La France nous juge de nouveau. Et sévèrement. Un rapport d'information sur la coopération européenne avec les pays du Maghreb a été débattu par la Commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale française avec comme point d'orgue les check-up complets de leurs dirigeants. Pour Paris, l'Algérie, la Tunisie et le Maroc sont malades de par la vulnérabilité physique de leurs présidents et roi respectifs. Une mission de six mois a décrété que ces pays sont au cœur d'une «double fragilité politique et sécuritaire» du fait même de l'omnipotence des chefs d'Etat. Au Tunisien Essebsi, on lui reproche son âge très avancé, à Bouteflika son incapacité physique à gouverner et à Mohamed VI une maladie latente. C'est dire que les sommets de ces trois pays ressemblent plus à un hospice ou un hôpital. La France paternaliste s'inquiète de la situation de ses anciennes colonies et surtout de ses contrats avantageux qu'elle truste contre des avantages individuels et une largesse dans la distribution des visas. Le regard français est sans concessions, exit les formules diplomatiques d'usage, mettant à nu les prétentions de ces pays à contrôler un islamisme rampant. D'Ennahda au pouvoir à Benkirane, adepte du double discours, à la déradicalisation algérienne présentée comme un exemple de réussite, Paris doute fortement de cette 'domptation'' à cause justement «d'une tradition politique chancelante». Qui dit incertitude politique dit forcément fragilité économique, dans la lecture des Français, qui peut provoquer «la révolution des ventres». Un scénario à forte éventualité qui risquerait de nuire aux intérêts de la France dans la région. L'analyse du député et président de la mission parlementaire française sur l'Algérie démontre, une fois de plus, les craintes suscitées à Paris par la guerre de succession à Bouteflika. Ce qu'on devine ici et qu'on tait, l'Assemblée française le débat publiquement. Pour eux, l'Algérie est «un pays qui donne une impression de fonctionnement mais où tout semble artificiel. Une chape de plomb pèse sur lui». Ce qu'on appelle chez nous l'immobilisme de l'Etat qui se complait dans un statu quo suicidaire. Ceux qui pensaient que les dossiers internes de l'Algérie resteront dans la sphère privée en sont pour leurs frais et rien ne sert de leur répéter que le pays est une grande maison en verre ordinaire capable de voler en éclats à la moindre tempête. Les Français sont dans leur logique de défendre leurs intérêts et d'en glaner d'autres quitte à faire dans le chantage, mais nos dirigeants de quelle logique peuvent-ils se prétendre pour continuer à nous tourner en ridicule aux yeux du monde extérieur ?