplie la formation du citoyen éclairé et qui admet que le développement n'est pas un phénomène naturel qu'il faut subir et auquel il faut s'adapter le mieux possible, mais l'expression d'un impératif social et politique à mettre en œuvre et sur lequel, en tant qu'acteur économique, politique et social, il doit peser. Toutefois, dans la formulation des politiques éducatives et culturelles, il importe de : -considérer l'extraordinaire essor des connaissances, (de nos jours et de par le monde les progrès scientifiques et technologiques se précipitent. Les formules de résolution mises au point et soigneusement mémorisées ont déjà l'allure d'ébauche. Le savoir tendant vers la dynamique de son épanouissement, génère des référents nouveaux. La revalorisation des plans et des stratégies visant à l'amélioration des conditions de vivre et d'évoluer des hommes, se conforme de mieux en mieux aux exigences qu'impose la nécessité d'embrayer sur le troisième millénaire avec le maximum de chances de succès) ; -réfléchir aux méthodes et aux procédés permettant leur assimilation et leur exploitation au profit d'une utilité optimum pour la cité. -circonscrire les objectifs et les finalités que développe la connaissance à enseigner, ses impacts à long terme et à court terme et l'intérêt qu'elle sera susceptible de susciter. Il importe, en conséquence et en tout état de cause, que les débats sur la formulation de politiques éducatives et culturelles ne doivent pas être recherche d'accommodements provisoires, d'aménagements transitoires ou de formules qui ne changeront rien au désordre des choses. Par contre, ils doivent, indubitablement et en premier lieu, s'affronter aux clivages entretenus par des partisans d'idéologies et d'intérêts réfractaires à la volonté des Algériennes et des Algériens à évoluer au rythme de l'international. Il est donc nécessaire que ces débats évacuent de façon systématique les réformes clandestines, rompent avec ce grave travers qu'est la marginalisation des compétences avérées en la matière et s'imposent tel des engagements à repenser dans tous les sens un système scolaire qui, déliquescent, est devenu un sous-système en phase de se figer dans un environnement socio-politico-économique national qui n'adhère plus aux préoccupations de l'humanité. En somme, ils s'inscriront dans cette exigence, dans cette recommandation du troisième millénaire qui consiste à manager l'épanouissement de la mentalité scientifique, c'est-à-dire la capacité des citoyens à raisonner logiquement et à juger avec méthode pour pouvoir s'adapter au rythme de l'international sans gêne, sans complexe, sans erreurs, sans illusions, sans inquiétude et sans trouble. A ce propos, l'école algérienne ne doit pas s'égarer dans les méandres labyrinthiques des subtilités politiques ou idéologiques aux implications désastreuses ou se soumettre à des expériences qui n'aboutiront jamais au résultat escompté. Aussi, elle ne doit pas demeurer cet espace où se combinent et où s'affrontent, de surcroît dans le désordre, l'explosion démographique, la massification de la scolarisation, le monolinguisme réducteur, l'absence de recherche ou de rénovation pédagogique, la politisation ou l'idéologisation forcenées de la logique scolaire, la dégradation quasi planifiée de la compétence et de la professionnalisation des enseignants, le bureaucratisme comme paravent de la non-qualification ou de la désinvolture des structures et institutions chargées de gérer la mission éducative et l'acte pédagogique et l'absence quasi-totale d'un mécanisme technico-administratif capable de suggestions et d'orientations pédagogiques fiables, l'extinction du désir, du besoin même d'améliorer l'instinct citoyen au profit d'une vitalisation de l'agressivité, de la médiocrité, de la fabulation et même du proscrit. Pour ce faire, l'enseignement-apprentissage ne poursuivra plus des objectifs disparates et fugaces, mais recherchera l'optimum d'ensemble, c'est-à-dire la production d'une personnalité capable de se mouvoir dans un espace mondial sans cesse actualisé. Les débats à engager opteront alors pour un modèle de gestion de la mission éducative qui s'accordera au mieux aux défis