Le dossier des ressortissants algériens en situation irrégulière dans les pays d'Europe a fini par excéder le Premier ministre qui a indiqué, lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue italien, qu'il n'existe aucune campagne organisée de rapatriement de harraga avec aucun pays. Pour Ouyahia, cette insistance à évoquer cette question conférerait presque un cachet prioritaire aux visites des dirigeants européens en Algérie. Au passage, il tient à démentir les propos entendus au lendemain de la venue de Merkel à Alger concernant un programme spécial d'expulsion d'Algériens, affirmant qu'il y avait seulement un «travail continu par lequel cinq ou dix personnes sont expulsées vers l'Algérie chaque semaine». Un simple calcul d'épicier nous indique que sur la base de dix Algériens expulsés par semaine d'Allemagne, on a un total avoisinant les 500 renvoyés par an. Si pour Ouyahia, cette comptabilité reste dans les normes acceptables, pour Berlin, ces expulsions, en sus des Marocains et des Tunisiens, sont en constante augmentation grâce à l'«amélioration de la coopération avec ces pays». Pourtant, les choses ont bougé, ces dernières années, et Alger ne peut plus faire la sourde oreille aux injonctions des pays européens ciblés par l'immigration clandestine à partir des côtes algériennes et des pays voisins sous peine de mesures de rétorsion aussi bien économiques que dans la libre circulation des personnes. L'exemple le plus édifiant de ces pressions européennes reste la délivrance du visa Schengen, même si on persiste à nier l'évidence. Le cas allemand est illustratif de cette évolution puisque une étude menée, là-bas, met particulièrement l'accent sur «des progrès significatifs dans l'identification des personnes potentiellement obligées de quitter le pays». Ainsi, selon la même source, les trois pays d'Afrique du Nord ont désormais la possibilité d'identifier leurs ressortissants «sur la base d'un échange de données biométriques sous forme électronique» entraînant «une forte augmentation du nombre d'identifications» et partant de là des expulsions accélérées. Le temps accordé à ce sujet avec les Italiens est hautement anecdotique, Ouyahia parlant de dix minutes consacrées à seulement 900 sans-papiers en Italie, puisque les enjeux sont ailleurs. Le gouvernement d'union de Conte a fait de l'immigration clandestine un atout considérable dans son programme politique et on voit mal comment il peut s'accommoder de demi-mesures alors que le sujet est de prédilection pour tous ses adversaires. Tout comme Merkel, Conte sait qu'il est surveillé sur ce dossier, lui qui estime avoir trouvé la solution avec les Tunisiens. Alors qu'en est-il avec Alger ?