Toute forme de racisme, de régionalisme et de discours de haine sera désormais punie par la loi et ses auteurs passibles de poursuites judiciaires. C'est désormais l'objectif auquel tend le projet de loi que devra élaborer le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, sur instruction du président de la République, Abdelmadjid Tebboune. La libéralisation, tous azimuts, de la parole publique dans le sillage du mouvement du 22 février avec toutes les tensions sociales et politiques qu'il a engendrées, a été salutaire à bien des égards, pour faire parvenir la voix du peuple et ses aspirations les plus légitimes. Le revers de la médaille, néanmoins, a été que cette liberté de parole, particulièrement sur les réseaux sociaux, a laissé libre cours à tous les excès de langage qu'on peut imaginer où les discours racistes, régionalistes et prônant la haine et la division ont graduellement pris la fâcheuse tendance de la banalité. Pire encore, des leaders et des militants politiques de tous bords, prônant des visions « identitaires » assumées, n'hésitent pas à adopter des discours ouvertement haineux qu'on pourrait qualifier de fascistes, en stigmatisant et en discriminant des pans entiers de la société. Voilà donc le contexte général dans le quel ce projet de loi intervient et se présente comme une réponse, avant tout légale face à ces abus. Le communiqué de la présidence de la République, rendu public hier, l'explique d'ailleurs d'une manière on ne peut plus claire. « Cette mesure intervient après avoir constaté une recrudescence du discours de la haine et de l'incitation à la fitna' (discorde), notamment à travers les réseaux sociaux », explique la Présidence, ajoutant qu'elle intervient aussi dans le but « de faire face à ceux qui exploitent la liberté et le caractère pacifique du Hirak' (mouvement populaire) pour brandir des slogans portant atteinte à la cohésion nationale ». Pourtant la Constitution algérienne ne souffre d'aucune ambiguïté sur le sujet. Elle condamne toutes les formes de discrimination sans exception. L'article 298 bis du code pénal, adopté le 26 juin 2001, précise que : «Toute injure commise envers une ou plusieurs personnes qui appartiennent à un groupe ethnique ou philosophique, ou à une religion déterminée est punie d'un emprisonnement de 5 jours à 6 mois et d'une amende de 5.000 à 50.000 DA ou à l'une de ces deux peines ». Un arsenal juridique que le projet de loi vise à renforcer et à consolider. « Tout un chacun est appelé à se conformer à la Constitution et aux lois de la République, notamment le respect des constantes de la Nation et ses valeurs, les principales composantes de l'identité et de l'unité nationales ainsi que les symboles de l'Etat et du peuple », souligne enfin le communiqué de la présidence de la République.