La Libye est plus que jamais un pays divisé. Si la situation reste confuse après le retour surprise de Khalifa Ghweil au pouvoir à Tripoli, en mettant hors jeu le gouvernement d'union nationale de Sarraj, soutenu par la communauté internationale, à Benghazi, dans l'est du pays, c'est une autre facette d'une Libye déchirée entre chefs de guerre qui prévaut. Entre la Tripolitaine, la Cyrénaïque et dans une moindre mesure le Fezzan, c'est le déchirement provoqué par des chefs de guerre en mal de pouvoir politique qui a tendance à rythmer la vie dans un pays où, malgré tout, la production d'or noir a repris. En fait, le coup d'éclat de Khalifa Ghweil de vendredi, qui a jeté une ombre sur l'avenir politique du pays après tant d'efforts de la communauté internationale pour 'pacifier'' les différentes factions rivales, dont Fajr Libya, à l'origine du soulèvement en 2011 contre Maamar Kadhafi, devait fatalement se produire. Le gouvernement d'union nationale de Sarraj, soutenu par l'Onu, a été de fait, selon des informations en provenance de Tripoli, 'démis'' par l'ancien chef de gouvernement de Tripolitaine, Khalifa Ghweil, qui a repris le pouvoir à Tripoli. Et ouvre immédiatement une nouvelle période d'incertitudes politiques, sociales et économiques pour les Libyens, mais surtout pour la communauté internationale, en particulier l'Algérie qui s'est investie à fond pour résoudre la crise libyenne. Et, surtout, pour maîtriser la menace à ses frontières qui viendrait des trafics en tout genre de groupes armés, y compris ceux de la filière djihadiste, fanatisés et prêts à des attaques terroristes sur le sol algérien. C'est dans ce sens que la situation confuse, qui règne à Tripoli depuis vendredi, avec le retour «au pouvoir» de l'ex-gouvernement issu de l'ancien Parlement de Tripoli, le Congrès général national (CGN), est une menace directe autant pour le retour à la légitimité des institutions libyennes que pour les pays de la région, qui redoutent que cette instabilité politique ne mette pour longtemps la sécurité et la stabilité de pays comme l'Algérie et la Tunisie, en danger. Car autant le 'gouvernement'' de l'est, dans la Cyrénaïque, sous l'autorité du général Haftar, soutenu par les pays occidentaux, la France en tête, donne des signes de normalisation de la situation en remettant la gestion des puits pétroliers aux autorités civiles, autant à l'ouest du pays, en Tripolitaine, les rivalités politiques entre factions armées risquent de replonger le pays dans une désastreuse et ruineuse guerre civile. Ce qui, fatalement, va pousser les soutiens occidentaux du général Haftar à des options dramatiques pour les Libyens: une insidieuse division du pays, entre une Libye sécurisée, qui produit du pétrole pour les pays de la rive sud de la Méditerranée, Italie et France en particulier, qui va maîtriser les flux migratoires avec les contrats long terme sur le pétrole du pays, et une Libye livrée au chaos que lui promettent des chefs de guerre. Engagés dans l'Est, riche avec son pétrole et ses terminaux pétroliers, les pays occidentaux vont livrer, comme toujours, à la gestion de l'Onu le reste du pays, pour se dédouaner de cette inexorable division de la Libye.