Université de Msila Les juifs sionistes établissent, en effet, toujours cette équivalence qui brouille les pistes et les perspectives. Le recours systématique à cet amalgame a fini par rendre synonyme, dans le champ sémantique, les deux termes de l'équation. En dépit du fait que le sionisme s'est imposé comme un fait accompli, grâce à la loi des plus forts, et que le peuple palestinien a consenti d'énormes concessions sous la pression des grandes puissances et des Nations Unies qui en sont la création directe, les sionistes d'hier comme ceux d'aujourd'hui n'ont pas digéré encore l'idée du partage de la Palestine entre les deux peuples, et refusent de se faire à l'idée que les palestiniens puissent créer sur leurs terres usurpées leur propre Etat. D'où la réaffirmation constante qu'il ne peut y avoir en Palestine qu'un seul Etat confessionnel : L'Etat juif comme le qualifient les lois fondamentales d'Israël. « Mouvement nationaliste juif, le sionisme a atteint son but en 1948, avec l'accord des Nations unies, URSS comprise, sous le choc du génocide nazi dont les Juifs européens furent les victimes. Accepter cette légitimité historique de l'Etat d'Israël, comme a fini par le faire sous l'égide de Yasser Arafat le mouvement national palestinien, n'entraîne pas que la politique de cet Etat soit hors de la critique et de la contestation. Être antisioniste, en ce sens, c'est refuser la guerre sans fin qu'implique l'affirmation au Proche-Orient d'un Etat exclusivement juif, non seulement fermé à toute autre composante mais de plus construit sur l'expulsion des Palestiniens de leur terre ». L'instrumentalisation du génocide à des fins politiques Le génocide, l'holocauste, la Shoa, voilà les trois noms qui reviennent comme un leitmotiv dans le discours sioniste et dont on s'en sert pour justifier ou disculper les actes barbares d'Israël en Palestine occupée. L'antisémitisme en est une autre arme que l'on manipule pour intimider et museler la langue de quiconque tenterait de critiquer le sionisme conquérant et dominateur. La confusion sciemment entretenue entre antisionisme et antisémitisme, ne vise rien de moins qu' à « installer un interdit politique au service d'une oppression. C'est instrumentaliser le génocide dont l'Europe fut coupable envers les Juifs au service de discriminations envers les Palestiniens dont, dès lors, nous devenons complices. C'est, de plus, enfermer les Juifs de France dans un soutien obligé à la politique d'un Etat étranger, quels que soient ses actes, selon la même logique suiviste et binaire qui obligeait les communistes de France à soutenir l'Union soviétique, leur autre patrie, quels que soient ses crimes. Alors qu'évidemment, on peut être juif et antisioniste, juif et résolument diasporique plutôt qu'aveuglément nationaliste, tout comme il y a des citoyens israéliens, hélas trop minoritaires, opposés à la colonisation et solidaires des Palestiniens. « Brandir cet argument comme l'a fait [le] premier ministre [Français] aux cérémonies commémoratives de la rafle du Vél' d'Hiv', symbole de la collaboration de l'Etat français au génocide commis par les nazis, est aussi indigne que ridicule. Protester contre les violations répétées du droit international par l'Etat d'Israël, ce serait donc préparer la voie au crime contre l'humanité !Exiger que justice soit enfin rendue au peuple palestinien, pour qu'il puisse vivre, habiter, travailler, circuler, etc., normalement, en paix et en sécurité, ce serait en appeler de nouveau au massacre, ici même ! Une atteinte sécuritaire aux libertés fondamentales Que ce propos soit officiellement tenu, alors même que les seuls massacres que nous avons sous les yeux sont ceux qui frappent les civils de Gaza, montre combien cette équivalence entre antisémitisme et antisionisme est brandie pour fabriquer de l'indifférence. Pour nous rendre aveugles et sourds. « L'indifférence, la pire des attitudes » , disait Stéphane Hessel dans Indignez-vous ! , ce livre qui lui a valu tant de mépris des indifférents de tous bords, notamment parce qu'il y affirmait qu'aujourd'hui, sa « principale indignation