de l'heure. Autrement dit, pour un modèle qui ne fonctionnera pas sous le joug de déterminismes idéologiques et politiques stériles, mais qui contribuera à la promotion du citoyen autonome et responsable, de l'individu qui sera l'artisan de son évolution, le porte-parole de son temps, le témoin de demain et l'architecte du progrès social et non à la promotion du sujet soumis ou à celle du militant appelé à se fondre dans cet esprit étriqué qu'on aura taillé pour lui dans la roche de la dérision. Cependant, cette forme de gestion de la mission éducative et de l'acte pédagogique ne pourra œuvrer à la formation de ce profil de sortie que si elle s'inscrit dans cette relation pédagogique qui, bien que tenant compte des différences individuelles, (chaque élève véhiculant ses propres préoccupations et ses propres intérêts), se focalisera sur le développement de l'esprit qui saura raisonner logiquement et juger avec méthode. Elle s'organisera alors autour de six apprentissages fondamentaux : apprendre à l'individu à apprendre en vue de s'accommoder des instruments qui lui permettront la compréhension du monde au sein duquel il doit évoluer et pour le bien-être duquel il œuvrera ; apprendre à l'individu à connaître pour connaître plus en vue de l'initier à perpétuer sa capacité à acquérir des connaissances sans cesse actualisées ; apprendre à l'individu à «bien faire ». (C'est lui apprendre, non seulement à acquérir un savoir-faire, mais aussi à jouer son rôle de citoyen modernisateur et fédérateur des bonnes volontés. En acquérant l'aptitude de «bien faire», il se sentira utile à la cité) ; apprendre à l'individu à vivre avec ses semblables. (C'est lui apprendre à coopérer et à participer avec eux à l'aboutissement de toutes les activités humaines au profit du bien-être social. L'objectif est de laminer «le rejet de l'autre» qui s'exprime au nom de la différence. Il s'agit notamment de promouvoir l'apprentissage du «vouloir vivre ensemble» en incitant l'intérêt à développer la connaissance de «l'autre», de son histoire, de ses traditions, de sa spiritualité) ; apprendre à tout un chacun à être. (C'est lui apprendre à développer une plus grande capacité d'autonomie du jugement méthodique et du raisonnement logique, ces deux composantes de la mentalité scientifique-, ce qui renforcera sa responsabilité personnelle dans le tissu collectif) ; apprendre aux hommes à transcender leurs dilemmes de façon lucide et honnête pour que surgissent en eux des femmes et des hommes qui sauront gérer la puissance et la complexité des obligations que leur créent les choses de la vie1 ; des femmes et des hommes qui refuseront tout ordre établi qui entretient l'indigence culturelle au profit de l'illusion. A ce titre, il est indiscutable que l'école algérienne s'oblige à préciser les objectifs et les finalités de sa mission et à les orienter dans cette optique. Qu'elle sache donc que la société algérienne ne veut pas demeurer fragmentaire, qu'elle ne peut plus se contenter de puériles initiations, qu'elle veut vivre des instants où l'ardeur du combat pour le développement durable empêche tout recul. Qu'elle cesse de faire de l'humanisme une négation de l'homme. Qu'elle cesse de faire de l'homme un animal privilégié, un instrument aux mains d'aventuriers sans vergogne ; qu'elle s'évertue plutôt à en faire un instrument confié à lui-même et le promoteur du citoyen du monde qui veille en lui. Qu'elle s'élève du rôle d'apôtre sans auditoire pour inaugurer des voies nouvelles à l'avènement de l'esprit qui saura. Qu'elle s'assigne pour obligation de veiller à ce que l'éducation et la culture ne soient plus traquées par le népotisme de «ceux-là» et de «ces autres» qui entretiennent la flamme du préjugé tenace pour ne produire, tout compte fait, qu'une culture vacillante, chétive n'approchant que timidement le concept de la réflexion et l'avènement du goût, de l'esthétique, de la morale et de la citoyenneté, ce qui a délesté des générations entières de leur essentiel humain, réduisant de facto leur notion du rationnel à de banales résurrections idéologiques hâtant une prise de conscience hébétée. Cela dit, un choix judicieux de politique éducative et