Les marcheurs étaient en nombre à Alger au rendez-vous du 24e vendredi depuis le 22 février 2019. Des milliers de manifestants ont sillonné la rue Didouche Mourad vers la Grande Poste et la rue Hassiba Ben Bouali, à partir de la place du 1er Mai, vers Zighoud Youcef, sous une forte présence policière pour réduire les accès. C'est particulièrement sur certaines parties de la rue Didouche que la présence de camions de police est plus importante. En particulier depuis la place Audin vers l'agence CPA (Abdelkrim Khettabi - Grande Poste). Comme depuis plusieurs vendredis, les premiers manifestants sont à la Grande Poste et Audin dès 10h - 10h30 du matin. Un premier petit groupe de marcheurs, une cinquantaine, a entamé la manifestation vers 11h du matin, faisant plusieurs allers-retours sur le tronçon de la rue et place Audin vers l'entrée de l'université d'Alger (Faculté centrale), criant des slogans: «Gaïd Salah dégage», «Pouvoir assassin», «Dawla madaniya, machi 3askariya», «Makache intikhabat m3a el 3issabat» (pas d'élections avec la bande), «C'est vous ou nous, on ne va pas s'arrêter», «La nourid hokm el 3askar min djadid» (nous ne voulons pas de nouveau d'un pouvoir militaire», «Le peuple veut l'indépendance». Une heure et demie plus tard, vers 12h30, les manifestants étaient plus nombreux à la place Audin, environ un millier, dont des femmes, à scander «Le peuple veut l'indépendance», «Oulach smah oulach » (pas de pardon) et «Libérez l'Algérie». Selon TSA, plusieurs manifestants ont été arrêtés dans la matinée. Et Selon Saïd Salhi, un membre de la LADDH (Tizi Ouzou), sur sa page Facebook, un membre de l'association RAJ et collaborateur à TSA, Djalal Mokrani, figure parmi les personnes arrêtées. D'autres témoignages non confirmés font état de l'interpellation d'un nombre plus important de manifestants. Le blocage du haut de la rue Hamani (ex-rue Charras) par des camions de la police a obligé des manifestants provenant de la rue Hassiba Ben Bouali pour atteindre la Grande Poste à emprunter des escaliers menant vers Didouche Mourad. A noter aussi qu'un slogan est apparu hier à Alger, scandé par des manifestants à la rue Didouche Mourad, appelant à la « désobéissance civile». Il s'agit, pour la première fois, d'un slogan évoquant une action et non des revendications. A Constantine, la chaleur écrasante n'a pas empêché les manifestants de battre, hier, le pavé, au centre-ville, pour ce 24e vendredi consécutif des manifestations contre le système. Un 24e vendredi bien particulier, car les manifestants ont perdu le sourire dans un état de lassitude et d'incompréhension de leur revendication essentielle, en l'occurrence «yetnahaw gaa» (dégagez tous). Les manifestants qui ont, donc, renouvelé leur rejet du système, étaient en colère. Visiblement, les visages des manifestants étaient crispés et leurs slogans exprimaient bien cet état de fait, inquiétant au plus haut degré. Tous les hauts responsables actuellement en poste ont été fustigés par la foule qui scandait les noms l'un après l'autre, avec en haut de l'affiche « Gaïd Salah dégage », « Bensalah dégage» et «Bedoui dégage». Le nom de Gaïd Salah est revenu dans les slogans des manifestants plus que les deux autres responsables. «Dawla madania machi aaskaria » (état civil et non militaire), ou encore «Le peuple ne veut pas d'un retour au pouvoir des militaires» et «Le peuple veut la chute de Gaïd Salah», des slogans qui laissent clairement entendre la tendance au durcissement du «Hirak». «La désobéissance civile arrive», scandaient des manifestants sur des airs menaçants. Il est loin, déjà, le temps des sourires et de la « silmia » (pacifique) qui caractérisaient jusque-là les marches des manifestants. La menace plane sur la révolution pacifique. D'autres écrits sur des banderoles brandies par les manifestants expriment le rejet des élections avec la issaba (le gang), ou «Thawra chaabia nahiw el goumia » (révolution populaire qui élimine les traitres). Les policiers déployés en nombre au centre-ville n'ont pas eu à intervenir, comme à leur habitude, et la marche s'est déroulée sans aucun incident.