concerne la Palestine, la bande de Gaza, la Cisjordanie ». Avec Edgar Morin, autre victime de cabales calomnieuses pour sa juste critique de l'aveuglement israélien, Stéphane Hessel incarne cette gauche qui ne cède rien de ses principes et de ses valeurs, qui n'hésite pas à penser contre elle-même et contre les siens et qui, surtout, refuse d'être prise au piège de l'assignation obligée à une origine ou à une appartenance. Cette gauche libre, Monsieur le Président, vous l'aviez conviée à marcher à vos côtés, à vous soutenir et à dialoguer avec vous, pour réussir votre élection de 2012. Maintenant, hélas, vous lui tournez le dos, désertant le chemin d'espérance tracé par Hessel et Morin et, de ce fait, égarant ceux qui vous ont fait confiance [1]». Les sept « péchés » capitaux de François Hollande Mais revenons maintenant à François Hollande dont la fidélité presque sans failles à Israël l'a induit à commettre, selon Plenel, sept fautes d'ordre divers. La première-« sidérante »- est d'avoir rompu en visière avec la politique « traditionnellement équilibrée de la France face au conflit israélo-palestinien » ; la seconde ressort d' « une faute intellectuelle » dans la mesure où elle confond « sciemment antisémitisme et antisionisme » ; la troisième, d' « une faute démocratique » portant gravement atteinte au droit fondamental de manifester, un droit qui n'entraîne pas une demande d'autorisation préalable. Pourtant vous voilà « qu'avec votre premier ministre, vous avez décidé, en visant explicitement la jeunesse des quartiers populaires, qu'un seul sujet justifiait l'interdiction de manifester : la solidarité avec la Palestine, misérablement réduite par la propagande gouvernementale à une libération de l'antisémitisme ». La quatrième faute commise par Hollande, toujours selon Plenel, relève d' « une faute républicaine » parce qu'elle confère « unedimension religieuse au débat français sur le conflit israélo-palestinien. » Et s'adressant directement à Hollande, Plenel ajoute que « C'est ainsi qu'après l'avoir réduit à des « querelles trop loin d'ici pour être importées » , vous avez symboliquement limité votre geste d'apaisement à une rencontre avec les représentants des cultes. Après avoir réduit la diplomatie à la guerre et la politique à la police, c'étaitautour de laconfrontation des idées d'être réduite, par vous-même, à un conflit des religions. Au risque de l'exacerber. Là où des questions de principe sont en jeu, de justice et de droit, vous faites semblant de ne voir qu'expression d'appartenances et de croyances. [...] Il y a trente ans, la « Marche pour l'égalité et contre le racisme » fut rabattue en « Marche des Beurs », réduite à l'origine supposée des marcheurs, tout comme les grèves des ouvriers de l'automobile furent qualifiées d'islamistes parce qu'ils demandaient, entre autres revendications sociales, le simple droit d'assumer leur religion en faisant leurs prières. » La cinquième faute commise est d'ordre « historique » dans la mesure où elle consiste à isoler « la lutte contre l'antisémitisme des autres vigilances antiracistes. Comme s'il fallait la mettre à part, la sacraliser et la différencier. Comme s'il y avait une hiérarchie dans le crime contre l'humanité, le crime européen de génocide l'emportant sur d'autres crimes européens, esclavagistes ou coloniaux. Comme si le souvenir de ce seul crime monstrueux devait amoindrirl'indignation, voire simplement la vigilance, vis-à-vis d'autres crimes, de guerre ceux-là, commis aujourd'hui même. Et ceci au nom de l'origine de ceux qui les commettent, brandieà la façon d'une excuse absolutoire alors même, vous le savez bien, que l'origine, la naissance ou l'appartenance, quelles qu'elles soient, ne protègent de rien, et certainement pas des folies humaines. Ce faisant, votre premier ministre et vous-même n'avez pas seulement encouragé une détestable concurrence des victimes, au lieu des causes communes qu'il faudrait initier et promouvoir. Vous avez aussi témoigné d'un antiracisme fort oublieux et très infidèle. Car il ne suffit pas de se souvenir du crime commis contre