Les Russes ont voté hier dimanche et ont, sans surprise, porté pour la quatrième fois au pouvoir l'homme fort du pays, Vladimir Poutine. Crédité de 70% des votes selon des sondages et avant la proclamation officielle des résultats hier en milieu de journée, le président russe a pratiquement été déclaré vainqueur d'une présidentielle sans enjeux, le résultat étant connu d'avance. La preuve, le candidat Poutine n'a pratiquement pas fait de campagne électorale, mais juste deux interventions assez 'musclées'' devant le Parlement où il a vanté la force de persuasion des nouveaux missiles russes. Sinon, l'homme fort du Kremlin a largement dominé ses frêles adversaires, le millionnaire Pavel Groudinine, candidat du Parti communiste, crédité de 7% des voix, l'ultranationaliste Vladimir Jirinovski, de 5%, et la journaliste libérale Ksénia Sobtchak (1-2 %). Le seul qui pouvait empêcher le candidat Poutine de dormir est l'opposant Alexeï Navalny, déclaré inéligible. En fait, cette élection présidentielle n'a d'intérêt pour les autorités que par le taux de participation, les Russes en majorité ayant surtout voté pour Poutine, qui a été le seul à pouvoir assurer la stabilité et la reprise économique du pays après le chaos des années 1990 et la fin du communisme. Pour les Russes des campagnes comme pour ceux des grandes villes, l'arrivée de Poutine après Eltsine a été marquée par le retour de la nourriture dans les magasins d'Etat, du travail, de logements et, surtout, un accès plus franc aux produits de large consommation. Même s'ils ont laissé un peu de leur liberté, les Russes ont, depuis la fin de l'ère soviétique, toujours voté pour l'ancien membre du KGB, reconverti dans la politique. Vladimir Poutine devrait assurer un quatrième mandat à 65 ans et diriger le pays jusqu'en 2024, près d'un quart de siècle après avoir été désigné comme successeur par Boris Eltsine. Même s'il dirige le pays d'une main de fer, le président Poutine ayant toujours écarté, d'une manière ou d'une autre, parfois violemment, ses adversaires politiques, il est pourtant largement soutenu par les Russes qui ont des souvenirs terribles des années de communisme avec les chaînes interminables devant les magasins d'Etat, les rationnements alimentaires... Aujourd'hui, avec la crise diplomatique avec l'Occident née de l'assassinat d'un ancien espion russe à Londres, il est plus que jamais soutenu autant par ses partisans, notamment une jeunesse qui n'a pas connu le communisme, comme par ceux qui ne voient en lui, en Russie même et dans les rangs de l'armée, que le seul homme capable d'affronter les pays occidentaux, les Etats-Unis avec leur arsenal militaire en tête. Mais, ce sera la quatrième et la dernière fois que Poutine brigue un mandat présidentiel, selon la Constitution russe, et qu'il a promis de ne pas changer. Mais, ce dernier mandat du président russe sera particulièrement délicat avec la crise diplomatique actuelle avec la Grande-Bretagne et qui risque de s'étendre aux pays européens, l'embargo économique exercé par Washington et l'UE pour faire pression contre Moscou dans le dossier ukrainien, et le soutien politique et militaire au régime syrien et son intervention directe dans ce conflit. Cela fait beaucoup pour un président, fût-il celui de l'une des premières armées du monde. D'autant que le maître du Kremlin ne s'est pas totalement dédouané d'avoir piraté et influé sur la campagne électorale aux Etats-Unis en 2017, qui a chahuté la démocrate Hilary Clinton et soutenu son rival républicain Donald Trump, vainqueur 3.0 de cette élection présidentielle américaine. D'autant que le climat politique entre la Russie et l'Occident, notamment après l'empoisonnement en Grande-Bretagne de Sergueï Skripal et sa fille, va impacter la diplomatie russe, dès lors que Poutine aura été officiellement intronisé, pour la quatrième fois, président de Russie. Pour beaucoup, ce dernier mandat de Poutine va ramener à l'ère glaciaire les relations entre Moscou et l'Occident, comme à l'époque de la guerre froide.