Le conseil exécutif communal convoqué, hier, par Boukhatem avait les relents d'une réunion de crise. Motif: une correspondance urgente, au contenu très grave, signée «Trésorier communal». En clair, le comptable public informe l'ordonnateur (le maire) que la Trésorerie est en situation de solde épuisé et ne peut honorer ni dépenses ni salaires de travailleurs. Il y a péril en la demeure, à en juger de la teneur de la lettre parvenue, en fin de journée du dimanche 16 octobre 2016, au courrier du cabinet du maire d'Oran. Textuellement, le Trésorier municipal y affirme qu'«à partir de la mise en application par nos soins de la correspondance n° 201, datée du 3 août 2015, relative à la mise en œuvre de la nouvelle définition du SNMG (Ndlr: l'entrée en vigueur dès le 1er août 2015 de la décision relative à l'abrogation de l'article 87 bis du code du travail définissant le salaire national minimum garanti, SNMG, fixé à 18.000 DA) d'un coût de 287.192.147 DA, la Trésorerie communale d'Oran en est arrivée actuellement à une situation d'épuisement de l'ensemble de ses rentrées et enregistre de ce fait un déficit financier sans précédent». Et le Trésorier communal de déclarer explicitement, par le biais de la même missive dont le bordereau d'envoi porte le n° 3966, daté du 16 octobre 2016, sous l'objet «Précision», que «La Trésorerie communale d'Oran se trouve dans l'incapacité de paiement d'aucune dépense publique ou privée, et ne peut même pas régler les salaires des travailleurs dans les mois à venir». Sur la base de cet état de fait, «Nous vous prions, monsieur le Président de l'APC, d'intervenir en urgence pour trouver une solution à cette crise». Le terme «crise» étant bel et bien utilisé par l'émissaire de la correspondance lui-même, cela rend le descriptif «réunion de crise» justifié, au moins sur le plan formel. Après débat et concertation de l'exécutif communal, présidé par Noureddine Boukhatem, durant trois bonnes heures, il a été décidé, en guise d'acte préalable à toute démarche, de répliquer à cette lettre, très mal reçue par l'exécutif communal, de rédiger un rapport circonstancié sur cette affaire, joint de la correspondance du Trésorier communal s'entend, qui devait être remis au wali hier après-midi. Au moment où se déroulait l'audience dans la salle de réunions, dans une ambiance assez tendue, un vice-président de l'APC tentait, depuis le hall, de joindre le DAL de la wilaya dans le but, semble-t-il, d'anticiper le feed-back de l'action-réaction liée à ces faits nouveaux auprès de l'exécutif de wilaya, histoire d'être sûr qu'on aura pris la bonne décision, côté municipal. LE PRETEXTE DES PROMESSES NON TENUES PAR LE MICL La directrice des Finances de la commune a été la première intervenante après le maire. Etant la mieux placée pour connaître ce qui est - supposé être - à l'origine de cette affaire, la financière municipale a fait savoir, en substance, qu'on n'est plus dans un scénario de menace de tarissement de liquidités à la Trésorerie à appréhender, mais bien pis, déjà devant le fait accompli, avec comme premiers incidents directs de la situation de rupture du solde, la cessation de paiement et le rejet par la Trésorerie communale de toutes les situations de règlement qui lui sont parvenues depuis le 14 septembre 2016. «Toutes les situations, à compter du 14 septembre dernier, nous ont été retournées du Trésorier avec la mention rejet pour absence de liquidités», a-t-elle indiqué. D'après elle, les motifs invoqués pour justifier cette incapacité de paiement étaient liés au fait que la subvention consacrée par le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales au profit de la wilaya d'Oran, d'un montant de 67 milliards de cts, pour faire face à 4 mois de salaires impayés de ses personnels (déficit dû aux 40% de la subvention pour faire face à l'augmentation des salaires et un autre manque plus énorme de 77 milliards lié aux 50% de la moins-value 2015, inscription par anticipation), n'est pas encore entrée dans le compte de la Trésorerie communale. Il en est de même pour l'autre subvention FCCL, de l'ordre de 28 milliards, au titre de charges de fonctionnement pour l'entretien des écoles primaires, et une troisième subvention destinée à l'acquisition de 27 bus, lequel argent promis par la tutelle mais non encore débloqué, selon les explications de la Trésorerie rapportées par la même financière communale. «C'est grave ! En guise d'argumentaire au rejet du règlement des situations depuis le 14 septembre, on nous explique au niveau de la Trésorerie communale qu'on payait les rémunérations des travailleurs à découvert ainsi que les PCD. Mais qui a donné l'ordre à ce qu'on paie les situations des PCD à découvert ou à partir des recettes de recouvrement ? Est-ce une priorité dans un contexte financier et budgétaire extrême ?». Se réservant le droit d'ester en justice le Trésorier communal, mais non avant de discuter des tenants et des aboutissants de cette affaire avec le chef de l'exécutif de wilaya, le maire Boukhatem a indiqué que «nous n'avons jamais eu un état de situation sur le compte de gestion du Trésorier communal, qui, bien plus grave, non seulement ne répond jamais à nos invitations, a préféré sciemment nous alerter à la dernière minute sur l'épuisement de la liquidité, alors que logiquement il devait nous tenir informés régulièrement sur l'évolution de la situation pour prévoir et anticiper. De même, il n'avait pas à faire de la gymnastique, en enlevant de ce compte-ci pour verser dans ce compte-là, comme bon lui semblait. Il devait, en vertu du code communal, me consulter en ma qualité d'ordonnateur communal, en tout acte de gestion comptable». DE PETITES SOLUTIONS A UN GROS PROBLEME Issue de cette situation, au moins compliquée, où on est arrivé au point où l'APC ne peut plus honorer des crédits déjà engagés, que ce soit de gestion-consommation ou d'équipement-investissement, y compris d'éventuelle incapacité à rémunérer son personnel à court et à moyen terme ? Entre autres suggestions, il a été proposé de reporter la quasi-totalité des opérations prévues au BS 2016 au BP 2017. Il a été question, dans la foulée, d'augmenter les tarifs de certains droits d'exploitation du domaine public, ainsi qu'une action coordonnée avec la police locale pour recouvrer les taxes de séjour (qui restent dérisoires devant les fausses déclarations d'hôteliers) et celles liées au droit de célébration des salles de fêtes. Des mesures s'apparentant à un emplâtre sur une jambe de bois, des annonces pour la consommation plutôt, tant le vrai problème persiste, celui de la Trésorerie communale.