les juifs. Encore faut-il avoir appris et savoir transmettre la leçon léguée par l'engrenage qui y a conduit : cette lente accoutumance à la désignation de boucs émissaires, essentialisés, caricaturés et calomniés dans un brouet idéologique d'ignorance et de défiance qui fit le lit des persécutions. Or comment ne pas voir qu'aujourd'hui, dans l'ordinaire de notre société, ce sont d'abord nos compatriotes d'origine, de culture ou de croyance musulmane qui occupent cette place peu enviable ? Et comment ne pas comprendre qu'à trop rester indifférents ou insensibles à leur sort, ce lot quotidien de petites discriminations et de grandes détestations, nous habituons notre société tout entière à des exclusions en chaîne, tant le racisme fonctionne à la manière d'une poupée gigogne, des Arabes aux Roms, des Juifs aux Noirs, et ainsi de suite jusqu'aux homosexuels et autres prétendus déviants ? Ne s'attarder qu'à la résurgence de l'antisémitisme, c'est dresser une barrière immensément fragile face au racisme renaissant. Le Front national deviendrait-il soudain fréquentable parce qu'il aurait, selon les mots de son vice-président, fait « sauter le verrou idéologique de l'antisémitisme » afin de « libérer le reste » ? L'ennemi de l'extrême droite, confiait à Mediapart la chercheuse qui a recueilli cette confidence de Louis Aliot, « n'est plus le Juif mais le Français musulman » ( lire ici notre entretien avec Valérie Igounet ). De fait, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), dont vous ne pouvez ignorer les minutieux et rigoureux travaux, constate, de rapport en rapport annuels, une montée constante de l'intolérance antimusulmane et de la polarisation contre l'islam (lire nos articles ici et là ). Dans celui de 2013, on pouvait lire ceci, sous la plume des sociologues et politologues qu'elle avait sollicités : « Si on compare notre époque à celle de l'avant-guerre, on pourrait dire qu'aujourd'hui le musulman, suivi de près par le Maghrébin, a remplacé le juif dans les représentations et la construction d'un bouc émissaire. » L'antiracisme conséquent est celui qui affronte cette réalité tout en restant vigilant sur l'antisémitisme. Ce n'est certainement pas celui qui, à l'inverse, pour l'ignorer ou la relativiser, brandit à la manière d'un étendard la seule lutte contre l'antisémitisme. Cette faute, hélas, Monsieur le Président, est impardonnable car non seulement elle distille le venin d'une hiérarchie parmi les victimes du racisme, mais de plus elle conforte les moins considérées d'entre elles dans un sentiment d'abandon qui nourrit leur révolte, sinon leur désespoir. Qui, elles aussi, les égare ». La sixième faute commise par Hollande aura été « une faute sociale » en ce qu'elle a désigné « la jeunesse des quartiers populaires en classe dangereuse ». La preuve en est que son premier Ministre: « ...n'a pas hésité à faire cet amalgame grossier lors de son discours du Vél' d'Hiv', désignant à la réprobation nationale ces « quartiers populaires » où se répand l'antisémitisme « auprès d'une jeunesse souvent sans repères, sans conscience de l'Histoire et qui cache sa "haine du Juif " derrière un antisionisme de façade et derrière la haine de l'Etat d'Israël » . La septième faute, enfin, commise par le président français aura été « une faute morale » selon Plenel dans la mesure où elle a emprunté « ...le chemin d'une guerre des mondes, à l'extérieur comme à l'intérieur. En cette année 2014, de centenaire du basculement de l'Europe dans la barbarie guerrière, la destruction et la haine, vous devriez [ Monsieur le président] pourtant y réfléchir à deux fois. Cet engrenage est fatal qui transforme l'autre, aussi semblable soit-il, en étranger et, finalement, en barbare – et c'est bien ce qui nous est arrivé sur ce continent dans une folie destructrice qui a entraîné le monde entier au bord de l'abîme. [...] Monsieur le Président, cher François Hollande, vous avez eu raison d'affirmer qu'il ne fallait pas « importer » en France le conflit israélo-palestinien, en ce sens que la France ne doit pas entrer en guerre avec elle-même. Mais, hélas, vous