culturelle à adopter ne peut s'opérer en marge du ressaisissement de la conscience nationale Une politique éducative et culturelle définie au profit du ressaisissement de la conscience citoyenne apprendra aux mentalités à ne pas céder à la pollution et, partant, aux hommes, à condamner largement et sans équivoque les voies de la violence, à conjurer le péril ou l'anéantissement qui menacent leurs nations, à préserver l'intégrité de leurs territoires et l'unité de leurs peuples, à refuser d'abdiquer la souveraineté nationale, à affirmer les principes républicains. A l'encontre de ceux qui voudront leur contester leur droit de se défendre contre tous les abus d'où qu'ils viennent et d'assumer leur devoir impérieux, celui de promouvoir l'acte démocratique, ils sauront se dresser tel un rempart face aux dénis intolérables et aux forfaits majeurs qui tenteraient de s'ériger en norme. Ils seront déterminés à assumer avec fierté et sans ambiguïté leur passé et à tisser des liens solides avec leur présent et leur avenir. Apprenant à exprimer leurs valeurs profondes de tolérance et de générosité et leur volonté d'affirmer leur appartenance à la commune humanité, ils ouvriront le chemin à la voix de la sagesse. Ils brandiront leur aspiration indéfectible à la paix. Refusant désormais de s'accommoder de situations d'anarchie, de démission collective, encore moins de violence, ils s'investiront pour que s'accomplissent la performance de leurs compétences générales et celle de leurs qualifications spécialisées. Une politique éducative et culturelle définie au profit du ressaisissement citoyen consacrera indubitablement un Etat qui, s'éloignant des visions politiques de type féodal, aura un contenu modernisateur. Admettant par ailleurs qu'il n'y a de constant dans l'histoire des sociétés dynamiques que le changement, cette politique devra être érigée en hygiène de vie. Considérant que si l'homme refuse de cautionner son sous-développement et de demeurer à la remorque de «l'autre», l'heure est venue pour lui de souscrire au complexe progrès-civilisation. Sa mission consiste, par conséquent, à valoriser la ressource humaine en faisant de l'école un puissant pôle d'idées-forces au moyen desquelles l'homme pourra intervenir sur son niveau civilisationnel pour l'adapter à celui auquel il aspire. Elle mettra ses préoccupations (ses ambitions, ses aspirations, ses besoins et ses contraintes) au centre des stratégies globales à adopter pour que s'accomplisse son «mieux-être». Cet élan est possible pour peu que l'école algérienne s'ouvre les chemins d'un avenir prometteur et qui constituera le socle intangible d'un pacte social qui permettra à la nation de réaliser ses espérances de progrès et de prospérité et de s'adapter aux tendances lourdes qui animent le monde et qui sont exhaustivement: l'édification d'un cadre de vie constitutionnelle et social ouvert, transparent, participatif qui garantit l'exercice des libertés individuelles et publiques et assure l'ouverture politique ; la mobilisation du génie national qui permettra aux citoyens de vivre l'espoir et de bâtir une société de justice et de progrès ; l'élimination des pratiques du clientélisme, de la corruption et de l'abus d'autorité ; l'offre d'une qualité sans cesse croissante des prestations servies dans le strict respect des principes d'impartialité et d'égalité ; la rationalisation et l'organisation du travail ; le développement des instruments de planification stratégique, de prise de décision et de soutien à l'économie en luttant contre le trafic d'influence, les collusions avec les décideurs, les passe-droits rétribués, les services illicites ; la mise en place d'un appareil judiciaire qui cesse d'être le lieu privilégié où s'expriment les abus et où les passions partisanes, claniques et même tribales, trouvent impunément la possibilité d'éclore ; la mise en place d'institutions qui se mettent à l'écoute du citoyen et fassent une lecture clairvoyante de ses aspirations, de ses ambitions, de ses besoins et de ses contraintes ; la lutte contre les menaces susceptibles de provenir des idéologies simplificatrices et totalitaires ; la lutte contre tout ce qui rend le citoyen