La liste des heureux élus autorisés à faire du montage automobile en Algérie, et donc de l'écrémage industriel, est connue. Elle a été annoncée alors que le système mis en place pour les importations de voitures a été suspendu. Il n'y aura en principe plus de licences d'importation de voitures et ce seront les 'maisons'' agréées qui se chargeront d'approvisionner le marché. Dans le lot des cinq bénéficiaires de cette décision du gouvernement, on recense deux entreprises de droit algérien, les autres étant des constructeurs étrangers (Peugeot, Renault et Nissan). En restreignant le nombre des entreprises de montage de véhicules, le gouvernement Ouyahia, pris à la gorge par un déficit budgétaire astronomique, ne veut tout simplement plus renouveler l'expérience des minoteries et compte autant mettre sur le marché national des véhicules produits localement que réduire à sa plus simple expression la facture des importations de voitures. Toujours fidèle à la démarche de réduction des dépenses. La stratégie d'Ouyahia est claire: d'abord soutenir les entreprises capables de répondre au marché local des véhicules, ensuite assainir la filière en évacuant les scories d'une politique commerciale qui a charrié le tout-venant sur ce segment particulier des véhicules légers dont la facture dans les années 2014 atteignait les 6 milliards de dollars d'importations. Sauf que le verrouillage (même s'il n'en a pas les apparences) du gouvernement du segment du montage de véhicules pose d'autres questions et renvoie au principe du 'premier arrivé, premier servi''. D'autant que le gouvernement doit mettre en œuvre les conditions idoines pour ces entreprises afin de produire assez de véhicules et à des prix compétitifs pour satisfaire le marché local et créer de l'emploi. Le chiffre estimatif est de plus de 450.000 véhicules/an à moyen terme. Et c'est là en fait que le 'hic'' se pose, car avec la dépréciation croissante du cours du dinar sur le marché des devises, il serait illusoire de proposer des véhicules montés localement à des prix abordables, pour ne pas dire compétitifs. L'autre danger qui menace cette industrie naissante du montage de véhicules en CKD et à moyen terme en SKD est qu'elle est autant boulimique en devises que le système des importations directes de voitures. En fait, le montage de véhicules revient tout simplement à importer des kits complets de voitures qu'il faut ensuite assembler, et donc il ne s'agit pas directement d'une industrie qui appelle à des partenariats locaux en mettant en place un marché de la sous-traitance. Cette technique est, selon les experts, plus coûteuse qu'une simple importation et dès lors ne profite pas à proprement parler à l'industrie automobile nationale. L'autre grief contre cette vision de l'industrie automobile prônée par le gouvernement est que hormis deux entreprises de droit algérien qui mettent sur le marché national des véhicules de marques mondiales connues pour la qualité de leurs produits, les deux groupes français Renault et Peugeot ne proposent pratiquement que des modèles de voitures qui ne circulent pratiquement pas sur le marché européen. Ainsi que le montant de leurs investissements modestes sur le marché local de l'industrie automobile. Beaucoup se sont même étonnés de cette précipitation du gouvernement à donner son feu vert à des constructeurs européens qui ne s'implantent sur le marché algérien que pour profiter des avantages financiers accordés par l'Etat mais, en retour, ne proposent que des modèles bas de gamme. Au final, cette stratégie sera autant boulimique en devises qu'improductive pour la mise en place d'un vrai tissu de sous-traitance industrielle devant booster l'industrie automobile dans le pays.