7e Conférence du PA et des présidents des Assemblées et des Parlements arabes: Boughali au Caire    Journée nationale du Chahid: 21e finale de la course des facteurs    Sahara occidental: une répression marocaine croissante face aux observateurs internationaux    G20: Attaf s'entretient à Johannesburg avec nombre de ses homologues    Cardiologie pédiatrique: tenue à Alger du 3e séminaire international sur le cœur de l'enfant    Le ministre de la Poste et des TIC préside une rencontre avec les responsables du secteur    Djezzy inaugure son "Espace Solutions" à Dar El Beida    Athlètisme/Championnat national hivernal: nouveau record national pour Bendjemaâ    Open Africain d'Alger: les juniors algériens dominent la 1e journée    Journée nationale de la Casbah: activités artistiques et expositions en février à Alger    Saadaoui reçoit plusieurs organisations syndicales agréées    Palestine occupée: Lazzarini dénonce les violations sionistes du droit fondamental à l'enseignement    Le dangereux terroriste abattu jeudi à Médéa identifié    Sonelgaz: L'APM décerne à Rome le prix "Excellence pour la Méditerranée" à M. Adjal    Réception de la majorité des projets de réhabilitation de la Casbah "fin 2025 et en 2026"    Le président de la République entame une visite de travail historique à Oran    Centres de formation au profit des citoyens concernés par la saison du hadj 2025    Une nécessité impérieuse qui ne saurait être ajournée    Grand Prix Sonatrach 2025: Azzedine Lagab (Madar Pro-Cycling) s'impose devant ses coéquipiers    Installation des commissions des Prix du président de la République "Ali Maâchi" et "Cadets de la culture"    LFP : Abdellaoui et Saâd Abdeldjalil suspendus    Tennis de table : Plus de 150 pongistes jeunes attendus au 3e Open Fédéral    Benstiti retient 26 joueuses pour le Soudan du Sud    LG Algérie lance des promotions spéciales    Une magistrate qui foule la loi aux pieds    Des entreprises sionistes exposent leurs armes à Abou Dhabi malgré les tensions    95 kg de cocaïne saisis et 39 dealers arrêtés    L'avis du médecin recommandé pour les diabétiques    L'imposture de la France qui affirme combattre la drogue au «nom de la santé publique»    «La justice sera intransigeante contre tout abus !»    Chaib participe à une cérémonie organisée par le Consulat général d'Algérie à Marseille    Ouverture d'une nouvelle ligne de transport de fret aérien entre l'Algérie et l'Arabie Saoudite    Recueillement,hommages et projet de développement au cœur de la commémoration    Mosquée Essayida, la dame mystère    Mouloudji participe aux travaux de la 44e session du Comité de la femme arabe    Fidélité au sacrifice des martyrs        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Céline, les musulmans et l'antisémitisme
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 18 - 01 - 2018

Je relève souvent dans les médias français des affirmations à l'encontre des peuples du sud et de l'est de la Méditerranée qui me laissent songeur. J'y vois l'expression condensée de ce que l'on pourrait qualifier de vision asymétrique où celui du nord regarde son voisin du sud avec, non seulement, de la condescendance mais aussi de la défiance et une mise en accusation systématique sur certains sujets épineux. L'un d'entre eux concerne l'antisémitisme. Avant de poursuivre, ouvrons une parenthèse importante afin d'éclairer le lecteur sur ce terme. Si l'on reprend la définition donnée par l'encyclopédie en ligne wikipédia, l'antisémitisme « est le nom donné de nos jours à la discrimination et à l'hostilité manifestées à l'encontre des Juifs en tant que groupe ethnique, religieux ou racial. Il s'agit, dans son acception originelle telle que formulée vers la fin du 19ème siècle, d'une forme de racisme se voulant scientifique, dirigée spécifiquement contre les Juifs (et non contre les peuples sémites, groupe linguistique) ». Autrement dit, dire « je suis sémite, je ne peux donc pas être antisémite » n'a aucune pertinence. Il s'agit ici d'un racisme visant les Juifs et il n'appartient pas à cette chronique de discuter ce terme. Prenons-le donc dans son acceptation habituelle de racisme anti-Juif. Fin de la parenthèse.