triste, égoïste et violent en promouvant les notions de probité, de rigueur, de tolérance, d'ouverture sur le monde et son adhésion aux valeurs universelles que distille le complexe progrès/civilisation. Ce sera donc à la lumière de cette philosophie que devront être conçus et élaborés les programmes d'étude et définies les méthodes et procédés d'enseignement. Autrement dit, toute école se voulant créatrice de renaissance et porteuse d'avenir n'évoluera pas en marge de cette dynamique civilisationnelle, faute de quoi sa mission sera vouée à l'échec. C'est-à-dire que sans un consensus politique établi autour de ces valeurs, toute forme de projet éducatif et culturel, si rigoureux soit-il, s'assèche et se mutile. En conclusion, cette école préparera les chemins de l'avenir. Ceux-ci passeront par son adaptation aux multiples, complexes et combien exaltantes, exigences d'un monde entraîné dans un mouvement de plus en plus rapide et qui condamne, de plus en plus impitoyablement, les retardataires. Si ici et là on reproche à l'école algérienne d'avoir créé de profondes insatisfactions en produisant des exclus, ceux et celles qui décrochent mais aussi ceux et celles qui, bien que persévérants, n'acquièrent pas une formation de qualité, c'est parce qu'elle éprouve des difficultés à comprendre sa mission. Elle a besoin d'être réanimée parce que l'heure est venue de promouvoir une société capable de mobiliser ses aspirations pour qu'elles ne s'effilochent, de vectorialiser ses ambitions pour qu'elles ne tombent en désuétude, de sélectionner ses besoins pour qu'ils ne se transforment en désirs épars et de canaliser ses contraintes pour qu'elles ne l'envahissent. L'heure est venue d'envisager des ajustements structurels au moyen d'une politique éducative et culturelle «intelligente», celle qui s'opposera à l'idée de réforme définitive, (le renouveau éducatif et culturel ne pouvant être immuable) et qui, aux moments propices, saura s'arrêter, relire la conjoncture sociale, culturelle et économique qui prévaudra, discerner les urgences et proposer «les virages» qui s'imposeront. Dans quel esprit cette politique éducative et culturelle doit être conçue et élaborée ? Concevoir et élaborer cette politique éducative et culturelle ne signifie pas fantasmer sur une source d'espoir, encore moins rajouter le désordre au désordre, ni entretenir des mirages, encore moins l'illusion du savoir, mais libérer l'école de la sclérose qui l'engourdit en la libérant des serres de ceux qui, en mal de «méritocratie» mais en plein dans la «médiocratie», en ont fait un théâtre où s'affrontent dans un bruit discordant des idées infirmes et / ou «périmées». Cela dit et afin qu'elle n'apporte de mécomptes supplémentaires et ne sacrifie d'autres générations, l'objectif qui animera cette politique éducative et culturelle ne sera certainement pas un amalgame de compromis précaires comme à l'accoutumée, mais des convictions fondées sur la hiérarchie des préoccupations nationales. Débattre donc de cet objectif, c'est avant tout cerner sa signification ; c'est lui donner un contenu clair et authentiquement stratégique ; c'est comprendre son utilité ; c'est conscientiser ses défis. Débattre de cet objectif, c'est somme toute, débattre dans la sérénité de la pertinence des principes qui l'animeront et des finalités auxquelles il devra aboutir. Ne devant pas être un produit de réflexes conditionnés par un discours idéologique se voulant dominant, une doctrine dogmatique enfermée dans le sans-issue d'un déterminisme politique au service de l'intérêt partisan, elle sera une reformulation de l'enseignement-apprentissage. Elle sera une réelle dynamisation de l'action pédagogique qui se chargera de vaincre cet artificialisme qui a favorisé la promotion de l'enseignement «enseignemental», au détriment de l'enseignement «formationnel». (L'enseignement enseignemental est un enseignement informel, sans but, sans objectif et sans finalité. Il ne suscite pas la curiosité de réflexion et, par conséquent, ne structure pas la mentalité scientifique Raisonnement logique et jygement méthodique-. L'enseignement formationnel vitalise l'instinct de rechercher pour découvrir. Il