avez vous-même donné le mauvais exemple en important, par vos fautes, l'injustice, l'ignorance et l'indifférence qui sont le ressort[2] ». La double allégeance juive en France On reproche souvent à tort à certaines catégories d'immigrés ou d'origine immigrée, notamment aux enfants issus de l'immigration algérienne, mais français en vertu du « droit du sol », de faire allégeance au pays de leurs parents, mais l'on se tait complètement sur la double allégeance juive dont le caractère confessionnel, politique et instrumental « crève les yeux ». Les exemples du traitement différentiel, à géométrie variable, de la question relative à la double nationalité, sont légion, et en appellent à ce questionnement de fond : Un citoyen français enrôlé volontaire dans une armée étrangère en opération de guerre contre un autre peuple, et sans qu'il soit pourvu d'un« mandat explicite du gouvernement français, peut-il se prévaloir de la nationalité française? » C'est pourtant le cas de Gilad Shalit, ce caporal de l'armée israélienne capturé le 25 juin 2006 par les Palestiniens. Celui-ci « peut -il se prévaloir de la nationalité française et réclamer es-qualité l'intervention diplomatique du gouvernement français ? Son engagement dans l'armée israélienne, sans mandat du gouvernemental français » ne devrait-il pas entraîner « sinon la déchéance de sa nationalité, à tout le moins la caducité de son droit à invoquer la protection de la nationalité française? [...] La double allégeance justifie-t-elle la confusion juridique? exonère t'elle de toute obligation de réserve? Autorise-t-elle toute licence au point de constituer un « passe droit »? Contrairement à toute attente, le Quai d'Orsay s'était déclarer à de multiples reprises prêt à intervenir auprès des palestiniens aux fins qu'ils relâchassent ce caporal, parce qu'il était de « nationalité française », omettant qu'il était aussi israélien et c'était au nom de cet Etat qu'il combattait, et non sous le drapeau français... Et que dire par ailleurs de « la nomination de Arno Klarsfeld, juriste français et réserviste de l'armée israélienne, au poste de conseiller du ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy ? » Ne reflète-t-elle pas une influence grandissante de l'élément juif au sein des institutions de l'Etat français au point d'infléchir sa politique dans le sens des intérêts de l'Etat israélien ? Cette double allégeance des juifs de France a pour conséquence de créer une interdépendance entre les deux Etats, et « Le service militaire dans l'armée israélienne constitue[...] un passage obligé à des promotions politico-administratives en France... » Ces promotions, jointes à l'émergence d'un large courant d'islamophobie, constituée de pseudo chercheurs, de « penseurs », d'écrivains et d'écrivains-journalistes-philosophes, ont contribué puissamment à conforter les positions politiques « morales et éthiques » de ce lobby sioniste en lui donnant une légitimité et une crédibilité jamais atteintes auparavant. L'islamophobie rampante La montée en flèche de l'islam « populiste » en Algérie en 1990, incarné par le FIS dissous, les attenants du 11 septembre 2001 attribués à al Qaida, mais sans preuves irréfutables[3], la guerre en Afghanistan (2001-2002), celle d'Irak (1990-1991) et de 2003, ainsi que celle du Liban en 2006, tels sont en substance les évènements marquants qui ont fourni les ingrédients nécessaires ayant alimenté la littérature, déjà latente, d'une islamophobie qui ne dit pas son nom[4], et qui n'a pas manqué de faire le lit en Occident, du sionisme politique, et notamment en France, l'un des pays d'implantation de la plus forte communauté juive d'Europe. Cette islamophobie a permis en effet de faire sortir de l'anonymat relatif où elles étaient confinées jusque alors certaines figures en les projetant au devant de la scène politico-médiatique. Ainsi en est-il de la chercheuse de l'INED, Michèle Tribalat, spécialiste de l'immigration. Tant que cette chercheuse s'en tenait strictement à son métier de spécialiste de l'immigration, elle produisait un travail honnête et impartial, mais qui demeurait néanmoins quasi confidentiel. Dans l'un de ses ouvrages consacré à ces communautés d'immigrés, elle exprimait même de l'empathie à leur égard.