Le slogan « elle arrive la désobéissance civile » scandé par des carrés de manifestants lors de certaines marches de ce vendredi écoulé n'a pas été repris par la masse des marcheurs. Ce que pour autant le pouvoir de fait et Gaïd Salah son homme fort auraient tort de décrypter comme indicateur que la majorité des Algériens réprouvent ce slogan et resteront réfractaires à la forme de contestation que leur prônent ses inspirateurs. Depuis le 22 février les actions du mouvement populaire ont été cantonnées à des marches disciplinées et pacifiques mais qui tout aussi extraordinaires par leur ampleur ne parviennent pas à faire douter le pouvoir sur la certitude qu'il a qu'il parviendra à y mettre fin sans exaucer les revendications qu'elles expriment. Cette situation figée n'a certes pas découragé les citoyens en insurrection pacifique qui sont plus que jamais déterminés à ne « rien lâcher » mais elle attise la frustration chez certains que leur mobilisation sous la forme des marches du vendredi n'est pas à même de contraindre le pouvoir au respect de la souveraineté du peuple. Ils seront de ce fait inéluctablement de plus en plus nombreux à avoir une oreille réceptive à ce que le slogan apparu ce vendredi leur suggère comme nouvelle forme d'action pour intensifier la pression sur ce pouvoir autiste et dans l'incapacité d'admettre qu'il n'est plus le seul maître du jeu dans un pays en insurrection citoyenne. Cet autisme et cette incapacité à admettre ont été démontrés par l'homme fort du pouvoir à travers une intervention dans laquelle il n'y a eu qu'invectives contre les détracteurs de sa feuille de route et menaces à l'endroit de ceux qui sont tentés par les solutions alternatives qu'ils préconisent pour la sortie de crise dans laquelle le pays est plongé. La frustration populaire qui s'élargit au constat qu'en six mois de manifestations pacifiques et sans dérives à même de porter atteinte à la stabilité du pays va finir par constituer un terreau fertile et exploitable pour les radicaux et extrémistes de tous bords. Gaïd Salah ne convainc personne en mettant en garde contre ces radicaux et extrémistes et ce qu'ils prêchent alors que par son rejet des revendications populaires et son refus de reconnaître la primauté de la souveraineté du peuple il donne attractivité à leur préconisation d'accentuer la pression sur le pouvoir en recourant à la « désobéissance civile » dont il résulterait un bras de fer entre ce pouvoir et le peuple aux conséquences tragiques. Si cette perspective n'est pas appréhendée par le pouvoir et son homme fort alors elle se produira inéluctablement. Les Algériens placés dos au mur par l'entêtement du pouvoir à vouloir spolier le mouvement populaire de ses espérances lui opposeront alors toutes les formes de résistance et celle de la désobéissance civile n'en sera qu'une facette.