L'ex-ministre des Finances Abderahmane Benkhalfa a estimé, hier, dimanche, que le projet de loi de Finances 2019 (PLF 2019) «maintient une évolution constante des transferts sociaux, et donc du pouvoir d'achat». Il a expliqué à la radio nationale que «c'est une loi de Finances classique», qui n'introduit pas «de changements dans les taux des impôts existants, avec un maintien d'une évolution constante des transferts sociaux, et donc du pouvoir d'achat». «Sur le plan du citoyen et de l'entreprise, cela donne une vision de stabilité, une vision importante aux citoyens et surtout aux acteurs économiques», ajoute t-il, avant de relever que «sur le plan fiscal il n'y aura pas de surprise, pour l'année 2019.» Mieux, l'ex-premier argentier du pays relève que «sur le plan fiscal, nous sommes dans des normes acceptables: le budget, en ne prévoyant pas de rentrées nouvelles, autres que les rentrées budgétaires fiscales, retourne à un sentier où de nouveau, nous sommes dépendants du budget pour la dépense publique qui alimente la vie économique.» Dès lors, «nous sommes retournés à des budgets d'équipements importants. Nous étions, en période de contraction budgétaire (2015 à 2018) et nous sommes retournés à un budget, avec 8.500 milliards de dinars, soutenable.» Pour autant, il nuance et s'interroge si ce type de budget, basé sur la dépense publique, est «soutenable pour l'avenir.» Car, «nous allons dépenser 8,500 milliards de dinars, alors qu'on ne va gagner que 6.500 milliards de dinars, et donc le trend budgétaire est dans une voie difficile», explique-t-il. Le PLF2019 prévoit des recettes budgétaires de 6.507,9 milliards de dinars et des dépenses budgétaires de 8.502,2 milliards de dinars. «C'est pour cela, ajoute-t-il, qu'un déficit sur la base d'un pétrole à 50 dollars/baril n'est pas conforme aux normes», même s'il est «vrai que la fiscalité pétrolière est bonne, elle augmente, et c'est tant mieux.» Le PLF2019 est basé sur un prix du baril de pétrole à 50 dollars US, et un taux de change de 118 DA pour un dollar US. Selon lui, la faiblesse, par ailleurs, de la fiscalité ordinaire «est un problème d'assiette qui n'évolue pas». Pour autant, M. Benkhalfa reste très critique à l'égard du projet de loi de Finances pour 2019 qui, selon lui, «sur le plan de l'environnement économique, sur le plan des ajustements structurels, des réformes, il n'y a pas de signaux dans cette loi de Finances», et «nous restons, en tant qu'acteurs économiques, un peu sur notre faim.» Quant à la faiblesse de la croissance, le PLF2019 prévoit un seuil de 2,6%, il relève qu' «il n'y a pas assez d'investissements économiques», et l'Economie nationale reste «trop concentrée sur les investissements d'Etat, des opérations d'inclusion financière et bancaire ne sont pas mobilisées, au rythme souhaité, l'élargissement de l'assiette fiscale pour régulariser l'informel ne va pas, au rythme souhaité.» Certes, «le retour salutaire d'un budget, financé par la fiscalité pétrolière, est bien dans la conjoncture actuelle, mais ce n'est pas bien, dans le moyen terme», tempère-t-il, avant de relever que «le nouveau modèle de croissance n'est pas, encore, affiché, et la dynamique économique s'adosse aux revenus pétroliers et de budget, qui ne sont pas des éléments de pérennité économique.» Comme il critique ouvertement le soutien des prix, affirmant que «les prix soutenus ne sont pas un bon élément, car ils dérèglent le marché», et «notre économie dans la voie de l'internationalisation et l'ouverture, ne connaît pas de signaux suffisants, à la fois, pour les investissements locaux, ceux de la diaspora et les investisseurs étrangers.» «L'attractivité de l'Economie nationale est faible de ce point de vue», décrète-t-il. Globalement, l'ex-ministre des Finances estime que «nous retournons à la situation, d'avant 2014, avec une commande publique trop forte et un business modèle des entreprises, basé sur la dépense publique. Et donc, toutes les entreprises, qui sont sur la dépense publique, s'il arrive quoi que ce soit en 2020, tomberont de nouveau», prévient-il, avant de souligner que «donc la loi de Finances 2019, dans la conjoncture actuelle, est bonne, elle nous préserve de beaucoup de choses, elle garde notre pouvoir d'achat. Mais, sur le plan de la transformation de l'économie, elle ne porte aucun signal.» En fait, le défaut de ce projet de loi de Finances 2019 est qu'il «reprend le sentier de la croissance, mais à partir du budget et non de l'investissement.» Sur le financement non conventionnel, il a fait remarquer qu' «il y a un décalage entre le trend et les ressources, qui viennent du budget», et si la Banque d'Algérie «finance ce trend par un financement interne, l'année prochaine on aura une restriction forte et une extinction en 2020» du financement non conventionnel. Pour M. Benkhalfa, «notre économie n'est pas réglée par les marchés et par les prix, mais par la distribution», et «une économie ne peut rester longtemps distributive, et les acteurs économiques ne peuvent rester dans l'attente de la dépense publique». Ce qui le pousse à dénoncer «la politique actuelle du logement, qui a fait monter la spéculation immobilière, notamment, avec le nouveau programme de 90.000 logements AADL, avec des crédits bonifiés à 100%.» «Nous continuons à distribuer le logement au tiers de sa valeur, et cela alimente la spéculation», regrette-t-il.