[5] Mais, soudain, elle fit volte-face et devint non seulement anti-immigré en faisant sienne les thèses du Front National au point que Marine Le Pen la cite favorablement, mais devient aussi et foncièrement « allergique » à l'islam en lequel elle voit la forme vivante et incarnée de la régression et de l'obscurantisme et dont la présence en France menacerait les fondement de la laïcité républicaine.[6] Avec l'islam, elle a trouvé le filon. Sa visibilité au niveau hexagonal, elle la tient, à partir de 1997 désormais, de l'exploitation de toutes les tares, réelles et supposées, de l'islam. Dans un ouvrage qu'elle a publié en collaboration avec Jeanne -Hélène Kaltenbach, intitulé La République et l'islam. Entre crainte et aveuglement[7], Tribalatreprend l'argumentation essentielle qu'elle a développée dans Dreux, voyage au cœur de..., à savoir que l'islam est rebelle à la laïcité et constitue par là même un danger mortel pour celle-ci, voire même pour la cohésion de la nation française. Ce livre, qui « ne se fonde sur aucune enquête de terrain » a été cependant « encensé par la plupart des médias nationaux et régionaux, via les critiques flatteuses des intellectuelles médiatiques... »[8] L'ouvrage Dreux, voyage au cœur du malaise français, à l'enquête duquel j'ai pris une part active avant de désavouer l'exploitation et l'analyse spécieuse qui en a été faite des données recueillies sur le terrain, avait été également, après sa sortie, encensé et plébiscité largement non pas à cause de sa teneur « scientifique », mais justement en raison de l'amalgame qu'il comporte et des propos imputés de manière mensongère aux enquêtés des quartiers difficiles, comme les Chamards... Ces écrivains qui ont fait de l'islam leur « fond de commerce » En effet, bon nombre d'autres chercheurs et écrivains de tous acabits ont découvert eux aussi, avant et après cette chercheuse, dans l'islam, une source d'inspiration et un motif puissant de défoulement et d'expression du « refoulé » : la haine de l'arabe et du musulman. Le juif sioniste y trouve là un motif de satisfaction, et un renfort inespéré pour faire triompher ses idées dominatrices, et négatrices des droits fondamentaux du peuple palestinien. Au nombre des écrivains qui doivent leur célébrité plus aux seules invectives de l'islam qu'à leur talent intrinsèques, je citerai pêle-mêle le romancier Michel Houelbecq, qui avait qualifié l'islam de religion « stupide », de l'italienne Oriana Fallaci[9], qui avait traité les Arabes de « sales », d' « arriérés », du directeur de l'hebdomadaire Le Point qui ne dissimule pas son islamophobie, et qui l'affiche même à la surface ; enfin, je peux citer encore d'autres écrivains-journalistes et des journalistes-écrivains dont la haine de l'arabe et de l'islam donne du grain à moudre : Bernard-Henri Lévy, Alain Finkielkraut, Pascal Bruckner, Eric Zemmour, Marek Halter, Alexandre Adler, Thérèse Delpech, Frédéric Encel, François Heisbourg, André Glucksmann, Mohamed Sifaoui[10], Yves Charles Zarka... et la liste est loin d'être close. En effet, le point commun à tous ces auteurs, c'est de réduire l'islam à trois dimension : fanatisme, antisémitisme, délinquance. Pour Alexandre Adler, tout comme pour Bernard-Henri Lévy, l'islam se définit comme un « fascisme vert », tandis que sous la plume du célèbre éditorialiste du Figaro, Yvan Rouffiol, il se décline sous la couleur d'un « nazi-islamisme ». En France, on peut dénigrer, diffamer et insulter les Arabes, les musulmans, et profaner même leur prophète et livre saint, sans encourir le moindre blâme. Au contraire, cela attire plutôt sympathie et visibilité aux auteurs de telles insultes. Par exemple, les Houellbecq, les Fallaci, les Delpech, les Tribalat, et tous ceux qui se sont donnés à cœur joie en tenant des propos racistes envers l'islam et les arabes n'ont jamais fait l'objet de censure, ni de réprobation publique, ni de poursuite judiciaire. Cependant, la moindre