incite à la création). Devant être une démarche scientifique, un choix éclairé et hautement responsable, une option éducative et culturelle évolutive capable de se mettre en phase avec l'actualité, (les programmes d'étude et les méthodes d'enseignement devront être actualisés en fonction des progrès civilisationnels réalisés à l'échelle planétaire), cette politique éducative et culturelle réfléchira l'exigence qui l'anime. Elle ne sera pas pensée uniquement en termes de savoirs à dispenser mais aussi en termes de responsabilité vis-à-vis des générations montantes. Elle ne se confondra pas, comme d'habitude, en une alchimie politico-administrative. Elle ne s'enfermera pas dans de banales résurrections idéologiques. Elle «prioritarisera» la recherche-développement en matière de prospective éducative et culturelle. Elle s'intégrera dans une démarche globale et cohérente, c'est-à-dire en adéquation avec l'environnement interne et externe. Elle répondra aux exigences économiques, sociales et culturelles du développement durable auquel aspire la nation. Elle aura également à prendre effectivement en compte l'évolution constatée des tendances mondiales dans le domaine de l'éducation, de l'instruction et de la culture. Elle œuvrera à initier l'esprit à conjuguer le savoir dans le savoir-faire2 et dans le savoir-être3. Appelée à s'élever au-dessus des formules fourre-tout, abstraites et utopiques et être l'occasion d'un grand débat, elle sera une dynamique qui veillera à ce que les programmes d'étude et les méthodes d'enseignement évoluent de façon à correspondre au niveau intellectuel des élèves auxquels ils s'adresseront et à leur étape de développement psycho-mental et psycho-intellectuel. Devenant une clarification qui remédiera aux carences inexorablement comptabilisées, elle ne se réduira pas à d'aléatoires didactiques. Devant favoriser l'embrayage sur le changement planifié au profit d'une réussite scolaire de qualité, la philosophie qu'elle développera à cet effet, (promotion des constantes nationales et ouverture sur le monde) et l'objectif, (formation du citoyen en mesure d'évoluer au rythme de l'international sans inquiétude et sans trouble) qu'elle se fixera, ne seront pas enveloppés d'ambiguïté. Devant donc se créer d'admirables défis, cette politique éducative et culturelle ne s'inventera pas dans l'incertitude. Elle s'accomplira en investissant l'école de la mission qui est la sienne, (éduquer et instruire). Elle enseignera non seulement la connaissance mais aussi la sagesse, non seulement la compréhension des concepts mais aussi la vision harmonieuse des perspectives, non seulement la passion pour le rationnel mais aussi la passion pour le raisonnable. Destinée à assurer l'issue, (une scolarité de qualité), elle formera ce consensus social qui refusera de valoriser la confusion et l'amalgame, qui ne se laissera pas se prendre dans le tourbillon d'arguments fallacieux ou dans celui des idées démagogiques. Elle se mettra au service de l'élévation sociale, donc au service du mérite, en vulgarisant la culture de l'effort. Attentive à l'épanouissement de la société, elle œuvrera à développer en tout un chacun le sentiment de lui être utile et, partant, sa capacité de résister à tout ce qui tentera de le réduire à un esprit sans défense incapable d'agir et de réagir. Elle favorisera à cet effet le débat d'idées ouvert sur l'universel. Devant être un processus antinomique du totalitarisme qu'il soit politique ou culturel, a) elle s'opposera à toute tentative de vouloir «castrer» l'intelligence en la séquestrant dans un carcan idéologique qui régentera les idées et les valeurs ou en la condamnant à l'immobilisme et à faire dans le stéréotype ; b) elle apprendra plutôt à l'esprit à conquérir la latitude de prospecter, d'explorer, d'extrapoler en lui enseignant que la certitude est toujours relative et ce n'est qu'au moyen de successions de certitudes de moins en moins relatives qu'il approchera vers la certitude absolue qu'il n'atteindra jamais d'ailleurs. Elle lui enseignera, aussi, à lutter contre le discours qui tentera de l'aliéner ou d'appauvrir l'expression de sa pensée. Devant se confondre en une réflexion