Des partis politiques et des personnalités ont dénoncé, hier, l'installation de Abdelkader Bensalah au poste de «chef de l'Etat» par intérim, estimant que cette démarche est «dangereuse» pour la sortie de crise. Dans une déclaration écrite, Ali Benflis estime que «l'application intégrale de l'article 102 et la non prise en compte des articles 7 et 8 de la Constitution indiquent clairement que le basculement s'est opéré dans le sens d'une pérennisation des résidus d'un régime politique que le peuple algérien a dénoncé et condamné avec une vigueur extrême». Pour le président de Talaie El Hourriyet, «la manière dont il vient d'être pourvu à la vacance de la présidence de la République ne rapproche pas notre pays de la sortie de crise. Elle l'en éloigne dangereusement». Pour Benflis, «l'application intégrale de l'article 102 contrevient manifestement à cette exigence et heurte frontalement une revendication légitime portée avec insistance par la révolution démocratique pacifique en cours dans notre pays». Selon lui, «l'adjonction des articles 7 et 8 à l'article 102 de la Constitution a nourri l'espoir qu'elle pouvait constituer la base permettant de pourvoir à la vacance de la présidence de la République d'une manière acceptable pour tous et en particulier pour les millions d'Algériennes et d'Algériens qui réclament sans relâche le départ de toutes les figures emblématiques de l'ancien régime». «Il apparaît aujourd'hui clairement qu'il n'a été fait aucun usage des articles 7 et 8 puisque l'application intégrale de l'article 102 a fini par prévaloir comme solution unique et exclusive au problème de la vacance de l'institution présidentielle», ajoute Ali Benflis. Pour Mohcine Belabbas, il s'agit du troisième «coup d'Etat contre la volonté et la souveraineté populaires après ceux de 2008 et 2016». «Même dans le nombre officiel des membres du Parlement, il y a eu de la fraude puisque Bensalah a évoqué 487 membres au lieu de 606 », a déclaré le président du RCD sur sa page Facebook. Sur Facebook également, le Parti des travailleurs estime lui aussi «que le recours à l'article 102 de la Constitution pour remplacer l'ex-président de la République A. Bouteflika démissionnaire a pour unique objectif le sauvetage du système répressif et oppresseur par la confiscation de la volonté et la souveraineté populaires». «Par conséquent, seul le départ de tout le système, de ses institutions et partis, de tous ses symboles politiques et militaires, de sa clientèle et ses courtisans de l'oligarchie prédatrice et mafieuse qu'il a enfantée, de ses pratiques totalitaires, de ses lois scélérates et donc de sa Constitution obsolète, est à même de garantir la liberté d'expression et l'exercice par la majorité du peuple de sa souveraineté pleine et entière», ajoute le PT. Pour le président du MSP, la «continuation du Hirak est nécessaire jusqu'à la démission de Bensalah et celle de Belaïz» et «la désignation d'une personnalité politique acceptable par le peuple» au poste de chef d'Etat par intérim. Abderrezak Makri, sur sa page Facebook, ajoute: «Aller vers des élections sans revoir l'arsenal juridique (relatif aux élections, ndlr) est une aventure pour la stabilité et la sécurité du pays». De son côté, l'avocat Me Mokrane Aït Larbi, ancien directeur de campagne du général Ghediri, a dénoncé une «contre-révolution », estimant qu'avec l'arrivée de Bensalah et le maintien de Bedoui et de Belaïz «la contre-révolution entame sa phase pratique ». «L'organisation de l'élection présidentielle sous les directives des experts en fraude et en corruption, et dans un délai de 90 jours, mènera inévitablement au maintien du système pour une génération au moins », estime l'avocat.