critique, bénigne soit –elle, à l'endroit des juifs ou de l'Etat juif, suscite de grandes réprobations suivies d'accusation d'antisémitisme. La justice elle-même ferme les yeux sur les incitations à la haine dirigée contre les arabes et les fidèles de cette religion. Autrement dit : « Toute critique (...) de la politique israélienne, qu'elle émane d'arabes, de musulmans ou même d'intellectuels ou de personnalités de tradition culturelle ou religieuse juive, est assimilée à de l'anti-sémitisme. Ainsi quand l'écrivain Renaud Camus, auteur d ́un livre sur «la campagne de France», relève que les principaux chroniqueurs de France- culture, la radio de l'élite culturelle française, radio d'Etat tout de même, sont de confession juive, un tollé accueille ses propos, relayé par le journal Le Monde, qui l'accuse de favoriser l' « antisémitisme». Renaud mentionne ce fait dans quelques pages, d'une manière incidente, dans un volumineux ouvrage de 700 pages. Mais cela a suffi pour que soit déclenchée une campagne contre lui. Mais quand un auteur de roman policier, Maurice Le Dantec, se lie avec un groupe d'extrême droite française, et justifie la violence anti-arabe et anti- musulmane, son éditeur, la prestigieuse maison d'édition Gallimard, se contente de déplorer ses propos sans pour autant rompre sa collaboration avec lui[11] ». Mais le pire de tout, c'est quand le diktat de l'antisémitisme s'exerce sur des personnalités politiques françaises au point qu'elles finissent par se plier, sans rechigner, aux demandes parfois pressantes des personnalités juives, intellectuelles ou religieuses. Cela montre à quel point s'exerce l'ascendant de ces dernières sur des hommes politiques censés représentés la souveraineté de l'Etat français. L'exemple des plus frappants nous est fourni en effet par le pouvoir exorbitant dont dispose Bernard-Henri Lévy, pouvoir mesuré à l'aune de ses bras longs, de son influence sur les hommes et les institutions de l'Etat français : il lui a suffit de passer un coup fil à Jean Jacques Aillagon, l'ex- ministre de la culture, pour que le fameux film intitulé « La route 181, fragments d ́un voyage en Palestine-Israël», soit déprogrammé ! Réalisé par un israélien, Eyal Sivan, et un palestinien, Michel Khelifi, ce film avait eu le tort de révéler certaine vérité qui n'était pas du goût de Bernard-Henri Lévy et pour qui ce documentaire comportait une vision « unilatérale » ! L'ex-ministre de la Culture qui se plia aux exigences de BHL dont il prit la parole pour argent comptant, dut censurer le film en question sans qu'il ait pris nullement la peine de le faire visionner... BHL qui joue et remplit souvent la triple fonction d'écrivain-philosophe et d' « Ambassadeur » de France et d'Israël auprès des pays étrangers amis et hostiles ( Lybie, Soudan, Bosnie...), est l'homme capable, on s'en doute, d'influer sur le comportement et la décision de certains hommes politiques aussi bien de droite que de gauche. Dès lors, on comprend la complaisance avec laquelle un Aillagon s'est empressé de satisfaire aux lubies de ce « philosophe » engagé depuis bien longtemps au service de l'expansionnisme sioniste. Ejecté du gouvernement Raffarin par suite de la défaite électorale de la droite aux élections régionales du 28 mars 2004, Aillagon ne pourra plus désormais empêcher le film censuré de se projeter dans les salles. Cependant, le cinéaste israélien sera accusé d'avoir produit un documentaire antisémite, et notamment par l'un des chefs de file de la mouvance sioniste en France, Alain Finkielkraut, qui se livre à une chasse désespérée aux indices « antisémites ». Le Conseil Représentatif des Institutions Juives de France ( CRIF) instrument au service du sionisme politique Le CRIF, (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France), qui est censé pourtant favoriser le dialogue intercommunautaire et contribuer à l'apaisement d'éventuelles tensions entre juifs et musulmans, voire même censé les aider à ne pas importer « le conflit » du Proche Orient en France, se place paradoxalement à la pointe de la propagande anti- musulmane et anti-arabe. Son