Le gouvernement va donc mettre en œuvre une loi de finances complémentaire pour boucler l'année 2018. Une démarche qui montre à quel point la politique économique du gouvernement est limitée, ni orientations claires quant aux objectifs mêmes de cette LFC. Pour l'année 2018, le Premier ministre Ahmed Ouyahia invoquant la crise financière et la baisse des recettes pétrolières dans un contexte de rétrécissement des réserves de change n'avait pas hésité à recourir à une planche de salut, «la planche à billets» ou le financement non conventionnel, pour irriguer une économie exsangue. Alors que des experts et des cercles de réflexion algériens et ceux du FMI ont qualifié cette démarche de techniquement mauvaise, économiquement dangereuse et socialement suicidaire, le gouvernement n'y a pas prêté attention et a donc cru bon d'éviter l'endettement extérieur pour aller vers des solutions de facilité, mais incapables de provoquer une relance de la croissance. Pour autant, il était prévisible que le recours à la planche à billets, notamment pour couvrir les trous béants de la dette de Sonatrach et Sonelgaz et payer les entreprises du BTP qui ont réalisé les dizaines de milliers de logements d'un programme d'habitat volontariste, mais déstabilisées par l'ampleur de la baisse des recettes pétrolières et la hausse des déficits, n'était pas la solution. Recourir au tirage papier pour payer les fonctionnaires, faire fonctionner les structures de l'Etat, le service public, les hôpitaux, les écoles ou les mairies n'a jamais été une solution, même à court terme. Ahmed Ouyahia, pour compenser sa perte de vitesse par rapport à ses objectifs économiques en août dernier, est en train de revenir à ses vieilles formules qui n'ont jamais fait recette, des lois de finances complémentaires et une plus grande pression fiscale pour boucher les trous de la mauvaise planification des besoins de l'économie nationale. Et, fatalement, selon la première mouture de cette LFC 2018, il y aura des nouveautés fiscales tout à fait révoltantes, inouïes. Du moins celles déjà connues donnent lieu à d'innombrables interrogations, car le gouvernement, en allant aux solutions de facilité, montre tout son cynisme et que pour lui augmenter dix fois plus la taxe de la carte grise ou celle du permis biométrique vaut au moins son pesant de dignité sociale. Accablant pour une soi-disant justice fiscale que le gouvernement a, cette fois-ci, du mal à justifier, d'autant que le coût du nouveau permis, celui à points, va passer de 500 DA à 5.000 DA, une hausse qui prend de court tout le monde. Un gouvernement qui montre à quel point il n'a aucun état d'âme pour verrouiller toujours davantage les moindres interstices, les plus petites ouvertures, qui laissaient jusqu'ici le contribuable respirer, avoir sa dose mensuelle d'oxygène. Ce gouvernement, en définitive, ne semble pas mettre en place une politique sociale cohérente, apaisante, de nature à rassurer les citoyens, ceux qui n'ont pas encore totalement tourné le dos à l'urne. Mais une sorte de stratégie illusoire de sortie de crise qui est irriguée par des mesures fiscales impopulaires, froides et dont le résultat n'est pas garanti. D'autant que l'ouverture du foncier agricole aux investisseurs étrangers, également prévue dans cette LFC 2018, pose plus de questions qu'elle ne peut rassurer sur les objectifs inavoués d'une autre fuite en avant, celle de chercher par tous les moyens des partenaires étrangers, quitte à brader au dinar symbolique les plus belles terres agricoles du pays. Après, il y aura, en cas de litige, le recours à un onéreux droit de préemption à payer.