d'ensemble sur les pratiques organisationnelles à entreprendre et sur la manière dont les débats à mener s'associeront pour que s'accomplisse le développement durable national, a) la politique éducative et culturelle à mettre en œuvre ne privilégiera pas les solutions hâtives mais manifestera plutôt une prudence certaine dans son souci de prévoir et d'encadrer ; b) elle enseignera à tous ceux qui auront la charge de gérer la mission éducative et culturelle et celle de l'acte pédagogique d'user de beaucoup de souplesse, de beaucoup de célérité et de beaucoup de rigueur dans la recherche de la solution à tout ce qui risquerait d'opaliser son objectif, (faire échec à l'échec scolaire), dans la sélection des avis et des points de vue et dans le choix de la décision à prendre ; c) elle les incitera à manifester un souci réel de prendre acte des résultats atteints en vue de réajustements curriculaires. Devant se concevoir comme un processus qui se proposera d'apprendre à l'esprit à «être» et non seulement à «paraître», à s'exprimer à travers ses expériences, à interroger le monde en appelant à sa raison, à ennoblir le sens de l'initiative et à gérer ses investigations en usant d'une autonomie intellectuelle confirmée, a) elle ne se focalisera pas sur l'esprit du présent, (sur l'esprit mis en situation), mais sur celui qu'il sera. Tout en sélectionnant les étapes de son évolution mentale et intellectuelle, elle s'évitera de n'en considérer qu'un segment ; b) elle prendra acte de son aspiration à vouloir s'élever de l'état de dépendance vers l'état d'autonomie ; c) elle intronisera la nécessité du «progrès continu», ce qui suppose «un réarmement» systématique de l'esprit en vue de l'aider à réaliser son potentiel humain, (s'adapter au renouveau, s'accommoder de l'imprévu, développer son aptitude à entreprendre et à s'engager pour qu'aboutisse son ambition de «plus être» ; d) elle structurera un projet de société où tout un chacun devra savoir parce que la société humaine l'exige et où tout un chacun saura pour agir sur celle-ci afin de lui permettre d'améliorer sa condition d'être et d'évoluer. Devant se refuser d'édifier une société qui se contentera de se soumettre à cet instinct de base, (vouloir se complaire dans une condition d'assistée cédant à l'inertie), ou une société d'élite préoccupée par son seul auto-épanouissement, a) elle assurera la massification du savoir créateur de savoir-faire et développera en tout un chacun le désir de participer à l'amélioration de l'avenir commun aux hommes ; b) elle adoptera face à l'ampleur du programme de développement durable envisagé, une approche qui encourage l'aboutissement des aspirations et l'accomplissement des ambitions. Elle décongestionnera le système éducatif et culturel en l'affranchissant du monopole de ceux qui en ont fait le terrain de prédilection où leurs ambitions individuelles s'épanouissent, un rouage non identifié, un sous-système isolé de ce qui est supposé être l'appareil chargé de faire aboutir le développement national durable. Elle en fera cette force motrice qui nantira l'esprit de cette souplesse et de cette fonctionnalité intellectuelle afin que sa motivation ne subisse l'usure, afin qu'il ne doute plus de l'impact de ses efforts. Cependant cet affranchissement ne pourra s'accomplir que si les initiatives engagées à son endroit ne demeurent pas marginales ou même timides, ou encore perçues comme des menaces à l'adresse du système politico-administratif qui ne tolère pas, au risque de déclasser la nécessité d'embrayer sur l'autonomie du développement national, que l'on s'écarte des habitudes ou qu'on innove, quand bien même à l'occasion, encore moins que les normes auxquelles il a apporté son empreinte ne soient transgressées. -Elle n'ignorera pas qu'au-delà des connaissances acquises, des attitudes forgées et des aptitudes structurées, il existe cette aspiration naturelle qui anime l'esprit à opter obstinément pour la liberté d'entreprendre ce qu'il devra mettre en valeur. Se refusant de développer une culture d'érudition, elle ne prétend pas transformer l'élève en savant : a) elle se contentera de mettre à sa disposition les deux outils qui lui seront