De manière régulière je tombe sur cette affirmation selon laquelle Mein Kampf, le livre d'Adolf Hitler est « un best-seller dans le monde arabe » (une variante : « un best-seller dans le monde musulman » (*). Un best-seller ? Rien que ça ? Combien d'exemplaires ? Des centaines de milliers ? Des millions ? On ne sait pas. On trouve bien quelques chiffres, notamment une version pirate publiée en Turquie (80 000 exemplaires dans un pays de plus de 80 millions d'habitants) mais le flou demeure. Personne de censé ne va nier que la judéophobie et l'antisémitisme existent dans le monde arabo-musulman. Elles alimentent les pires démons et d'effroyables pulsions sans oublier les inévitables obsessions complotistes. Mais affirmer, sans en donner la moindre preuve, que Mein Kampf est un best-seller relève d'une mise en accusation générale. C'est censé donner la preuve que l'antisémitisme y est collectif, partagé et érigé en manière consensuelle de penser.
Au Maghreb et au Machrek, j'entre autant que je peux dans les librairies. Je n'y ai vu qu'une seule fois une édition en langue arabe de Mein Kampf. C'était en Egypte et le libraire d'Alexandrie me confia qu'il n'en vendait guère un ou deux exemplaires par mois. Avait-il le droit de le faire ? « Ce n'est pas interdit mais ce n'est pas vraiment autorisé non plus », fut sa réponse sibylline. De mémoire, mais je peux me tromper, je ne pense pas qu'un éditeur algérien, tunisien ou marocain ait pris l'initiative de publier un tel torchon. Mais l'idée reçue est là. A Paris on vous assène une vérité qui ne souffre d'aucune contestation : Au Maghreb, comme dans le reste du monde arabe, les rayons des libraires crouleraient sous le poids des ouvrages antisémites. Pire, ces derniers seraient même exposés en vitrine au vu et au su de tout le monde.
J'ai repensé à tout cela en prenant connaissance des propos d'Antoine Gallimard, le très puissant et influent patron de la maison d'édition éponyme, dans le quotidien Le Monde (**). Renonçant, en raison de la polémique qu'a fait naître ce projet, à publier les pamphlets antisémites de l'écrivain Céline, il estime qu'« aujourd'hui, l'antisémitisme n'est plus du côté des chrétiens mais des musulmans, et ils ne vont pas lire les textes de Céline. » Relisons plusieurs fois cette déclaration. Que nous dit-elle ? D'abord, que les musulmans sont les vrais et seuls antisémites de notre époque. Autrement dit, le monde chrétien, au passif très lourd en la matière, ne serait plus suspecté. La méthode Coué… Ensuite, que la publication de ces écrits ne devrait pas poser de problème puisque les seuls antisémites qui existent encore, c'est-à-dire les musulmans, ne lisent pas Céline… On reste pantois devant un tel mépris et une telle stigmatisation. Les musulmans ? Antisémites, certes, mais incultes...
La polémique née du projet de nouvelle publication de Bagatelles pour un massacre (1937), L'Ecole des cadavres (1938) et Les Beaux draps (1941) - pourtant facilement accessibles sur Internet ou chez les bouquinistes de bord de Seine offre la possibilité d'une énième instrumentalisation de la question de l'antisémitisme dans le monde arabo-musulman. Mais il y a pire. Un certain Frédéric Vitoux, académicien, explique dans les colonnes de l'Obs - qui le présente comme un « fervent admirateur et biographe de Céline » - qu'il a toujours refusé de donner des conférences sur Céline « dans des pays du Maghreb où il existe un antisionisme d'Etat » (***). Là aussi, que faut-il comprendre et qu'est-ce qui est suggéré ? Qu'antisionisme signifie automatiquement antisémitisme ? Que les universitaires et étudiants du Maghreb, parce qu'ils soutiennent pour la plupart - la Palestine, ne sont pas dignes de bénéficier des travaux et réflexions (d'un académicien, s'il vous plait !) sur Céline car cela aggraverait leurs mauvais penchant ? On en est là…
(*) Les Inrockuptibles, 5 décembre 2015. Lire aussi « Les éditions pirates de «Mein Kampf» foisonnent dans le monde musulman », Le Point, 11 janvier 2016.
(**) 13 janvier 2018.
(***) La nouvelle affaire Céline, 4 janvier 2018.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.