Le développement de l'Energie solaire est au cœur de la transition énergétique, en Algérie. Mais le grand défi est de pouvoir le mener en urgence, rapidement, dans un contexte de course contre la montre pour conquérir le marché d'exportation de l'hydrogène vert pour une Europe soudée autour de «l'Alliance pour l'hydrogène propre», annoncée le 10 mars 2020, à Bruxelles. Selon une évaluation par satellite, de l'Agence spatiale allemande (ASA), l'Algérie représente le potentiel solaire le plus important de tout le Bassin méditerranéen (169.000 TWh/an pour le solaire thermique et 14 TWh/an pour le solaire photovoltaïque), outre ses importantes réserves aquifères. Ces atouts majeurs ne sauraient suffire au pays pour prétendre à cette place si un programme d'Energie solaire puissamment soutenu, financièrement et technologiquement, n'est pas engagé dans les deux ou trois années à venir. Cela s'explique, d'autres pays du MENA, mieux préparés que l'Algérie, s'emploient à conquérir le rôle de partenaire leader de l'Europe dans la région. Le risque de perdre cette place qui échoit à l'Algérie, notamment eu égard à son emplacement géographique et géostratégique pourrait être porteur de complications à long terme pour le pays, sur le plan économique, énergétique et sécuritaire. Les Energies traditionnelles constitueront le principal bouquet énergétique pour seulement 10/15 ans, selon un expert algérien. La production et l'exportation de l'hydrogène solaire en Algérie nécessitent des préalables. Comme premier préalable, il faudrait d'abord, selon des avis d'experts, un leadership imprégné par des visions stratégiques justes par rapport à la conjoncture internationale et régionale, adaptées aux enjeux sécuritaires, économiques et énergétiques, et réfléchies pour la société dans le cadre d'un dialogue sur le plan macro-économique. Inspiré par les orientations du président de la République, le plan d'action du gouvernement a placé la transition énergétique comme une des trois priorités nationales. Aussi, les chevauchements sectoriels dans les prérogatives seront désormais écartés avec la création, pour la première fois, d'un ministère de la Transition énergétique et des Energies renouvelables, confié à un Professeur polytechnicien, en la personne de Pr Chams Eddine Chitour qui avait déclaré, en 2012, que «La bonne méthode consiste à faire ce qu'on appelle les états généraux où chaque département ministériel sera concerné, pas uniquement celui de l'Energie et des Mines». Le deuxième préalable consiste à développer une stratégie de financement. Nous devons nous attendre à une meilleure implication du département ministériel des Finances si l'on se référait aux convictions affichées, en 2012, par l'actuel ministre de la Transition énergétique qui avait indiqué que le plus grand ministère qui doit être concerné par le programme des Energies renouvelables est celui des Finances. Avec la difficile conjoncture économique et financière que subit l'Algérie, le partenariat national/privé/ international en B to B doit être négocié à un moment où l'accès aux financements pour l'Industrie solaire photovoltaïque devient, de plus en plus, difficile avec la crise économique de l'après Covid-19. Les investisseurs internationaux réévaluent constamment leur position et selon le dirigeant suisse allemand d'un consortium, interviewé par un confrère de la presse algérienne, nous pouvons nous attendre à ce que les investisseurs commencent à se retirer, sensiblement du marché, à partir de la fin du troisième trimestre 2020. Le troisième préalable porte sur le cahier de charges devant asseoir tout partenariat national/international. Il s'agit d'abord de la garantie du profit par des assureurs mondiaux sur les produits et services, le transfert de technologie et des connaissances certifiées réellement avec des mises à jour et une industrie avec un très fort pourcentage d'intégration qui permettra l'adhésion active des PME/PMI et startups et la pérennité de l'Industrie solaire, dans le pays et enfin une mise à niveau et une modernisation des infrastructures de transport. A ce jour, aucun pays du MENA n'a pu réunir ces conditions. Mais l'Algérie a une particularité par rapport à ces pays , celle de disposer d'une très bonne infrastructure et d'une base de connaissances dans le secteur de l'Energie, ce qui lui confère un avantage important dans la réalisation d'un tel programme. Néanmoins, de nombreux deals se construisent à présent et l'Algérie doit être en veille pour les appréhender. La première unité de production de l'hydrogène en Afrique pourrait être lancée plutôt au Maroc si nous nous en tenons au mémorandum signé, à cet effet le 10 juin, à Berlin, par l'ambassadeur du Maroc en Allemagne, et le ministre fédéral de la Coopération économique et du Développement. D'autres pays du MENA sont en train développer des stratégies orientées sur l'hydrogène neutre. Avec la mise en œuvre de ses initiatives éoliennes et solaires, le Maroc a déjà créé des capacités considérables de production d'électricité verte et donc un potentiel de production d'hydrogène vert. L'Arabie saoudite, pour sa part, a annoncé des activités solaires et d'hydrogène dans la gamme des gigawatts, au début du mois et l'Egypte se prépare, également, à recevoir une partie du partenariat énergétique lucratif avec l'Europe, dont la Commission européenne estime le volume à 140 milliards d'euros d'ici à 2030. Enfin, il existe aussi une concurrence dans le sud de l'Europe, comme dans le sud de l'Espagne, où le rayonnement solaire, l'espace et les connexions de réseau offrent également des conditions favorables. En somme, l'Algérie doit valoriser des atouts qu'aucun pays ne dispose en termes de coûts d'exportation : ses gazoducs transméditerranéens qui totalisent 7.419 km, outre, Medgaz (210 km) et Galsi (1.505 km). En termes de gestion du timing qui s'impose à l'Algérie pour gagner le pari de leader de la production et de l'exportation de l'hydrogène vert, à partir de l'Energie solaire, le pays doit s'engager dans la réalisation des infrastructures de production de l'Energie solaire photovoltaïque avant une échéance limitée à seulement 2 ou 3 années. Le financement de ce programme en B to B, dans le cadre d'un partenarial impliquant le leadership institutionnel, ne sera accepté par des partenaires européens ou asiatiques que dans l'optique que l'Algérie puisse devenir le leader de l'exportation de l'hydrogène neutre, vers leurs pays. L'échéance de l'Europe d'atteindre l'énergie zéro carbone étant limité à 2030, le temps presse pour ces pays, car leurs calculs stratégiques et de coûts ne leur permettront pas de tergiverser devant les grands défis qui les attendent. Autrement dit, rater cette opportunité équivaudrait à l'Algérie de rater la prise en charge financière de son programme solaire national qui constitue le maillon fort de la transition énergétique, dans son segment relatif aux Energies renouvelables. *Expert en systèmes d'informations