nécessaires et suffisants pour circonscrire ses lacunes et les combler. (Elle lui enseignera en l'occurrence le raisonnement logique et le jugement méthodique) ; b) elle lui apprendra à se dissocier de lui-même et de retrouver au plus profond de son être l'unité de ses aspirations pour qu'elles l'incitent à réaliser en fonction des données qu'il aura comprises, retenues et assimilées, une œuvre qui sera la sienne. Balisant l'évolution civilisationnelle, l'accélération du progrès scientifique et technologique et l'aspiration de la société algérienne à vouloir évoluer au rythme de l'international, elle canalisera le cheminement de la transition d'un paradigme éducatif dominant parce qu'il a prouvé ses limites, vers un paradigme authentiquement novateur qui permettra de cerner dans des dimensions, de moins en moins relatives, les changements appropriés à opérer à cet effet. (Le modèle éducatif existant s'est purement et simplement atrophié vu que ceux qui l'ont conçu et qui ont eu à le gérer, se sont éloignés de la pédagogie pour s'abandonner sur la pente d'un «administratisme» béat). Opérer ces changements ne signifie pas ajuster celui-ci aux préoccupations de l'heure, mais envisager de nouvelles dispositions qui : a) encourageront la créativité et non cette passivité qui prévaut ; b) promouvront des actions concertées et les initiatives qui jusque-là se sont, hélas, heurtées à un manque de coordination ou, à la limite, à l'interdit institutionnel et qui se sont par conséquent résolues à fonctionner à court terme, parfois même à vide ; c) n'examineront plus le système éducatif de l'extérieur mais du «dedans» ; d) évalueront les pratiques de gestion de la mission éducative et de l'acte pédagogique en n'usant plus de vulgaires contrôles bureaucratiques, mais en optant pour une véritable identification des problèmes et en définissant des mécanismes de soutien et de suivi à la planification à long terme pour qu'elle ne devienne une «fuite en avant», car comment peut-on faire évoluer la mission de l'école et procéder aux réajustements qui s'imposent, si on ne se préoccupe pas d'en suivre de manière critique la trajectoire, si au lieu de l'évaluer rigoureusement dans son unicité on n'en considère que des segments. La gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique telle que pratiquée par une technocratie qui persiste à cautionner l'indigence socioculturelle algérienne, témoignent jusqu'à aujourd'hui du peu d'intérêt qu'elle a à effectuer des examens critiques objectifs de la politique éducative et culturelle développée et à en évaluer les résultats atteints. En tous cas, l'opinion avisée déplore cette réticence à mettre en place des mécanismes susceptibles d'assurer une évaluation systémique périodique, en vue de juger de la concrétisation des objectifs fixés. Ceux qui en ont la charge se contentent de rendre compte des activités réalisées sans pour autant mesurer l'impact réel de celles-ci sur l'amélioration de la qualité du service. De toutes manières, malgré les obstacles qui peuvent être nombreux et les résistances qui peuvent être acharnées à l'endroit de la mise en application de cette politique éducative et culturelle créatrice de renaissance, l'heure est venue pour l'Ecole algérienne de mesurer, (d'apprécier), au regard de l'enjeu, les chemins de l'avenir, de dépasser les pesanteurs et les controverses stériles et de s'attacher à définir, à ériger et à consolider ce projet éducatif parce qu'il permet aux Algériennes et aux Algériens de conquérir leur avenir par une intégration active au progrès universel. L'heure est venue pour l'Ecole algérienne de finir avec l'âge ingrat. Cinquante ans c'est, somme toute, un âge suffisamment avancé pour qu'elle prétende à l'âge de raison et devienne une «Ecole intelligente». *Directeur de l'Education en retraite, ancien professeur-chercheur, Institut national de recherches en éducation Notes: 2. Le savoir-faire: consiste à savoir observer, interpréter les données, procéder à des déductions, formuler des prévisions, émettre des hypothèses, classer, communiquer, planifier, combiner. 3. Le savoir-être: mode de penser, d'interpréter et d'agir de mieux en mieux élaboré.