président, Roger Cukiermann, n'avait-il pas salué publiquement, sans qu'il ne fût jamais démenti, le succès du chef de file de l'extrême droite, Jean Marie Le Pen, aux élections présidentielles de 2002 ? N'y a-t-il pas vu le signe d'une «bonne leçon aux Arabes» ? Aucune voix ne s'était alors élevée pour dénoncer ces dérapages racistes, comme si la lutte antisémite autorisait toutes les extravagances anti- musulmane, arabe et noire... « De même, lorsque des organisations juives organisent des concerts de gala pour récolter de l'argent pour l'armée israélienne et «le bien être du soldat juif», nul, non plus, ne se hasarde à critiquer cette opération de promotion d'autant plus inopportune et provocante que son principal bénéficiaire apparaît, tout de même, au regard du Droit international, comme une «armée d'occupation» en Cisjordanie, à Gaza et en Syrie. Pas une critique non plus quand Israël se livre à une destruction systématique du Liban, en violation flagrante du Droit Humanitaire International, en représailles à une capture de deux soldats israéliens au sud-Liban, alors que les Israéliens détiennent arbitrairement plusieurs milliers de prisonniers arabes, palestiniens, libanais et jordaniens. Indice complémentaire de la dégradation du sens civique national, pas une objection n'a été soulevée pour contester la qualité de « français » au caporal Shalit, « le nouveau soldat Ryan » des temps modernes. Plus grave, nul dans la classe politique ou la presse ne s'est hasardé à soulever le problème de la dualité d'allégeance des bi- nationaux franco-israéliens dans l'exercice de responsabilités politiques ou militaires en France ou en Israël, particulièrement en temps de guerre. Le CRIF s'est d'ailleurs dans le passé opposé à des opérations conjointes israélo-palestiniennes comme pour maintenir le clivage ambiant. Il s'est ainsi notamment opposé à la tenue d'une conférence de presse conjointe, dans un collège de Nice dans le sud de la France , entre Mme Leila Shahid, ancienne représentante de la Palestine en France, et de M. Michel Warshavski, écrivain israélien, opposant à la politique israélienne, au motif que l'école française ne devait être un lieu de débat en France. Ce qui donne à penser que pour le Crif, particulièrement pour son représentant dans le sud de la France , le député Rudy Salles, auteur de la demande d'interdiction, seuls les inconditionnels de Sharon et de ses successeurs ont droit de parole en France. Sans risquer de se contredire, le Crif avait pourtant demandé et obtenu que les élèves français du sud de la France , de toutes les confessions, (chrétiens, juifs et musulmans), se rendent à Auchwitz, en Pologne, en un voyage de recueillement dans cet ancien camp de concentration des Juifs du régime nazi. Ce voyage, auquel les parents des élèves arabes avaient donné leur accord, devait avoir une fonction pédagogique visant à dénoncer les horreurs de la guerre et du racisme. La pédagogie ne saurait être à sens unique. L'annulation de la conférence de Leila Shahid à Nice a entrainé symétriquement l'annulation du voyage d'Aushwitz par les parents des élèves arabes, qui estimaient quil ne saurait y avoir deux poids deux mesures dans la lutte anti-raciste. C'est au CRIF, d ́ailleurs, que Jean Pierre Raffarin, a conféré, le 18 mars 2004, trois jours avant les élections régionales, le droit d'être associé à la police de l'internet pour dépister les sites «anti-sémités». Un droit qui constitue un privilège exorbitant, en contradiction avec le principe de légalité, un des principes fondateurs de la République française. Le CRIF n'a pas attendu cette faculté pour faire la police à l'égard de toute opinion dissidente, y compris au sein des intellectuels de culture ou de religion juive. C'est ainsi que coup sur coup, le sociologue Edgar Morin, qui s'était désolidarisé de la politique du gouvernement d'Ariel Sharon, de même que le politologue américain Norman Finkelstein, qui avait rédigé un ouvrage sur «l'industrie de l'holocauste», qui constitue une «réflexion sur l'exploitation de la souffrance des juifs», ont été poursuivis en justice par l'association France-Israël pour diffamation à l'égard d'Israël. L'humoriste franco-camerounais Dieudonné a payé au prix fort le fait d'avoir caricaturé l'extrémisme de Sharon, en adaptant le salut nazi «Heil Hitler», en «IsraHeil». Interdit d'accès de certaines salles de concert, notamment le célèbre «Olympia» de Paris, il a, lui aussi, été poursuivi en justice «pour incitation à une haine à caractère racial». Robert Menard, responsable de l'organisation «Reporters sans Frontières», a déploré, lors du procès Dieudonné, le 2 avril 2004, «l'espèce de régression de la liberté d'expression» en France, dénonçant une «communautarisation de la pensée», phénomène, qui aboutit, selon lui, à faire que «si vous n'êtes pas juif, vous ne pouvez parler des juifs. La dernière passion du Christ», le film de Mel Gibson relatant le crucifixion de Jésus Christ, en est la dernière manifestation. Les grands producteurs français en ont refusé sa commercialisation au motif qu'elle relançait la responsabilité des juifs dans la mort du Christ et favorisait un renouveau de l'antisémitisme. Comme si les actes de quelques rabbins qui passent pour avoir ordonné, il y a deux mille ans, la mort de Jésus engageaient la responsabilité de tous les Juifs, religieux ou athées, pour l'éternité et à travers le temps, de la même manière que les attentats anti- occidentaux d'Al-Qaida ou de toute autre organisation ne sauraient rejaillir sur tous les Arabes et tous les Musulmans, condamnés par l'opinion occidentale à en assumer la responsabilité pour l'éternité. En raison de la collaboration dont ont fait preuve les autorités françaises avec le régime nazi, durant la 2eme guerre mondiale (1939-1945), et de leur contribution à la déportation des Juifs de France vers les camps de concentration, l'antisémitisme est un sujet sensible en France. Accusation infamante, elle condamne quiconque en est l'objet à une sorte d'ostracisme. L'accusation d'«anti- sémitisme» est en quelque sorte l'arme de destruction massive absolue et équivaut à une condamnation absolue. Elle constitue l'arme de dissuasion par excellence pour neutraliser toute critique à l ́égard de la politique israélienne. Mais à force de la brandir à chaque bout de champ, il est à craindre quelle ne perde de son efficacité. De la même manière, à force de vouloir substituer l'islamophobie à la judéophobie pour se dédouaner de l'antisémitisme traditionnel récurrent à la société française, il est aussi à craindre que l'on ne perpétue une autre forme de racisme, également hideuse, également condamnable »[12] [1] Edwy Plenel : « Palestine : Monsieur le Président, vous égarez la France » In (http://www.bondy-autrement.org/index.php/un-autre-monde/66-palestine/2697-palestine-monsieur-le-president-vous-egarez-la-france) [2] Edwy Plenel, op.cit. [3] Lire Thierry Meyssan, 11 septembre. L'effroyable imposture, Paris, Editions Carnot, 2002. [4] Cf.Thomas Deltombe, l'Islam imaginaire. La construction médiatique de l'islamophobie en France (1975-2005), Paris, La Découverte, 2005 ;Vincent Geisser, La nouvelle islamophobie, Paris, La Découverte, coll. Sur le vif, 2003 ; Antisémitisme : l'intolérable chantage. Israël-Palestine, une affaire française ?( ouvrage collectif),, La découverte, Paris, 2003 [5] Lire Michèle Tribalat, Faire France. Une enquête sur les immigrés et leurs enfants. Préface de Marceau Long, Paris, La Découverte, 1995. [6] Lire : Dreux, Voyage au cœur du malaise français, Paris, La Découverte/ Syros, 1999 [7] Paris, Gallimard, 2002. [8] Vincent Geisser, La nouvelle islamophobie, Paris, La Découverte, coll. Sur le vif, 2003, p.42 [9] Cf. La Rage et l'Orgueil, Paris, Plon, 2002, et notre ouvrage, Les enfants illégitimes de la République, Paris, Maisonneuve&Larose, 2004 [10] Auteur, entre autres énormités, d'un ouvrage intitulé Al-Qaïda Maghreb Islamique. Le groupe terroriste qui menace la France, Paris, éditions Encre d'Orient, 2010. [11] René Naba De l'accusation d'antisémitisme comme arme de dissuasion. Inhttp://www.renenaba.com/de-laccusation-dantisemitisme-comme-arme-de-dissuasion/ [12] René Naba, op.cit.